Contrat de leasing automobile conclu hors établissement : pas de droit de rétractation pour le consommateur

Dans un arrêt rendu sur question préjudicielle le 21 décembre 2023[1], la Cour de Justice de l’Union Européenne précise que, lorsqu’un consommateur conclut avec un établissement bancaire un contrat de leasing automobile, sans obligation d’acheter le véhicule à la fin de la période, il ne bénéficie pas de droit de rétractation, sous réserve qu’il s’agisse bien d’un contrat conclu hors-établissement.

Il s’agissait en l’occurrence d’un contrat de leasing d’un véhicule conclu par un consommateur, pour un usage exclusivement privé, avec un établissement bancaire et par l’intermédiaire d’un concessionnaire automobile.

Dans son raisonnement, la CJUE écarte tout d’abord l’application du droit de rétractation prévu par la Directive de 2008[2] en matière de crédit aux consommateurs, dès lors que le contrat de leasing sans obligation d’achat, qui répond à la définition de contrat de crédit-bail (ou LOA), ne rentre pas dans le champ d’application de cette Directive.

La CJUE écarte ensuite l’application du droit de rétractation prévu par la Directive de 2002[3] sur la commercialisation à distance des services financiers, considérant que les conditions d’application de cette Directive ne sont pas réunies par le contrat de leasing sans obligation d‘achat, dès lors qu’il n’a pas pour objet de fournir un service ayant trait à la banque ou un service ayant trait au crédit.

La CJUE considère en revanche que le contrat de leasing dont il est question entre dans le champ d’application de la Directive de 2011 relative aux droits des consommateurs – et donc potentiellement  du droit de rétractation prévu pour les contrats conclus à distance ou hors établissement – dès lors que le contrat entre dans la définition de contrat de service prévue par ladite Directive (à savoir : « tout contrat autre qu’un contrat de vente en vertu duquel le professionnel fournit ou s’engage à fournir un service au consommateur et le consommateur paye ou s’engager à payer le prix de celui-ci »).

La Cour écarte cependant la qualification de contrat à distance pour ledit contrat de leasing, dans la mesure où, quand bien même le contrat a été signé par le consommateur grâce à une technique de communication à distance, il était présent physiquement en concession automobile, durant la phase préparatoire, en présence du concessionnaire mandaté par la banque pour répondre à ses questions et préparer le contrat.

Reste à savoir si le contrat de leasing peut être qualifié de contrat hors-établissement, ce qui suppose de vérifier, d’après la Cour, si le consommateur « moyen, normalement informé et raisonnablement attentif » pouvait s’attendre, en se rendant chez le concessionnaire automobile, à faire l’objet d’une sollicitation commerciale de la part de l’établissement bancaire, par l’intermédiaire du concessionnaire, et qu’il était clair que le concessionnaire agissait à ce titre au nom et pour le compte de l’établissement bancaire. Si la réponse est positive, alors le contrat ne pourra pas être qualifié de contrat hors-établissement, ce qui sera a priori le cas dans la plupart des situations en matière de leasing automobile.

Si toutefois, au vu des circonstances de sa conclusion, le contrat de leasing peut être qualifié de contrat conclu hors-établissement, la CJUE écarte alors le bénéfice de tout droit de rétractation.

La CJUE rattache cette exclusion à l’exception prévue par l’article 16 de la Directive, et transposée à l’article L 221-28, 12° du Code de la consommation, écartant tout droit de rétractation pour les contrats de prestation de service de location de voitures qui doivent être fournis à une date ou à une période déterminée.

La Cour relève que le texte ne distingue pas entre les locations de voiture à courte ou à longue durée, rappelant en outre que le consommateur, dans le cadre d’un contrat de leasing, choisit les spécifications du modèle de véhicule. Prenant ainsi en compte des paramètres économiques, la Cour explique que le professionnel « pourrait, dans le cas où un droit de rétractation serait reconnu au consommateur, rencontrer des difficultés à réaffecter, sans subir à cet égard des inconvénients disproportionnés, le véhicule spécialement acquis à la demande du consommateur pour répondre aux spécifications de ce dernier. En effet, en fonction, notamment, de la marque, du modèle, du type de moteur, de la couleur de la carrosserie ou de l’intérieur du véhicule ou encore des options dont celui-ci est équipé, le professionnel pourrait ne pas réussir, dans un délai raisonnable suivant l’exercice du droit de rétractation, à affecter le véhicule à une autre utilisation équivalente pour la période correspondant à la durée du leasing originellement prévue, sans subir un dommage économique important »[4].

La CJUE ajoute que cette interprétation est cohérente avec une autre exception au droit de rétractation prévue en cas de « fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés »[5],quitémoigne selon elle « de la volonté du législateur de l’Union d’exclure le droit de rétractation dans les cas où un bien a été fabriqué ou confectionné selon des spécifications précises du consommateur, ce qui est le cas lorsqu’un véhicule neuf est commandé selon les spécifications précises du consommateur en vue d’une utilisation dans le cadre d’un contrat de leasing ».

Si l’impact de cet arrêt paraît à ce jour limité en matière automobile, dès lors qu’au vu de la pratique, un consommateur qui se rend en concession automobile peut raisonnablement s’attendre à se voir proposer par le concessionnaire, un contrat de leasing (crédit-bail ou Location action d’achat) avec l’établissement bancaire lié à la marque du véhicule choisi, la solution retenue par la CJUE, applicable également aux Locations longues durées (LLD) aura en revanche son importance dans le développement à venir des ventes à distance de véhicules et des contrats associés.

Le raisonnement de nature plus économique de la CJUE relevé ci-dessus permet en effet de s’interroger plus largement sur l’application du droit de rétractation aux ventes, à distance ou hors établissement, de véhicules neufs, confectionnés par définition selon des spécifications précises du consommateur, quand bien même ils ne seraient pas destinés à un leasing.


[1] CJUE 21 déc. 2023, BMW BANK, aff. C-38/21

[2] Directive 2008/48/CE

[3] Directive 2002/65/CE

[4] Point 199 de l’Arrêt

[5] Article L 221-28 3°

Procédure civile et droit des pratiques restrictives : revirement de jurisprudence

L’examen des litiges fondés sur les pratiques restrictives de concurrence des articles L 442-1 et suivants du Code de commerce est attribué par la loi à certains tribunaux spécialisés en première instance, désignés par l’article D 442-2 du même Code, et à la Cour d’Appel de Paris au stade de l’appel.

Jusqu’alors, la saisine d’une juridiction ne figurant pas dans la liste des tribunaux spécialisés était sanctionnée par une fin de non-recevoir, qui devait le cas échéant être relevée d’office par la juridiction saisie si ce n’était pas fait par l’une des parties. Conformément à l’article 122 du Code de procédure civile, la partie ayant saisi la mauvaise juridiction était alors déclarée irrecevable en sa demande, sans examen au fond, et devait réassigner son adversaire devant la bonne juridiction, au risque de voir, dans l’intervalle, la prescription acquise ou son délai de recours expiré.

Dans un arrêt du 18 octobre 2023[1], la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence, et considère désormais que la saisine d’une juridiction non spécialisée relève du régime de l’exception d’incompétence.

Ce changement de qualification a plusieurs conséquences.

Il en résulte notamment que la saisine, quand bien même elle est adressée à une juridiction incompétente, interrompt la prescription, contrairement aux fins de non-recevoir.

L’exception d’incompétence doit par ailleurs être soulevée avant toute défense au fond (in limine litis), à la différence des fins de non-recevoir qui peuvent être soulevées à tout moment au cours de la procédure (en tout état de cause).

La juridiction saisie a en outre l’obligation de renvoyer la procédure devant la juridiction compétente sans que la partie en demande n’ait à réassigner.

Il est intéressant de relever que la Cour de cassation justifie expressément son revirement dans le cadre de son arrêt, faisant le constat que « cette construction jurisprudentielle complexe (…) aboutit à des solutions confuses et génératrices, pour les parties, d’une insécurité juridique (…). Elle donne lieu, en outre, à des solutions procédurales rigoureuses pour les plaideurs qui, à la suite d’une erreur dans le choix de la juridiction saisie, peuvent se heurter à ce que certaines de leurs demandes ne puissent être examinées, en raison soit de l’intervention de la prescription soit de l’expiration du délai de recours. Au surplus, sa complexité de mise en œuvre ne répond pas aux objectifs de bonne administration de la justice. Enfin, elle est en contradiction avec l’article 33 du code de procédure civile dont il résulte que la désignation d’une juridiction en raison de la matière par les règles relatives à l’organisation judiciaire et par des dispositions particulières relève de la compétence d’attribution. »

Pour les procédures à venir, cela impliquera que le défendeur devra veiller à soulever l’incompétence du tribunal saisi au tout début de la procédure, sous peine de ne plus être recevable à le faire.

Concernant les procédures en cours, il semblerait qu’il soit nécessaire, le cas échéant, de conclure à nouveau afin de soulever une exception de procédure en lieu et place d’une fin de non-recevoir.


[1] Cass. Com. 18 oct. 2023, n° 21-15.378

Concurrence et RGPD : une autorité nationale de concurrence peut contrôler la conformité au RGPD, dans la limite de son domaine de compétences 

Dans le cadre d’un litige opposant l’autorité de concurrence allemande (le Bundeskartellamt) au groupe Meta (propriétaire notamment du réseau social Facebook), une juridiction allemande a posé à la CJUE sept questions préjudicielles, dont la question de savoir si une autorité nationale de concurrence pouvait contrôler la conformité d’un traitement de données personnelles avec les exigences du RGPD.

Dans sa décision en date du 4 juillet 2023 (1), la CJUE a confirmé la possibilité pour une autorité de concurrence nationale d’examiner la conformité du comportement d’une entreprise à des normes autres que celles relevant du droit de la concurrence, à la condition toutefois que ladite autorité de concurrence reste dans son domaine de compétence et n’empiète pas sur les compétences d’autres autorités de régulation, et qu’elle respecte le principe de la coopération loyale entre les différentes autorités de contrôle nationales concernées.

Ainsi, dans le cas ayant donné lieu à la question préjudicielle, la CJUE a précisé que l’autorité de concurrence allemande peut examiner une pratique constitutive d’un abus de position dominante au regard du RGPD, en se limitant toutefois à une appréciation du RGPD « aux seules fins de constater un abus de position dominante » et d’imposer des mesures visant à la cessation de cet abus selon les règles du droit de la concurrence.

Il appartient en outre à ladite autorité de vérifier au préalable si le comportement non conforme au RGPD ou un comportement similaire n’a pas déjà donné lieu à une décision de l’autorité veillant au respect du RGPD ou de la CJUE, et le cas échant s’y conformer, tout en restant libre d’en tirer ses conclusions sous l’angle de l’application du droit de la concurrence.

