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Adoption de la loi « Avia » contre les contenus haineux sur internet

06 juin 2020

La proposition de loi dite « Avia » a définitivement été adopté le Mercredi 13 Mai 2020 devant l’Assemblée Nationale. Cette proposition de loi a pour objectif la refonte de l’article 6 de la Loi sur la confiance dans l’Economie Numérique du 21 Juin 2004 (LCEN) relatif aux obligations des hébergeurs, pour la lutte contre les contenus « haineux » en ligne.

Après une année de débat parlementaire, voici les obligations incombant aux opérateurs de plateforme en ligne à compter du 1er Juillet 2020.

Les plateformes en ligne concernées

La loi Avia s’adresse aux opérateurs de plateforme définis par l’article L111-7 du Code de la consommation comme « toute personne physique ou morale proposant, à titre professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public en ligne reposant sur : 1° Le classement ou le référencement, au moyen d’algorithmes informatiques, de contenus, de biens ou de services proposés ou mis en ligne par des tiers ; 2° ou la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un contenu, d’un bien ou d’un service. »

Désormais, les obligations de retrait de contenu haineux en ligne concerneront non seulement les hébergeurs, classiquement visés par l’article 6 de la LCEN, mais aussi les moteurs de recherches, ainsi que les plateformes de service de communication au public en ligne telles que les réseaux sociaux, ou encore les plateformes collaboratives. A titre d’exemple, les plateformes plus connues telles que Facebook et Google, ainsi que leurs filiales Instagram ou YouTube, sont expressément soumises à ces obligations.

L’obligation de retrait de contenu manifestement illicite sous des délais spécifiques

Les opérateurs de plateformes en ligne auront pour obligation de retirer dans un délai de 24h tout contenu faisant l’objet d’apologie de certains crimes, d’injures, ou d’incitation à la discrimination, haine ou violence à raison de l’origine, de l’ethnie, d’une prétendue race, de la religion, du sexe, de l’orientation sexuelle, du genre ou d’un handicap. Sont également concernés par cette obligation de retrait le harcèlement sexuel et le négationnisme.

Pour se faire, toute victime de ces contenus devra signaler les prestataires par le biais d’un dispositif mis en place à cet effet. Cette notification très rigoureuse, existant sous l’empire de la LCEN (article 6-I-5), contient des données d’identification de l’internaute (nom, prénom, adresse électronique), le contenu litigieux et sa localisation exacte, ainsi que les motifs légaux pour lesquels il doit être retiré. A compter de la réception de la notification, les opérateurs devront retirer le contenu illicite dans le délai imparti.

Par ailleurs, les opérateurs de plateformes en ligne ont également pour obligation de retirer dans l’heure à compter de la notification par une autorité judiciaire tout contenu pédopornographique et terroriste, ce qui implique une automatisation intégrale du processus pour pouvoir respecter un délai aussi court.

Les contenus retirés devront être conservés afin de les mettre à disposition de l’autorité judiciaire. A ce sujet, un décret en Conseil d’Etat pris après avis motivé de la CNIL définira la durée et les modalités de conservation de ces données. Se posera donc la question de la compatibilité de la durée de conservation des données avec celle de la prescription pénale.

Un alourdissement des sanctions en cas de non-respect de l’obligation de retrait des contenus manifestement illicites

Tout opérateur ne supprimant pas un contenu manifestement illicite dans les délais imposés fera l’objet d’une amende de 250.000 euros pour son représentant, ainsi qu’une amende de 1.250.000 euros pour les personnes morales. Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel pourra également infliger une sanction administrative qui peut atteindre jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires mondial ou 20 millions d’euros.

Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA), garant du respect de la loi Avia

Le CSA jouera un rôle majeur dans l’application de la loi Avia. A compter du 1er Juillet 2020, le CSA se verra chargé de veiller au respect des obligations des plateformes de partage et des moteurs de recherche. Il pourra à cet effet mettre en demeure ces opérateurs de se conformer à la loi Avia. Enfin, le CSA pourra émettre des lignes directrices que les opérateurs de plateforme en ligne pourront suivre.

La création de « l’Observatoire de la Haine en Ligne »

La loi Avia prévoit la création d’un « observatoire de la haine en ligne » placé auprès du CSA, ayant pour rôle la mise en place d’un suivi de l’évolution des contenus haineux en ligne.

Recours constitutionnel

Un recours constitutionnel a néanmoins été introduit contre cette loi, fondé notamment sur la disparition du juge dans l’appréciation du caractère illicite du contenu incriminé (on passe directement de la notification administrative prévue dans la LCEN, à la suppression du contenu par la plateforme destinataire de ladite notification, sans possibilité d’en discuter le bien-fondé), et sur le risque corrélatif de censure d’un grand nombre de contenus non problématiques compte tenu des délais extrêmement courts (24h voire 1h) impartis aux plateformes pour obtempérer, et ce d’autant que l’incrimination de terrorisme est souvent extensive et parfois peu rigoureuse.

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