(1) CJUE 4 juillet 2023, n°C-252/21

Secteur automobile : la CJUE rend une décision importante sur l’accès des opérateurs indépendants aux informations techniques des constructeurs

La Cour de Justice de l’Union européenne a rendu le 5 octobre 2023 une décision[1] intéressant le secteur automobile, arrêt qui mérite d’autant plus d’être noté que rares sont les décisions afférentes à l’accès des opérateurs indépendants aux informations techniques des constructeurs.

Pour accéder aux informations techniques, aux équipements de diagnostic et au système de diagnostic embarqué dit ‘OBD’, les marques du groupe Stellantis exigent l’inscription à un serveur spécifique (dit ‘Secure gateway’), moyennant un abonnement payant. Stellantis justifie ces exigences par des impératifs de cybersécurité.

Carglass (opérateur indépendant, spécialisé dans la réparation et le changement des pares-brises) et le réseau de centres auto allemands A.T.U ont fait valoir qu’après le changement du pare-brise, il était nécessaire de recalibrer les systèmes d’aide à la conduite, ce qui ne peut se faire sans accéder aux informations techniques et systèmes de diagnostic du constructeur.

Se fondant sur le Règlement d’homologation UE 2018/858, qui ne permet pas au constructeur de s’abriter derrière des considérations de cybersécurité, Carglass et A.T.U ont assigné FCA Italy Spa (soit Fiat, appartenant au groupe Stellantis) devant le Tribunal régional de Cologne qui, en 2022, a préféré renvoyer l’affaire devant la CJUE.

Par sa décision du 5 octobre 2023, la CJUE a jugé que les restrictions spécifiques aux constructeurs concernant l’accès aux systèmes de diagnostic embarqué des véhicules sont illégales. La CJUE a ainsi rappelé que les constructeurs automobiles devaient « fournir un accès illimité, normalisé et non discriminatoire aux informations du système OBD ainsi qu’à celles sur la réparation et l’entretien des véhicules », sans contraintes autres que celles issues des textes européens et selon une présentation effectuée « de manière aisément accessible ».

Les professionnels sont maintenant dans l’attente d’une décision nationale venant préciser les modalités de la mise en œuvre locale de cette obligation.


[1] Arrêt de la Cour (huitième chambre) du 5 octobre 2023 (demande de décision préjudicielle du Landgericht Köln — Allemagne) — A.T.U. Auto-Teile-Unger GmbH & Co. KG, Carglass GmbH / FCA Italy SpA, Affaire C-296/22

Adoption de la loi de finance pour 2024 – Un durcissement de la fiscalité applicable aux véhicules polluants

La répartition des dépenses et des recettes de l’Etat pour l’année à venir est fixée tous les ans par une loi de finance proposée par le Gouvernement, votée par l’Assemblée nationale. Pour l’année 2024, il s’agit de la loi de finance n°2023-1322 du 29 décembre 2023 publiée au Journal officiel le 30 décembre 2023.

Nous nous attacherons ici uniquement aux mesures qui concernent la fiscalité automobile, en l’occurrence l’article 97 de la loi de finance dont les dispositions ont eu pour objet de renforcer les taxes déjà existantes sur les véhicules polluants à compter du 1er janvier 2024.

S’agissant de la taxe sur les émissions de CO2 (dite aussi malus CO2) due lors de la première immatriculation des véhicules de tourisme neufs en France, la loi de finance 2024 a abaissé le seuil de déclenchement du malus aux véhicules émettant plus de 117g de CO2/km (contre 123g en 2023), avec pour ce niveau de pollution une taxation de 50€. La dernière tranche du barème s’élève désormais à 60 000€ pour les véhicules émettant plus de 193g de Co2/km (au lieu de 50 000€ en 2023 pour les véhicules émettant plus de 225g). Le plafonnement du malus CO2 à 50 % du montant d’acquisition du véhicule a également été supprimé.

S’agissant de la taxe sur la masse en ordre de marche (dite aussi malus masse), elle s’applique désormais à la première immatriculation des véhicules de tourisme neufs en France pesant plus de 1,6 tonne contre 1,8 tonne en 2023 et est comprise entre 10€ et 30€ par kg.

Pour ces deux taxes, le bénéfice de l’abattement “famille nombreuse” (3 enfants ou plus) lors de la première immatriculation du véhicule en France est désormais limité à une fois par période de deux ans, pour éviter les abus.

Pas de changements toutefois pour l’achat de véhicules d’occasion qui se verront toujours appliquer, lors de leur première immatriculation en France, un abattement de 10 % par année depuis leur date de première mise en circulation sur le malus CO2 et le malus masse. Le projet de loi de finance prévoyait en effet initialement un abaissement de l’abattement passant de 10% à 5% mais cette proposition a finalement été abandonnée.

Enfin et s’agissant des taxes concernant les véhicules de tourisme affectés à des fins économiques (véhicules de société), on relève deux évolutions :

  • D’une part, le seuil de déclenchement de la taxe annuelle sur les émissions de CO2 des parcs automobiles des entreprises a été abaissé, passant de 21g à 15g de CO2/km ;
  • D’autre part, la taxe annuelle sur l’ancienneté des véhicules a été remplacée par une taxe sur les émissions de polluants atmosphériques, de 0, 100 ou 500 € selon la catégorie Crit’Air.

Ce durcissement de la fiscalité des véhicules polluants va de pair avec des mesures encourageant les consommateurs à choisir des véhicules plus respectueux de l’environnement. La mise en place par le décret n°2023-1183 du 14 décembre 2023 d’un dispositif de location avec option d’achat (LOA) de véhicules électriques à 100 euros par mois ou moins (autrement appelé “leasing social”) en est une illustration.

 

Information des consommateurs – Proposition de loi visant à renforcer la transparence de l’information relative à la commercialisation des voitures électriques et à la distribution d’énergie 

Sur la base du constat de l’augmentation fulgurante des ventes de voitures électriques en France entre 2019 et 2022 (+374 % en trois ans), l’ancien député Dino Cineeri (LR) avait déposé le 15 juin 2023 une proposition de loi, composée de deux articles, visant à améliorer l’information des consommateurs dans ce secteur.

L’article 1 de cette proposition de loi vise à imposer trois obligations d’informations aux constructeurs automobiles et aux vendeurs : 

  • Informer les acheteurs sur le temps de recharge à 100% de la batterie ; 
  • Indiquer la capacité de batterie “utilisable” plutôt que la capacité totale ; 
  • Communiquer sur la durée de vie de la garantie de la batterie, calculée sur la base de la capacité de batterie utilisable. 

L’article 2 vise les réseaux de distribution d’énergie et propose d’imposer une obligation d’affichage sur les bornes de recharge du prix de vente de Kilowattheure et du coût total en euros de la recharge effectuée. 

Si cette proposition de loi nous semble effectivement bienvenue dans un contexte d’électrification du parc automobile français, il semblerait qu’elle ne soit toutefois pas prête de voir le jour, étant toujours en cours d’examen auprès de la Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale. 

Rupture brutale des relations commerciales établies – La relation commerciale avec un apporteur d’affaires peut entrer dans le champ de l’article L.442-1 du Code de commerce

L’apporteur d’affaires est un intermédiaire dont la mission est de rapprocher deux personnes en vue de les amener à contracter, sans intervenir dans la négociation du contrat éventuellement envisagé. Par sa nature même, l’activité d’apporteur d’affaires peut donc paraître précaire et aléatoire puisqu’aucune des parties mises en relation par l’apporteur n’est forcée de contracter.

Dans un arrêt rendu le 27 septembre 2023 par la Cour d’appel de Paris (RG n°22/10517), tel est justement l’argument que soutenait une banque pour écarter l’application de l’article L.442-1 du Code de commerce à la rupture de la relation commerciale avec son courtier en assurance et en opérations de banque. Etant donné que les clients présentés par le courtier pouvaient rejeter les offres de crédit éventuellement proposées par la banque et que le courtier n’avait aucune obligation de lui présenter des clients, la banque soutenait que la relation entre les parties ne remplissait pas le critère de stabilité posé par l’article précité.

C’est ainsi que la Cour d’appel de Paris a eu l’opportunité de préciser, s’agissant du critère de stabilité, que celui-ci « s’entend de la stabilité prévisible, la victime de la rupture devant pouvoir raisonnablement anticiper pour l’avenir une certaine continuité du flux d’affaires avec son partenaire commercial”.

En l’espèce, les relations entre les parties avaient été formalisées en 2016 par la conclusion d’une convention d’apporteur d’affaires aux termes de laquelle l’apporteur s’engageait à apporter des clients à la banque en vue de la conclusion entre ceux-ci et la banque d’un contrat de crédit immobilier. La Cour relève que la relation commerciale qui s’était nouée avait pour objet de permettre au courtier d’être apporteur d’affaires et se distinguait de la conclusion proprement dite des contrats entre les clients, démarchés par le courtier, et la banque. La relation entre le courtier et la banque présentait donc un caractère suffisamment stable et continu, ainsi qu’il en résultait du chiffre d’affaires réalisé par l’apporteur qui pouvait raisonnablement anticiper pour l’avenir une certaine continuité de flux d’affaires avec la banque.

Le préavis d’un mois donné par la banque à son courtier a par conséquent été jugé insuffisant s’agissant d’une relation établie d’une durée de 3 ans et 5 mois. La Cour a fixé le préavis raisonnable à 3 mois et a condamné la banque à payer au courtier la somme de 1 584 euros à titre de dommages et intérêts.

Pour l’application de l’article L.442-1 du Code de commerce, peu importe donc le caractère précaire de l’activité de l’une des parties à la relation commerciale dès lors que ladite relation présente “un caractère suivi, stable et habituel ». Si cette solution n’est pas nouvelle, son application dans le secteur du courtage a désormais été utilement précisée par la Cour d’appel de Paris.

Prescription et garantie des vices cachés : Résistance de la Cour d’appel de Riom à la jurisprudence de la Chambre Mixte de la Cour de cassation

Par plusieurs arrêts du 21 juillet 2023[1], la Chambre mixte de la Cour de cassation avait marqué un tournant jurisprudentiel important en ce qui concerne la garantie des vices cachés.

Pour rappel, la Cour de cassation s’était notamment prononcée sur l’encadrement du délai d’action de cette garantie, et avait jugé que le délai de deux ans de l’article 1648 du Code civil est lui-même encadré par le délai butoir de 20 ans prévu à l’article 2232 du même Code. Par ailleurs, la Cour de cassation avait considéré que le délai butoir de 20 ans court à compter du jour de la vente conclue par la partie recherchée en garantie.

Une telle décision, particulièrement polémique, n’a pas manqué de trouver son premier détracteur.

En effet, par un arrêt du 12 décembre 2023[2], la Cour d’appel de Riom a jugé que le délai de deux ans de l’article 1648, courant à partir de la découverte du vice, était enfermé dans un délai de cinq ans, lequel commence à courir à compter de la vente.

Pour justifier cette position, la Cour d’appel a précisé que la jurisprudence de la Chambre Mixte de la Cour de cassation n’est en réalité applicable qu’en matière immobilière.

Il est vrai que si certains des arrêts de la Chambre Mixte avaient été rendus en matière mobilière, la Cour de cassation ne s’était pas prononcée sur la distinction entre l’action mobilière et l’action immobilière. Pourtant, une telle distinction parait, en pratique, extrêmement pertinente. 

La Cour d’appel de Riom affirme ainsi que les arrêts de la Chambre Mixte sont « sans transposition à la jurisprudence constante de la 1ère Chambre civile ainsi que de la Chambre commerciale de la Cour de cassation sur ce « délai glissant » n’excédant pas cinq ans à partir de la vente initiale en cas d’application des dispositions combinées de l’article L.110-4 du code de commerce et de l’article 1648 du Code civil en matière de vente mobilière, et plus spécialement en matière de vices cachés pouvant être révélés sur un véhicule automobile après sa mise en vente. »

Une telle distinction est particulièrement la bienvenue, notamment pour les constructeurs et importateurs automobiles.

Mais, de façon encore plus importante, elle permet de combler une lacune juridique du raisonnement adopté par la Chambre Mixte dans ses arrêts.

En effet, la Cour de cassation avait rappelé, à juste titre, que le point de départ des délais de prescription des articles 2224 du Code civil et L 110-4 du Code de commerce d’une part, et celui de l’article 1648 du Code civil d’autre part, étaient finalement identiques, à savoir le moment à partir duquel le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

La Chambre Mixte se tournait alors vers une autre disposition du Code civil, afin de donner une base législative à son raisonnement, et trouvait l’article 2232 du Code, lequel prévoit un délai de 20 ans, le fameux délai dit « butoir ». La Chambre Mixte expliquait que ce texte était le seul permettant d’encadrer dans le temps l’action en garantie des vices cachés.

Pourtant, lorsque l’on reprend les termes de l’article 2232, on peut lire la phrase suivante : « Le report du point de départ, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit. »

Autrement dit, la Chambre Mixte a repris pour base un délai dont le point de départ est exactement le même que celui des autres articles dont elle cherchait à se démarquer (article L110-4 du Code de commerce, articles 1648 et 2224 du Code civil). La tentative d’encadrer l’action en garantie des vices cachés est ainsi un échec.

De fait, la Cour d’appel de Riom, en reprenant la jurisprudence de la 1ère Chambre civile et de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, a choisi la date de la vente comme point de départ du délai de prescription. Il s’agit là de la seule option permettant de conserver une certaine sécurité juridique. En effet, seul un point temporel fixe – en l’occurrence, la date de la vente – en guise de point de départ du délai de prescription permet de figer dans le temps l’action en garantie des vices cachés.

Toutefois, cette décision a d’ores et déjà fait l’objet d’un pourvoi en cassation. Il conviendra d’être particulièrement attentif à la réponse de la Haute juridiction.


[1] Ccass. Ch. Mixte, 21 juillet 2023, n° 21-15.809 ; Ccass. Ch. Mixte, 21 juillet 2023, n° 21-17.789 ; Ccass. Ch. Mixte, 21 juillet 2023, n° 21-19.936 ; Ccass. Ch. Mixte, 21 juillet 2023, n° 20-10.763 

[2] CA Riom, 12 décembre 2023, n° 23/00571 

Rupture de relations commerciales établies : la durée du préavis définie contractuellement est la durée de préavis minimum

Dans l’un de ses arrêts rendus le 28 juin 2023[1], la Cour de cassation redonne au préavis contractuel toute sa portée, rappelant la force obligatoire des conventions telle prévue à l’article 1103 du Code Civil.

La Cour de cassation a en effet jugé que le préavis déterminé par les parties à un contrat constitue un minimum et qu’il appartient aux juges du fond d’apprécier « si la durée du préavis devait être égale ou supérieure à celle prévue contractuellement ».

La durée du préavis contractuel s’impose ainsi aux parties comme étant un minimum, susceptible d’être augmenté, si les critères d’appréciation de la durée du préavis posés par l’article L 442-1, II du Code de commerce conduisent à retenir une durée plus longue que celle contractuellement convenue.

Il en résulte que la durée du préavis contractuel n’est pas uniquement un critère parmi d’autres à prendre en compte pour déterminer la durée du préavis dans le cadre de la rupture d’une relation commerciale établie, la Cour de cassation arbitrant ainsi entre le respect de la volonté des parties et le caractère impératif du préavis visé à l’article L 442-1 du Code de commerce.


[1]  Cass.Com. 28 juin 2023, n° 22-17933

Assouplissement de la règlementation sur le rétrofit

Dans le cadre du plan d’action national en faveur du rétrofit (c’est-à-dire la conversion d’un véhicule à moteur thermique en véhicule à propulsion électrique), le Ministère de la Transition énergétique, de l’Industrie et des Transports a annoncé, le 24 octobre 2023, la publication de 3 Arrêtés destinés à préciser et simplifier la règlementation du rétrofit, et notamment à « faciliter les procédures d’homologation ».

Ces Arrêtés font suite aux travaux menés avec les experts du domaine, et à une consultation publique effectuée du 25 mai au 16 juin 2023.

L’Arrêté du 29 juin 2023, modifiant l’Arrêté du 15 mai 2013, vise les conditions d’installation et de réception des dispositifs de post-équipement pour réduire les émissions de polluants des véhicules en service. L’Arrêté du 12 septembre 2023, modifiant l’Arrêté du 13 mars 2020, est relatif aux conditions de transformation des véhicules. L’Arrêté du 12 septembre 2023, modifiant l’Arrêté du 19 juillet 1954, est relatif à la réception des véhicules automobiles.

Un effet important de ces Arrêtés, qui sont censés répondre aux demandes récurrentes de la filière, est d’étendre le rétrofit aux véhicules « spéciaux » (dépanneuses, camping-cars, et véhicules de transport de personnes à mobilité réduite, grues mobiles). D’autre part, les vendeurs devront désormais communiquer à l’acheteur les émissions de gaz à effet de serre évitées en moyenne pendant 10 ans avec la conversion de son véhicule.

Ces dispositions viennent d’être complétées par le Décret n° 2024-102 du 12 février 2024 relatif aux aides à l’achat ou à la location de véhicules peu polluants, qui, entre autres mesures, étend aux véhicules hybrides rechargeables rétrofités (précisément : les voitures et camionnettes thermiques ayant fait l’objet d’une transformation en véhicule hybride rechargeable) la prime au rétrofit. En parallèle, la prime au rétrofit électrique des utilitaires se trouve réduite de 1 000 €.

Reste maintenant à voir si ces dispositions, que certains professionnels du rétrofit ont qualifié de « mesurettes », permettront « d’accélérer le développement de la filière », ainsi que l’a souhaité la Ministre de la Transition énergétique.

Secteur automobile : un bref point d’étape sur la route vers le véhicule décarboné

L’actualité est permanente lorsqu’il s’agit du processus menant vers la mise sur le marché de véhicules décarbonés à l’horizon de quelques années.

Parmi les annonces et débats récents, un focus sur les objectifs de décarbonation et l’évolution des normes visant les véhicules actuellement sur le marché.

Mise en place d’un calendrier de décarbonation pour les bus et les camions

Pour rappel, voici près d’un an (le 14 février 2023, par 340 voix pour, 279 contre), le Parlement européen a approuvé le projet de règlementation mettant fin à la vente de véhicules neufs à moteur thermique en 2035.

Des dispositions concordantes ont plus récemment été prises concernant les bus et « poids-lourds » à moteur thermique, puisque le Parlement européen a adopté, le 21 novembre 2023 (par 445 voix pour, 152 voix contre et 30 abstentions), un texte visant à réduire fortement les émissions de carbone des véhicules lourds vendus dans l’UE (véhicules qui, en l’occurrence, génèrent plus de 6 % des émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne, et plus d’un quart des émissions du transport routier).

Pour ce qui est des camions, il ne s’agit pas d’une interdiction à date fixe de la vente de véhicules neufs, mais d’une réduction globale programmée de leurs émissions, à raison de 45% (par rapport à 2019) pour les véhicules vendus à partir de 2030, de 65% à partir de 2035, et de 90% à partir de 2040.

Dans le même temps, il a été décidé que les obligations visant à la décarbonation s’étendraient aux camions petits et moyens (incluant dès lors les bennes à ordure et les bétonnières), ceci allant de pair avec une réduction de la liste des dérogations (les véhicules de police ou de pompiers, ambulances et véhicules agricoles restent exemptés de ces dispositions).

Pour ce qui est des bus, tous nouveaux véhicules mis en service dans les villes européennes à partir de 2030 devront être « zéro émission ».

Adoption de la proposition de norme Euro 7

L’Union européenne ne se limite pas à se projeter sur des échéances à venir pour la décarbonation, totale ou partielle, des véhicules.

Elle règlemente aussi, et cela sans attendre 2030 ou 2035, les émissions des véhicules automobiles mis en vente dès à présent.

Pour rappel, par la mise en place des normes Euro 6 (automobiles et camionnettes) et Euro VI (bus, camions et autres véhicules utilitaires lourds) le 10 novembre 2022, la Commission avait opté pour des règles plus strictes en matière d’émissions de polluants atmosphériques pour les véhicules à moteur à combustion, quel que soit le carburant utilisé.

Quasiment un an après, le 9 novembre 2023, les députés européens ont approuvé le texte sur les futures normes d’émissions de polluants Euro 7 (à 329 voix pour, 230 contre et 41 abstentions).

Le nouveau règlement modifiera les limites actuelles pour les émissions d’échappement (comme les oxydes d’azote, les particules, le monoxyde de carbone et l’ammoniac), et introduira de nouvelles mesures pour réduire les émissions des pneus et des freins, ainsi que pour augmenter la durabilité des batteries.

Sont ainsi proposés : une division des émissions en 3 catégories pour les véhicules utilitaires légers, en fonction de leur poids ; des limites plus strictes d’émissions d’échappement mesurées en laboratoire et dans des conditions de conduite réelles pour les bus et les véhicules utilitaires lourds ; un alignement des méthodes de calcul et des limites européennes pour les émissions de particules des freins et les taux d’abrasion des pneus sur les normes internationales en cours d’élaboration par la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe.

Le Parlement est maintenant prêt à entamer des négociations avec les gouvernements de l’UE sur la forme finale de la loi.

A l’occasion de la présentation de la future norme Euro 7, le rapporteur Alexandr Vondra a déclaré : « Nous avons réussi à trouver un équilibre entre les objectifs environnementaux et les intérêts vitaux des fabricants. Il serait contre-productif de mettre en œuvre des politiques environnementales qui nuisent à la fois à l’industrie européenne et à ses citoyens. Avec ce compromis, nous servons les intérêts de toutes les parties impliquées et nous évitons des positions extrêmes ».

Pour autant, cette volonté affichée d’équilibre entre les objectifs des uns et les intérêts des autres n’a pas évité que des avis divergents s’expriment. Les écologistes estiment que ces mesures ne vont pas assez loin, et assez vite ; les constructeurs font valoir que ces obligations leur imposent des investissements lourds pour mettre en conformité les véhicules actuellement sur le marché, alors que des efforts considérables leur sont déjà demandés pour atteindre les objectifs de décarbonation à échéance de 2030 et 2035.

Par la voix de son actuel Président, Luca de Meo, DG de Renault, l’Association des Constructeurs Européens Automobiles (ACEA) demande d’ailleurs, publiquement, à ce que les institutions européennes cessent d’empiler les normes et manifestent une vision cohérente sur le long terme.

A ces divergences s’ajoutent des considérations politiques (l’issue des prochaines élections européennes et américaines pourrait avoir une incidence sur l’actuel calendrier de décarbonation des véhicules, voire sur le principe même de celle-ci) et budgétaires (la France poursuit une politique de bonus incitatif à l’achat de véhicules électriques[1], quand l’Allemagne vient de supprimer les bonus pratiqués jusque-là).

Le moins que l’on puisse dire est que le chemin vers le véhicule décarboné n’est pas encore dégagé…


[1] Tout en « réduisant la voilure » : le tout récent Décret du 12 février 2024 abaisse l’aide gouvernementale de 5 000 à 4 000 € pour les ménages les plus aisés (mais le majore de 3 000 € pour les personnes dont le revenu fiscal de référence par part est inférieur ou égal à 15 400 €).

A l’égard des entreprises (« personnes morales »), le Décret diminue également de 1 000 € le montant maximal du bonus écologique applicable à l’acquisition de camionnettes neuves et supprime le bonus écologique applicable à l’acquisition de voitures particulières neuves.

Automobile : le projet de loi de Finances fixe les contours de la fiscalité automobile en 2024

Sous le double chapeau de la réduction des émissions de CO2 et de la prise en compte de l’inflation, le projet de loi de Finances 2024 donne les marqueurs des prochaines taxes automobiles à compter du 1er janvier 2024 :

  • Seuil du déclenchement du malus CO2 : il est réduit de 123 à 118 g/km, avec un montant de 50 € à payer.
    A partir de 194 g/km, le malus atteint 60 000 €, mais il n’est plus plafonné à 50 % du prix du véhicule. Entre ces limites, le barème est progressif.
  • Taxe sur le poids des véhicules (« taxe sur la masse en ordre de charge ») : alors que jusque-là, elle se déclenchait à partir de 1 800 kg et se calculait en ajoutant 10 € par kilo supplémentaire, le seuil est abaissé à 1 600 kg mais le barème est progressif, comme le montant du kilo supplémentaire.
    Ainsi, entre 1 600 et 1 799 kg, la taxe sera de 10 € / kilo ; à partir de 2 100 kg et au-delà, la taxe sera de 30 € / kilo.
    A compter du 1er janvier 2025, les véhicules hybrides rechargeables dits « PHEV » ayant plus de 50 km d’autonomie électrique bénéficieront d’un abattement de 200 kg, dans la limite de 15 % du poids en ordre de marche.
  • Taxe annuelle sur l’ancienneté : elle est remplacée par une taxe sur les polluants alignée sur les vignettes Crit’Air.
    Ainsi, pour les véhicules Crit’Air 0 (électrique ou hydrogène), aucune taxe ne sera due ; pour les Crit’Air 1, elle sera de 100 € ; et pour tous les autres véhicules, elle sera de 500 €.
  • Taxe annuelle sur les émissions de CO2 pour les professionnels (ex-TVS) : alors qu’il se situait à 20 g/km jusqu’à présent, le seuil de déclenchement passera à 14 g/km de CO2.
    Le Ministre de l’Economie a aussi souhaité indiquer les perspectives au-delà de 2024, et a précisé que le seuil de déclenchement devrait baisser progressivement, pour passer à 5 g/km dans deux ans.

Automobile – Contrôle technique des deux-roues : le Conseil d’Etat sonne le coup d’arrêt

Rappelons que, le 31 octobre 2022, sur requête de trois associations (Respire, Ras-le-Scoot et Paris sans voiture), le Conseil d’Etat avait annulé pour excès de pouvoir un décret n°2022-1044 du 25 juillet 2022, lequel devait abroger le décret n°2021-1062 du 9 août 2021, mettant en place le contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles moteurs.

Les mêmes associations ont à nouveau saisi, le 9 mai 2023, le Conseil d’Etat d’une nouvelle requête afin d’enjoindre le gouvernement de mettre en place le contrôle technique prévu par le décret du 9 août 2021.

Par ordonnance du 1er juin 2023, le Conseil d’Etat a fait droit à cette demande et a enjoint le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires « de prendre l’arrêté d’application du décret du 9 août 2021 relatif à la mise en place du contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ».

Il convient de noter que, contrairement à ce que certains médias ont relayé (RMC-BMFTV), le Conseil d’Etat n’a pas assorti cette injonction d’une astreinte d’un million d’euros par jour de retard, demande portée par les associations requérantes.

Un ultimatum est donc lancé au gouvernement qui devait donc, à compter du 1er août 2023, avoir mis en place le contrôle technique en question.

Actualité du « greenwashing » – Pratiques commerciales trompeuses | Publication du « Guide pratique des allégations environnementales » par le CNC

Comme nous avions pu le mentionner brièvement dans une précédente brève, le Conseil national de la consommation (CNC) a mis à jour en mars dernier son « Guide pratique des allégations environnementales », publié pour la première fois en 2010.

Ce guide, qui n’a pas de valeur règlementaire, présente de manière pédagogique le cadre juridique applicable aux allégations environnementales trompeuses issues de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et pour une économie circulaire et de la loi du 22 août 2021 dite « Climat et résilience ».

Dans un premier temps le Guide s’attache à donner une définition claire de l’allégation environnementale et à la distinguer des informations portant uniquement sur les qualités et caractéristiques environnementales des produits. Selon le CNC, l’allégation « est donc un message sur une ou plusieurs qualités ou caractéristiques environnementales du produit (ou de son emballage), qui permet de distinguer et valoriser un produit (bien ou service) ou son emballage. ».

Le Guide rappelle ensuite les informations environnementales qui doivent obligatoirement être indiquées sur les produits ou leurs emballages par les fabricants ou importateurs. Par exemple s’agissant des produits issus du secteur automobile, soumis à des obligations d’informations environnementales toujours plus nombreuses, les fabricants et importateurs doivent veiller à classer les véhicules neufs selon de la vignette CRIT’AIR (certificat de qualité de l’air), à afficher au sein des publicités des voitures particulières une étiquette énergétique, et à respecter l’étiquette européenne normalisée pour les pneumatiques.

Outre le rappel de ces différentes obligations d’information, le Guide est surtout utile en ce qu’il émet des recommandations précises sur l’utilisation de certaines allégations environnementales. Pour ne donner qu’un seul exemple, s‘agissant de l’allégation « consomme moins » (page 48 du Guide), le CNC indique qu’elle « ne peut être apposée que si le produit réduit de manière significative la consommation (eau, énergie) par rapport à des consommations sans l’usage de ce produit ou celles d’une technologie standard largement répandue sur le marché ». Le CNC recommande également de fournir des instructions relatives à l’installation, à l’entretien et/ou à l’usage du produit permettant de réaliser les économies alléguées ainsi que de fournir des éléments permettant la comparaison avec la performance moyenne des produits équivalents.

Pour plus détails sur les recommandations du CNC, nous vous renvoyons à la consultation du Guide. 

Automobile – Fin de la vignette et de la carte verte d’assurance

A la sortie du Comité Interministériel de la Sécurité Routière (CSIR), le 17 juillet 2023, le Ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a confirmé la suppression de la carte verte d’assurance et de la vignette verte à coller sur le pare-brise, laquelle devrait avoir lieu le 1er avril 2024.

Cette mesure avait été préalablement annoncée en septembre 2022 par Bruno Le Maire, Ministre de l’Economie et des Finances, mais semblait prendre du temps dans son exécution.

Dorénavant, les forces de l’ordre pourront consulter le Fichier des Véhicules Assurés (FVA) pour confirmer que les véhicules contrôlés sont assurés.

Aussi, les automobilistes se verront remettre un « mémo » assuré qu’il conviendra de conserver dans la boîte à gant, lequel regrouperait les informations utiles relatives au contrat d’assurance.

Divers organismes relatifs au secteur automobile et à la protection des acteurs de ce secteur (MOBILIANS et la Fédération Française de Carrosserie) ont déjà fait part de leurs réserves quant à l’utilité de cette mesure. Ils mettent en garde contre le fait que cela risque de favoriser les réseaux de réparateurs agréés par les compagnies d’assurance.

Actualité du « greenwashing » – Pratiques commerciales trompeuses | Recevabilité du recours de trois ONG contre TotalEnergies

Dans une décision rendue le 16 mai 2023, le Tribunal judiciaire de Paris a jugé recevable le recours de Greenpeace France, des Amis de la Terre France et de Notre Affaire à Tous contre TotalEnergies pour pratiques commerciales trompeuses.

Le Tribunal judicaire de Paris devra désormais trancher au fond la question de savoir si les allégations environnementales de TotalEnergies dans ses publicités, dont notamment son objectif « net zéro » d’émission de carbone en 2050, sont constitutives de pratiques commerciales trompeuses.

Le jugement à intervenir sera particulièrement intéressant dans la mesure où il interviendra dans un contexte où les allégations de neutralité carbone dans la publicité sont, depuis l’entrée en vigueur le 1er janvier 2023 du décret n° 2022-539, interdites si l’entreprise n’est pas en mesure de les justifier.

Automobile : le bonus nouveau est arrivé, il intègre le score environnemental

Au Journal Officiel du 20 septembre 2023 ont été publiés le Décret sur l’éligibilité au bonus écologique ainsi que l’Arrêté relatif au calcul du score environnemental.

Ces dispositions, qui visent à encourager « l’acquisition et à la location de véhicules peu polluants », s’adressent à tous les acquéreurs et locataires de véhicules, ainsi qu’aux professionnels de l’automobile.

Elles entreront en vigueur le 15 décembre 2023 (et non le 1er janvier 2024, ainsi que le prévoyait le projet préalablement divulgué), en même temps que sera publiée la liste des modèles de véhicules éligibles.

Les véhicules électriques qui seront commandés d’ici le 15 décembre 2023 continueront à bénéficier du bonus actuel, à condition que la voiture soit livrée au plus tard 3 mois après la date de commande, soit le 15 mars 2024 au plus tard.

La philosophie de ce Décret est la prise en compte de l’empreinte carbone du véhicule au long d’une bonne partie de son cycle de vie : production, transport, circulation.

Le décret fixe les critères d’éligibilité ; l’arrêté précise la méthodologie – complexe ! – permettant de déterminer le « score environnemental » du véhicule, et le seuil d’éligibilité.

Pour établir le score environnemental de chaque véhicule sur le marché, l’Ademe va retenir 5 critères :

  • caractéristiques du modèle de véhicule (nombre de places, autonomie, masse…) ;
  • site d’assemblage du véhicule (soit le lieu où le moteur électrique et la batterie sont installés sur le châssis) ;
  • volume et poids des matériaux (métaux, aluminium, …), hors batterie ;
  • type et technologie des batteries fournissant l’énergie électrique nécessaire à la traction du véhicule (le score environnemental tiendra compte de « la batterie de plus grande capacité, en kilowatt-heure, pouvant équiper » la version) ;
  • schéma logistique, soit le mode de transport (avion, train, bateau, …) et la distance parcourue entre le lieu de production et le lieu de commercialisation du véhicule.

Le score environnemental sera composé, pour au moins 70 % de sa valeur, « de l’empreinte carbone de la version considérée, sur les étapes du cycle de vie d’un véhicule précédant son utilisation sur route », et, pour 30 % maximum de sa valeur, « d’éléments relatifs à l’incorporation de matériaux recyclés et biosourcés dans le véhicule, ainsi que la réparabilité de la batterie ».

Seuls les véhicules électriques ayant obtenu un score environnemental minimum de 60 points sur 100 seront reconnus éligibles au bonus. Les plafonds pour le bénéfice du bonus selon le poids (2,4 T) et selon le prix (47 000 € TTC) restent inchangés. En revanche, il n’a pas été indiqué quel serait le montant du bonus (actuellement, 7 000 €).

Dès ces dispositions connues, des critiques étayées ont été formulées, et des recours ont été formés pour obtenir a minima un report de leur application. Sont notamment pointés : un vide juridique entre le 15 et le 31 décembre 2023 (échéance du vote de la Loi de Finances 2024) ; des zones d’ombre sur le calcul des émissions pour les métaux ferreux, et notamment de la « valeur de référence » de la fabrication de la batterie qui considère l’Europe comme un seul bloc ; des interrogations sur le sort des commandes passées avant le 15 décembre 2023 ; ou bien encore l’absence de communication par l’Ademe des résultats de ses calculs.

En réponse partielle à ces critiques, un Décret du 7 octobre 2023 est venu apporter des précisions et correctifs sur les modalités et délais de traitement des demandes d’inscription sur la liste des versions de véhicules éligibles au bonus écologique.

Il en résulte que l’Ademe doit instruire la demande d’inscription dans un délai de 2 mois de sa réception (6 mois en cas de demande dérogatoire) et communiquer dans le même délai au Ministère de l’écologie sa proposition sur l’atteinte du score environnemental par la version considérée du véhicule. Le silence gardé par les ministres à l’issue d’un délai de 3 mois (7 mois en cas de demande dérogatoire) vaut décision de rejet.

Consommation – Publication de la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux

Entrée en vigueur le lendemain de sa publication le 10 juin 2023, la loi n°2023-451 est venue encadrer l’activité d’influence commerciale afin, notamment, d’offrir une meilleure protection aux consommateurs.

La loi donne tout d’abord une définition juridique de l’activité d’influence commerciale en son article 1er.

Ainsi, exerce une activité d’influence toute personne qui, à titre onéreux, mobilise sa notoriété pour communiquer au public, par voie électronique, des contenus visant à faire la promotion de biens, de services ou d’une cause quelconque. Toute personne entrant dans cette définition se verra donc soumise aux obligations et interdictions découlant de ce nouveau statut.

S’agissant des obligations, l’influenceur doit informer explicitement le consommateur que le contenu qu’il communique est une « Publicité » ou une « Collaboration commerciale » et ce « durant l’intégralité de la promotion ».

La violation de cette obligation est constitutive d’une pratique commerciale trompeuse et est par conséquent punie d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 300 000 euros, conformément aux dispositions de l’article L132-1 du Code de la consommation.

Lorsque le contenu communiqué au public représente un visage ou une silhouette, l’influenceur doit également indiquer, pendant l’intégralité du visionnage, s’il utilise des « images retouchées » ou « virtuelles ».

Le manquement à cette obligation est sanctionné par un an d’emprisonnement et une amende de 4 500 euros.

Enfin, l’influenceur a également l’interdiction de promouvoir les produits et/services suivants :

  • Des actes, des procédés, des techniques et des méthodes à visée esthétique ;
  • Des actes, procédés ou techniques présentés comme préférables ou comparables à des protocoles ou prescriptions thérapeutiques ;
  • Des produits considérés comme produits de nicotine pouvant être consommés et composés, même partiellement, de nicotine ;
  • Des animaux non-domestiques ;
  • Certains produits et services financiers dont notamment certains contrats financiers, la fourniture de services sur actifs numériques et les offres au public de jetons ;
  • D’abonnements à des conseils ou à des pronostics sportifs ;
  • Des jeux d’argent ou de hasards sur les plateformes en ligne qui n’offrent pas la possibilité technique d’exclure de l’audience les utilisateurs âgés de moins de 18 ans.

L’application de cette loi sera particulièrement suivie étant donné qu’un rapport d’évaluation devra être remis par le Gouvernent au Parlement dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi, soit le 10 juin 2025.

Entrée en vigueur le lendemain de sa publication le 10 juin 2023, la loi n°2023-451 est venue encadrer l’activité d’influence commerciale afin, notamment, d’offrir une meilleure protection aux consommateurs.

La loi donne tout d’abord une définition juridique de l’activité d’influence commerciale en son article 1er. Ainsi, exerce une activité d’influence toute personne qui, à titre onéreux, mobilise sa notoriété pour communiquer au public, par voie électronique, des contenus visant à faire la promotion de biens, de services ou d’une cause quelconque. Toute personne entrant dans cette définition se verra donc soumise aux obligations et interdictions découlant de ce nouveau statut.

S’agissant des obligations, l’influenceur doit informer explicitement le consommateur que le contenu qu’il communique est une « Publicité » ou une « Collaboration commerciale » et ce « durant l’intégralité de la promotion ». La violation de cette obligation est constitutive d’une pratique commerciale trompeuse et est par conséquent punie d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 300 000 euros, conformément aux dispositions de l’article L132-1 du Code de la consommation.

Lorsque le contenu communiqué au public représente un visage ou une silhouette, l’influenceur doit également indiquer, pendant l’intégralité du visionnage, s’il utilise des « images retouchées » ou « virtuelles ». Le manquement à cette obligation est sanctionné par un an d’emprisonnement et une amende de 4 500 euros.

Enfin, l’influenceur a également l’interdiction de promouvoir les produits et/services suivants :

  • Des actes, des procédés, des techniques et des méthodes à visée esthétique ;
  • Des actes, procédés ou techniques présentés comme préférables ou comparables à des protocoles ou prescriptions thérapeutiques ;
  • Des produits considérés comme produits de nicotine pouvant être consommés et composés, même partiellement, de nicotine ;
  • Des animaux non-domestiques ;
  • Certains produits et services financiers dont notamment certains contrats financiers, la fourniture de services sur actifs numériques et les offres au public de jetons ;
  • D’abonnements à des conseils ou à des pronostics sportifs ;
  • Des jeux d’argent ou de hasards sur les plateformes en ligne qui n’offrent pas la possibilité technique d’exclure de l’audience les utilisateurs âgés de moins de 18 ans.

L’application de cette loi sera particulièrement suivie étant donné qu’un rapport d’évaluation devra être remis par le Gouvernent au Parlement dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi, soit le 10 juin 2025.

Consommation : la résiliation des contrats par voie électronique dite « en 3 clics  »

Dans le prolongement du Décret du 16 mars 2023 qui concernait les contrats d’assurance, un Décret publié le 31 mai 2023 fixe les modalités d’accès et d’utilisation de la fonctionnalité de résiliation par voie électronique pour tout contrat conclu par voie électronique par un consommateur ou un non-professionnel.

Ce décret est pris en application de l’article L215-1-1 du Code de la consommation, créé par la Loi du 16 août 2022 portant mesure d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, aux termes duquel : « Lorsqu’un contrat a été conclu par voie électronique ou a été conclu par un autre moyen et que le professionnel, au jour de la résiliation par le consommateur, offre au consommateur la possibilité de conclure des contrats par voie électronique, la résiliation est rendue possible selon cette modalité ».

Il appartient ainsi au professionnel d’assurer au consommateur et au non-professionnel la possibilité de lui notifier la résiliation d’un contrat en quelques validations ou « clics », en lui garantissant un accès rapide, facile, direct et permanent à la fonctionnalité.

Le décret entre dans les détails techniques de la mise en place de cette fonctionnalité, qui doit être accessible depuis l’interface en ligne (notamment le site internet ou l’application mobile) sur laquelle la conclusion d’un contrat est proposée par le professionnel.

Cette facilité offerte au consommateur ou non-professionnel pour résilier un contrat par voie électronique ne signifie pas pour autant que ce dernier a la possibilité de résilier un contrat de façon anticipée sans frais. Le Décret précise d’ailleurs, sur ce point, que la fonctionnalité peut comporter des informations sur les conditions de la résiliation du contrat ainsi que sur ses conséquences et prévoit des conditions spécifiques pour la mise en œuvre d’une résiliation anticipée qui dépend de l’existence d’un motif légitime.

Tout manquement aux dispositions de l’article L. 215-1-1 précité, dans les conditions du décret, est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale.

Le décret est entré en vigueur dès le 1er juin 2023 pour tous les types de contrats en cours.

La DGCCRF a cependant indiqué, dans un communiqué de presse, laisser un délai de mise en conformité pour les professionnels jusqu’au 1er septembre 2023.

Garantie des vices cachés : clarification du régime de l’action

Un conflit juridique dont le retentissement dépasse les frontières du droit, a récemment été soldé par la Cour de cassation.

En effet, d’importantes décisions ont récemment été rendues, lesquelles emportent déjà des conséquences majeures pour les constructeurs et les vendeurs, en particulier dans le secteur automobile.

Mise en contexte 

Cela fait de nombreuses années que la première chambre civile et la chambre commerciale de la Cour de cassation d’une part, et la troisième chambre civile de ladite Cour d’autre part, s’opposent sur le régime d’application de la garantie des vices cachés, et en particulier sur les délais qui l’encadrent. Une divergence naissait entre ces deux camps, conduisant inévitablement à une situation d’insécurité juridique avérée.

Le 21 juillet 2023, la Chambre mixte de la Cour de cassation s’est saisie de cette problématique et a rendu quatre arrêts[1] mettant un terme à ces oppositions et uniformisant le droit. 

Concrètement, cette chambre devait répondre à deux questions principales :

  1. Quelle est la nature du délai de deux ans de l’article 1648 du Code civil ?
  2. Comment le délai d’action en garantie des vices cachés est-il encadré ?

Ces décisions étaient extrêmement attendues, à tel point que, conformément aux dispositions de la loi sur la confiance dans l’institution judiciaire[2], la Cour de cassation a enregistré et diffusé l’audience. Cet enregistrment est mis à disposition par la Cour de cassation.

Première question

Le délai de deux ans de l’article 1648 du Code civil est-il un délai de prescription ou de forclusion ?

L’article 1648 du Code civil prévoit que l’action en garantie des vices cachés doit être intentée par l’acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. 

La première chambre civile et la chambre commerciale considéraient que ce délai était un délai de prescription, alors que, la troisième chambre civile de la Cour de cassation maintenait que ce délai était un délai de forclusion. 

La Chambre mixte de la Cour a jugé que ce délai constitue un délai de prescription.

Cela implique que ce délai peut être interrompu (le délai repart de zéro) ou suspendu (le temps écoulé est conservé dans le décompte), contrairement au délai de forclusion qui, lui, ne peut faire l’objet que d’une interruption. 

Il convient de préciser que, conformément aux dispositions de l’article 2239 du Code civil, la suspension intervient notamment pendant l’exécution d’une mesure d’instruction avant dire droit, en ce compris une mesure d’expertise judiciaire.  

Les conséquences d’une telle qualification sont majeures. En pratique, il résulte de cette qualification que la possibilité pour un titulaire de ce droit d’engager une action sur le fondement de la garantie des vices cachés peut être considérablement allongé.   

Explication pratique :

Lorsque le client a pris connaissance de l’existence d’un vice caché, il dispose d’un délai de deux ans pour agir sur le fondement de la garantie des vices cachés. 

Ce délai est interrompu lorsque le client a assigné en référé-expertise pour obtenir la nomination d’un expert judiciaire. 

Ce délai recommence donc à courir depuis le début – soit pour deux ans à nouveau – à compter du moment où l’ordonnance du juge des référés est rendue.

Toutefois, ce délai est alors suspendu jusqu’à la fin des opérations d’expertise judiciaires et ne recommence à courir qu’à partir du dépôt du rapport d’expertise.

Deuxième Question

Comment le délai d’action en garantie des vices cachés est-il encadré ?

Par principe, la découverte d’un vice est un évènement aléatoire. Selon le moment où il intervient, cet événement est donc susceptible de considérablement retarder la possibilité pour un acquéreur de se prévaloir de la garantie des vices cachés.

 La question était donc de savoir si le délai de l’article 1648 du Code civil est lui-même encadré dans un autre délai – soit un délai dit « butoir » – et le cas échéant, à partir de quel moment ce délai butoir commence à courir et pour quelle durée.

La Chambre mixte de la Cour de cassation a jugé que :

Le délai de deux ans de l’article 1648 du Code civil est lui-même encadré par le délai butoir de 20 ans prévu à l’article 2232 du même Code.

Le délai butoir de 20 ans court à compter du jour de la vente conclue par la partie recherchée en garantie.

Pour retenir cette solution, la Chambre mixte a dressé un état des lieux des textes législatifs à disposition et a opéré le raisonnement suivant.

Elle rappelle la jurisprudence selon laquelle le point de départ du délai de prescription de l’article L 110-4, I du Code de commerce (5 ans), applicable pour les ventes entre commerçants ou entre commerçant et non commerçants, découle du droit commun de l’article 2224 du Code civil, applicable aux actions personnelles et mobilières, selon lequel le délai de prescription court à compter du jour « où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

La Cour a donc constaté que le point de départ glissant de la prescription extinctive des articles 2224 du Code civil et L 110-4, I du Code de commerce est en réalité le même que le point de départ de l’article 1648 du Code civil, alinéa 1er, à savoir la découverte du vice.

Dès lors, la chambre mixte déclare que ces délais ne peuvent plus être analysés en des délais-butoirs spéciaux encadrant l’action en garantie des vices cachés, puisqu’un délai-butoir – notion au demeurant non définie par le Code civil – démarre logiquement par un point fixe.

Ainsi, le régime général de l’article 2232, lequel prévoit un délai de 20 ans avec un point de départ fixe, demeurait la seule solution restante.

Par conséquent, la Cour de cassation en déduit que l’action en garantie des vices cachés doit être formée dans le délai de deux ans à compter de la découverte du vice (ou en matière d’action récursoire, à compter de l’assignation), sans pouvoir dépasser le délai-butoir de 20 ans à compter de la naissance du droit, lequel est, en matière de garantie des vices cachés, le jour de la vente conclue par la partie recherchée en garantie.

Dispositions transitoires : réforme de la prescription

De fait, il est nécessaire de considérer les ventes conclues avant la réforme de la prescription issue de la loi du 17 juin 2008 [3] laquelle avait prévu un dispositif transitoire (article 26).

Pour le cas des ventes mixtes (entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants), le délai-butoir est passé de 10 à 20 ans dans le cadre de la réforme. Dans ce cas, à la condition que le délai de prescription décennal ne soit pas expiré au 18 juin 2008 (date d’entrée en vigueur de la loi portant réforme de la prescription), le nouveau délai-butoir est appliqué, en tenant compte du délai déjà écoulé depuis la date du contrat conclu par la partie recherchée en garantie.

Pour les ventes civiles, le délai-butoir est passé de 30 à 20 ans dans le cadre de la réforme. Le délai-butoir de 20 ans est donc applicable à partir du jour de l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, sans que la durée totale n’excède la durée prévue par la loi antérieure, soit 30 ans.

Commentaires

Ces décisions sont extrêmement défavorables au vendeur et au constructeur de véhicules.

En effet, le délai pendant lequel sa responsabilité peut être engagée au titre de la garantie des vices caché passe de 5 ans (position majoritaire jusque-là, reposant sur la prescription quinquennale de droit commun de l’article 2224 du Code civil et de l’article L 110-4, I du Code de commerce) à 20 ans.

Par conséquent, sont recevables l’action directe de l’acquéreur contre le fabricant [4] ou l’action récursoire du vendeur contre le fabricant [5] à condition qu’elles soient intentées moins de 20 ans après la vente (et, bien entendu, moins de 2 ans après la découverte du vice).

La Chambre mixte de la Cour de cassation a ainsi fait le choix de suivre l’analyse de la troisième chambre civile, ce qui confère au consommateur une protection des plus étendues.

Si cette solution est logique pour la troisième chambre, laquelle se trouve en charge du contentieux relatif aux biens immobiliers, elle peut paraître inadaptée pour d’autres secteurs d’activités, et notamment le secteur automobile.

En effet, s’il est concevable que des vices cachés apparaissent après une période relativement longue pour des immeubles, d’autres biens, tels que les véhicules automobiles, sont, eux, des produits dont l’usure est plus importante et rapide. Or, il sera désormais possible de prétendre devant un Tribunal qu’un véhicule est atteint d’un vice caché, et ce après 19 ans de bons et loyaux services, sans la moindre panne.

En somme, un constructeur ou un vendeur est potentiellement responsable de chaque véhicule qu’il vendra pendant une période de 20 ans.

Nul doute que cette jurisprudence donnera à de vieilles affaires une seconde jeunesse.

Conseils

Face à une situation aussi contraignante, quelques angles de défense peuvent être suggérés.

Tout d’abord, qualifier un vice caché nécessite évidemment de prouver que le bien est atteint d’un vice et ce depuis la vente, aussi lointaine soit-elle. Cela n’est pas toujours aisé, et la plupart du temps, la production d’un rapport d’expertise, souvent judiciaire, est indispensable. L’expert doit donc démontrer l’origine du désordre susceptible d’être qualifié de vice caché.

Il peut arriver que, confronté à l’impossibilité de déterminer avec précision depuis quand un vice existe, un expert soit amené à conclure que ce vice existait probablement préalablement à la vente.

Or, il faut rappeler que, s’il doit les prendre en compte, le juge n’est pas lié par les constatations et conclusions de l’expert judiciaire (article 246 du Code de procédure civile) et il demeure libre de les interpréter. En effet, l’une des conditions pour engager la responsabilité du vendeur au titre de la garantie des vices cachés est de démontrer l’existence au moment de la vente d’un vice qui rend le bien impropre à son usage normal.

Il ne sera pas confortable de prétendre qu’un véhicule était affecté d’un vice caché dès sa vente, tout en ayant fonctionné parfaitement pendant 19 ans … L’appel au bon sens est plus que jamais indispensable.

Par ailleurs, dans l’hypothèse d’une résolution de vente sur le fondement d’un vice caché après une longue période d’utilisation du bien en question, il reste judicieux, si la restitution du prix est ordonnée, d’invoquer l’article 1352-3 du Code civil, aux termes duquel la valeur de la jouissance du bien restitué est évaluée par le juge au jour où il se prononce. Il serait logique que le prix restitué tienne compte de l’utilisation avancée du véhicule.

Enfin, il est fortement recommandé aux constructeurs et vendeurs d’assurer une conservation optimale des documents de vente du véhicule, de l’historique de l’entretien, des réclamations du client liées au véhicule, etc.

Cela permettra de faire face au mieux à une action en garantie des vices cachés engagée par exemple 19 ans après la vente …


[1] Ccass. Ch. Mixte, 21 juillet 2023, n° 21-15.809 ;

Ccass. Ch. Mixte, 21 juillet 2023, n° 21-17.789 ;

Ccass. Ch. Mixte, 21 juillet 2023, n° 21-19.936 ;

Ccass. Ch. Mixte, 21 juillet 2023, n° 20-10.763 ;

[2] LOI n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire ;

[3] Loi n° 2008-56 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile ; JO, 18 juin ;

[4] Ccass. Ch. Mixte, 21 juillet 2023, n° 21-17.789 ;

[5] Ccass. Ch. Mixte, 21 juillet 2023, n° 21-19.936 ;

Nouveau bonus automobile

Lors de la présentation du plan Industrie verte le 11 mai 2023, le Président de la République avait affirmé qu’il voulait privilégier la production automobile européenne, dans une démarche qui répond à celle annoncée de leur côté par les USA voici quelques mois.

Cette annonce a été rapidement concrétisée, puisque le gouvernement a dévoilé, lors de la présentation du projet de loi Industrie verte, le 16 mai 2023, les modalités du bonus applicable aux véhicules électriques dès le 1er janvier 2024.

Actuellement, le « bonus écologique » est attribué à tout véhicule électrique de moins de 47 000 euros dans la limite d’un poids total de 2,4 tonnes. Selon le Ministre de l’Economie, le coût annuel du bonus représente un budget de 1,2 milliard d’euros, dont 40% bénéficient à des activités d’assemblage automobile basées en Asie.

Le but est donc d’exclure du dispositif « les véhicules à faible performance environnementale » et de réserver le bonus aux véhicules électriques fabriqués en Europe. Ainsi, le futur bonus automobile ne se limitera pas au seul critère des émissions de CO2, mais prendra en compte le bilan carbone total du véhicule, selon 3 critères :

① les émissions de CO2 de l’usine d’assemblage du véhicule,

② celles du lieu de production de la batterie, sachant qu’à ce jour, tous les véhicules électriques commercialisés en France sont encore équipés d’une batterie produite en Asie ; et

③ le caractère plus ou moins recyclable des composants du véhicule et de la batterie, et des matériaux. Pour l’évaluer, l’Ademe travaille à une méthodologie et à la mise en place d’une plateforme où les constructeurs porteront les données de tous leurs modèles.

Il en résultera une note globale, un « carbone score », qui permettra au véhicule d’être éligible, ou non, au bonus écologique. Il est à noter qu’une voiture importée en Europe ne sera pas nécessairement exclue du bonus, dès lors que sur son cycle de vie, elle respecte les 3 critères évoqués ci-dessus.

Par ailleurs, l’Etat accordera des crédits d’impôts pour favoriser les investissements en cohérence avec le projet de loi sur l’industrie verte. Ceci sera financé par le malus écologique, dont les modalités seront durcies puisqu’il sera déplafonné, alors qu’il est aujourd’hui limité à 50% du prix du véhicule neuf (dans une limite de 50 000 euros). Une révision des critères concernant le malus au poids est également envisagée (il vise aujourd’hui les véhicules de plus de 1 800 kg, hors véhicules électriques et hybrides rechargeables ayant une autonomie électrique supérieure à 50 km).

Par ces mesures, la France anticipe l’entrée en vigueur du « Green Deal » en 2030, date à laquelle l’empreinte carbone d’un véhicule ne sera plus prise « du puits à la roue », mais sur tout son cycle de vie.

Le décret de mise en application sera publié d’ici la fin de cette année.

Nouvelles réglementations sur l’obligation de mise à disposition des pièces détachées

Poursuivant l’objectif de mise en œuvre des dispositions de la loi « climat résilience », plusieurs décrets ont été publiés au Journal officiel du 22 avril 2023.

Ils précisent les modalités de mise à disposition des pièces détachées des outils de bricolage et de jardinage motorisés, des articles de sport et de loisirs et des engins de déplacement personnel motorisés. [1]

Un décret n°2023-293 établit la liste des catégories de produits concernés et de leurs pièces détachées relevant de l’obligation de mise à disposition.

Ce texte impose également les échéances à partir desquelles ces pièces détachées sont disponibles pendant la commercialisation des produits, ainsi que les périodes de disponibilité minimales complémentaires (5 à 10 ans sauf dérogations dans certains cas) après la date de mise sur le marché de la dernière unité du modèle concerné.

Un deuxième décret n°2023-294 établit la liste des catégories d’outils de bricolage et de jardinage motorisés, d’articles de sport et de loisirs, de bicyclettes à assistance électrique et d’engins de déplacement personnel motorisés et des pièces concernées par l’obligation de proposer des pièces issues de l’économie circulaire dans le cadre de la commercialisation des prestations d’entretien et de réparation. Ce texte précise également les conditions auxquelles cette obligation n’est pas applicable.

Un dernier décret n°2023-295 précise les modalités d’information du consommateur sur les conditions de vente des pièces issues de l’économie circulaire dans le cadre des prestations d’entretien ou de réparation d’outils de bricolage et de jardinage motorisés, d’articles de sport et de loisirs et d’engins de déplacement personnel motorisés.

Enfin, il convient de rappeler qu’aux termes de l’article L131-1 du Code de la consommation, rétabli depuis le 1er janvier 2023, tout manquement à l’obligation de disponibilité des pièces détachées est passible d’une amende administrative pouvant aller jusqu’à 15.000 euros pour une personne physique et 75.000 euros pour une personne morale.

Note

[1] La loi dite « AGEC » du 10 février 2020 avait mis en place une obligation de mise à disposition de pièces détachées pour une première série d’équipements, notamment les petits équipements informatiques et de télécommunications, les écrans et les moniteurs et le matériel médical.

Distribution automobile : le droit de rompre un contrat à durée indéterminée est ouvert aux deux parties, mais il ne doit pas dégénérer en abus

La majorité des contentieux récents de la distribution automobile relèvent de la rupture brutale de relations commerciales établies ou du refus d’agrément.

C’est tout l’intérêt de l’arrêt que vient de rendre la Cour d’appel de Paris dans une affaire où était en jeu non pas la brutalité de la rupture, mais l’abus du droit de rompre le contrat.

Pour démontrer l’abus, les concessionnaires (distributeurs sélectifs de véhicules utilitaires) faisaient notamment valoir que la résiliation était intervenue moins de 6 ans après que le constructeur avait suscité des investissements importants, qui plus est sur un secteur où la marque était alors peu représentée.

Ils se référaient également à la qualité de leurs résultats commerciaux, et au fait que le concessionnaire leur ayant succédé n’avait formulé aucune offre de reprise, que ce soit du fonds de commerce, des stocks ou encore du personnel.

Après avoir rappelé la règle de principe selon laquelle il est toujours possible sauf abus de mettre fin à un contrat à durée indéterminée (désignés par « contrats à exécution successive dans lesquels aucun terme n’est prévu ») [1] et s’être référée aux dispositions du contrat autorisant la dénonciation moyennant un préavis de 24 mois, la Cour retient :

(1) que les concessionnaires représentaient d’autres marques que Volkswagen ;

(2) que la quasi-totalité des investissements étaient amortis ;

(3) que l’abus de rompre le contrat peut procéder des circonstances entourant la rupture, mais pas du préjudice consécutif à la rupture elle-même (puisque celle-ci est toujours possible dans une relation à durée indéterminée) ; et

(4) qu’aucune intention de nuire ou manœuvres du constructeur n’étaient démontrées.

Elle en conclut qu’il n’est pas établi de « faute faisant dégénérer en abus l’exercice du droit de rompre », et déboute les concessionnaires.

Nous ignorons si un pourvoi est ou sera formé contre cet arrêt, mais cela nous paraît peu probable compte tenu du pouvoir souverain d’appréciation, par la Cour d’appel, des éléments caractérisant l’abus.

Note

[1] Au visa de l’article 1134 alinéa 2 du Code civil, applicable aux faits de la cause

Fronde contre les normes d’émission de CO2 dites ‘Euro7’

A l’issue d’une réunion des ministres européens des Transports le 13 mars 2023, à Strasbourg, 8 Etats membres de l’UE, dont la France et l’Italie, ont publié la lettre commune qu’ils ont adressée à la Commission Européenne afin de s’opposer à tout durcissement des normes d’émission de CO2 actuellement en vigueur :

« Nous nous opposons à toute nouvelle exigence en matière d’émissions de gaz d’échappement pour les voitures et les camionnettes, car elle détournerait les investissements du secteur de la voie récemment convenue menant à des émissions de CO2 nulles pour les voitures », peut-on lire dans la lettre.

Sont ainsi visées les normes d’émission de CO2 dites ‘Euro 7’, qui visent à rassembler dans un ensemble unique de règles les normes d’émission de tous les véhicules à moteur (par conséquent les voitures, les camionnettes, les autobus et les camions) et, notamment, à modifier les conditions de tests d’émissions de gaz polluant des véhicules pour les rendre plus conformes aux conditions réelles de conduite.

Selon la Commission, la norme Euro 7 permettrait notamment de réduire de 35 % les émissions d’oxydes d’azote (NOx) des voitures particulières et utilitaires légers, et de 56 % celles des bus et camions d’ici à 2035, par rapport à la norme précédente Euro 6.

Cette coalition de circonstance met en avant les lourds investissements déjà exigés des constructeurs automobiles pour le passage au tout électrique en 2035, échéance de l’interdiction de vente des véhicules thermiques neufs.

Alors qu’il est prévu que les nouvelles normes d’émission Euro 7 prennent effet en juillet 2025 pour les voitures et en juillet 2027 pour les camions, la coalition plaide pour une prolongation d’au moins 3 ans pour les voitures et de 5 ans pour les camions.

Interdiction de revente hors réseau : deux clarifications importantes apportées par la Cour de cassation

Aux termes de l’article L. 442-2 du code de commerce, « Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de participer directement ou indirectement à la violation de l’interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence ».

La Cour de cassation a rendu le 11 janvier 2023 deux arrêts [1] qui apportent des précisions intéressantes sur la question de la revente hors-réseau.

La marque de cosmétique Shiseido, qui distribue ses produits via un réseau de distributeurs sélectifs, constate que des produits de la marque sont vendus sur des plateformes, en l’occurrence Ebay et Amazon et donc hors-réseau, soit directement soit par l’intermédiaire de tiers.

Soutenant que ces ventes portent atteinte à son réseau de distribution sélective et constituent des actes de concurrence déloyale, Shiseido assigne les plateformes en référé afin de faire cesser le trouble manifestement illicite, pour cessation de la commercialisation des produits contractuels en France et paiement d’une provision à valoir sur l’indemnisation du préjudice causé.

Dans le premier arrêt (Ebay), la Cour de cassation juge qu’il résulte de l’article L. 442-2 du code de commerce que « les ventes accomplies par de simples particuliers ne sont pas susceptibles de constituer une violation d’une interdiction de revente hors réseau de distribution sélective ».

Cette solution était prévisible puisque l’article L442-2 n’engage que la responsabilité d’une « personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services », ce qui exclut le particulier.

La Cour de cassation réaffirme ainsi une solution déjà posée en 2012 dans une autre affaire Ebay [2].

La responsabilité d’Ebay est donc susceptible d’être au-moins partiellement écartée, au titre des ventes effectuées par des particuliers.

Toutefois, les captures d’écran produites ne permettant pas de savoir si le vendeur est un professionnel ou un particulier, la Cour de cassation juge que « le trouble manifestement illicite n’était pas caractérisé avec l’évidence requise en référé ».

Dans le second arrêt du même jour (Amazon), la Cour de cassation censure la Cour d’appel, qui avait considéré que le trouble manifestement illicite n’était pas caractérisé et avait donc écarté la compétence du juge des référés, alors même qu’Amazon avait « admis avoir procédé à des ventes directes de produits protégés par le réseau de distribution avant de retirer ces offres ».

Il s’agissait ainsi, selon la Cour de cassation, d’une reconnaissance de responsabilité susceptible de justifier l’octroi d’une provision par le juge des référés.

Notes

[1] Cass com 11 janvier 2023, n° 21-21847 (Shiseido c. Ebay) et n° 21-21846 (Shiseido c. Amazon)

[2] Cass com 3 mai 2012, n° 11-10508

Pratiques commerciales trompeuses – Proposition de Directive de la Commission Européenne pour lutter contre le « greenwashing »

Dans le cadre du pacte vert pour l’Europe, la Commission européenne s’est engagée à prendre une série de mesures visant à adapter les politiques de l’UE en matière de climat, d’énergie, de transport et de fiscalité en vue de réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre d’au-moins 55% d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990.

La proposition de Directive, présentée le 23 mars dernier par la Commission européenne, fait partie du troisième ensemble de propositions sur l’économie circulaire. Elle sera relue, et éventuellement amendée, par le Parlement européen et le Conseil avant d’être adoptée dans sa version définitive.

Les dispositions de la proposition de Directive viennent fixer des critères communs aux Etats membres pour lutter contre les allégations environnementales trompeuses (autrement dit le « greenwashing »).

Selon la proposition, les entreprises qui choisissent d’accompagner leurs produits ou services d’une allégation écologique explicite (du type « T-shirt fabriqué à partir de bouteilles en plastique recyclé ») devront respecter des normes minimales sur la manière dont elles étayent ces allégations et sur la manière selon laquelle elles les communiquent.

Ainsi, pour pouvoir être communiquées aux consommateurs, les allégations écologiques des entreprises devront être vérifiées de manière indépendante et étayées par des preuves scientifiques.

En France, plusieurs dispositions sur les allégations environnementales trompeuses ont déjà été codifiées par la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et pour une économie circulaire et la loi du 22 août 2021 dite « Climat et résilience ».

Pour aider les consommateurs et les entreprises à identifier les allégations environnementales trompeuses, le CNC (Conseil national de la consommation) vient en outre d’adopter, le 20 mars 2023, un guide pratique des allégations environnementales.

La France fait ainsi figure d’Etat moteur de la mise en conformité de sa législation avec les objectifs européens.

Décarbonation des transports : lancement d’un plan d’action national en faveur du rétrofit

Le Ministère de l’Economie a publié le 26 avril 2023 un Communiqué de presse afférent au « rétrofit », c’est-à-dire la transformation de véhicules thermiques en véhicules électriques à batterie, à combustible hydrogène ou en véhicules hybrides rechargeables.

Dans la perspective de l’interdiction de la commercialisation de nouveaux véhicules particuliers et véhicules utilitaires légers thermiques en Europe dès 2035 et de l’objectif de neutralité carbone en 2050, l’enjeu est de réussir la décarbonation du secteur des transports.

Le Gouvernement identifie alors 3 chantiers prioritaires, visant les quelques 20 millions de voitures et camions circulant actuellement en France, et aspirant à créer un véritable écosystème autour du rétrofit :

Simplification de la réglementation

La clause dite « de détention préalable » (à la conversion du véhicule) a été supprimée au 1er janvier 2023.

Il en résultait que pour pouvoir bénéficier de la prime au rétrofit, le demandeur devait avoir acquis depuis au moins un an le véhicule qu’il souhaitait transformer.

Cette clause « de détention préalable » empêchait les professionnels souhaitant eux-mêmes acquérir des véhicules pour les « rétrofiter » de les revendre ou remettre en location avant un an, sauf à perdre, pour leurs clients, le bénéfice des aides. Cette restriction a donc été supprimée.

Le Gouvernement annonce également qu’il soutiendra la définition d’un cadre européen pour le rétrofit, « permettant d’harmoniser les différents cadres nationaux et de créer un véritable marché européen ».

Renforcement du soutien et des primes

Les aides à l’acquisition des véhicules électriques pour les entreprises et les particuliers ont été renforcées le 1er janvier 2023.

Le montant maximal de la prime au rétrofit a été augmenté de 1 000 €. S’agissant « des ménages très modestes et des ménages modestes considérés comme « gros rouleurs », la prime peut désormais atteindre 6 000 € pour la transformation d’une voiture particulière et 10 000 € pour la transformation d’un véhicule utilitaire léger.

Des aides à l’acquisition de véhicules lourds « rétrofités » sont par ailleurs mises en place, pouvant atteindre jusqu’à 150 000 € selon le type de véhicule.

Soutien au développement de la filière rétrofit

Une enveloppe jusqu’à 20 M€ pourra être consacrée aux investissements qui contribuent au développement de la filière rétrofit, dans le cadre des différents appels à projets de France 2030.

L’Etat accompagne aussi les démarches de conception et d’homologation des prototypes dans le cadre des investissements de recherche et de développement industriel, avec une possible prise en charge des coûts de développement et de tests pour se préparer à l’homologation.

Le Règlement d’exemption par catégorie applicable au secteur automobile est prorogé de 5 ans

Le 28 mai 2021, la Commission Européenne avait publié un rapport d’évaluation exposant les résultats de l’évaluation de l’ensemble du régime applicable au secteur automobile (le Règlement d’exemption par catégorie applicable au secteur automobile ((dit ‘RECSA’, ou ‘MVBER’ en anglais)), les lignes directrices supplémentaires, ainsi que le règlement d’exemption par catégorie applicable aux accords verticaux et les lignes directrices sur les restrictions verticales, dans la mesure où ceux-ci s’appliquent au secteur automobile).

Toutefois, l’évaluation a également montré qu’une mise à jour était nécessaire pour tenir compte de l’importance accrue de l’accès aux données générées par les véhicules.

En juillet 2022, la Commission avait lancé une consultation des parties prenantes et un appel à contributions sur le projet de règlement prorogeant le RECSA et le projet de communication modifiant les lignes directrices supplémentaires.

Enfin, en novembre 2022, elle avait publié un résumé des contributions reçues au cours de ces consultations.

A l’issue de ce processus, la Commission européenne a, le 17 avril 2023, prorogé de cinq ans le RECSA, qui sera désormais applicable jusqu’au 31 mai 2028. Cette prorogation limitée permettra à la Commission de réagir en temps utile à d’éventuelles évolutions du marché, telles que celles résultant de la numérisation des véhicules, de l’électrification et des nouveaux schémas de mobilité.

La Commission a également mis à jour les lignes directrices supplémentaires pour le secteur.

Ces lignes directrices révisées aideront les entreprises du secteur automobile à évaluer la compatibilité de leurs accords verticaux avec les règles de concurrence de l’UE, tout en garantissant que les opérateurs du marché de l’après‑vente, y compris les garages, continueront d’avoir accès aux données générées par les véhicules qui sont nécessaires à la réparation et à l’entretien.

Aux termes des lignes directrices supplémentaires actualisées :

  • les données générées par les capteurs des véhicules peuvent constituer un intrant essentiel pour la fourniture de services de réparation et d’entretien. Il en résultera que les réparateurs agréés et indépendants devraient avoir accès à ces données sur un pied d’égalité. Les principes existants relatifs à la fourniture des informations techniques, outils et formations nécessaires en vue de la prestation de services de réparation et d’entretien ont été étendus de manière à couvrir explicitement les données générées par les véhicules ;

  • les constructeurs automobiles doivent appliquer le principe de proportionnalité lorsqu’ils examinent s’il y a lieu de refuser de fournir des intrants, tels que les données générées par les véhicules, sur la base d’éventuelles préoccupations en matière de cybersécurité;

  • l’article 102 du TFUE (abus de position dominante) peut être applicable lorsqu’un fournisseur refuse unilatéralement de fournir à des opérateurs indépendants un intrant essentiel, tel que les données générées par les véhicules.


(L’essentiel de la présente brève est extrait du Communiqué de presse de la Commission du 17 avril 2023)

Véhicules connectés : la CNIL lance un « club conformité » dédié aux acteurs du véhicule connecté et de la mobilité

Le 1er mars 2023, la CNIL a annoncé le lancement d’un « Club conformité » dédié aux acteurs du véhicule connecté et de la mobilité.

Il s’agit de créer un « espace de dialogue privilégié » régulier entre la CNIL et les acteurs du secteur concerné sur des problématiques identifiées comme prioritaires, dans le but d’apporter des réponses concrètes et adaptées aux enjeux juridiques, techniques, sociétaux et économiques et « favoriser une innovation respectueuse des droits et libertés fondamentaux des personnes » .

Ces travaux s’inscrivent dans la continuité de ceux initiés par la CNIL en 2016, qui avaient abouti au pack de conformité « véhicules connectés » en 2017.

L’objectif du « club conformité » est d’aboutir à la rédaction d’un « outil de droit souple », sous forme de guide, lignes directrices ou recommandations pour l’application des principes de la réglementation aux cas concrets rencontrés par les acteurs du secteur.

Les travaux s’organisent par ateliers thématiques devant permettre aux services de la CNIL de rédiger un projet d’outil, qui sera soumis d’abord aux membres du « club conformité », puis au Collège de la CNIL, préalablement à toute publication définitive.

Cinq premiers ateliers sont ainsi programmés entre avril et octobre 2023 avec pour thèmes :

  1. Compréhension des enjeux économiques et concurrentiels des traitements de données concernés
  2. Finalités du traitement et bases légales
  3. Qualification des acteurs dans la chaîne de traitement des données
  4. Minimisation des données et anonymisation
  5. Information des personnes et exercices des droits, durée de conservation et sécurité des données de géolocalisation.

Rupture brutale de relations commerciales établies : pour apprécier la durée du préavis suffisant, le juge ne doit pas tenir compte des circonstances postérieures à la rupture

Deux arrêts récents, l’un de la Cour de cassation [1], l’autre de la Cour d’appel de Paris sur renvoi de cassation [2], viennent confirmer un principe posé voici plus de 10 ans par la Cour de cassation, mais dont on pouvait penser (et même espérer, pour ce qui nous concerne …) qu’il finirait par être remis en cause.

Dans la première de ces deux affaires, la Cour de cassation censure l’arrêt de la Cour d’appel de Paris [3] en raison de ce que celle-ci, pour évaluer le préavis suffisant, c’est-à-dire celui qui aurait dû être accordé, a pris en compte des circonstances postérieures à la rupture.

En l’occurrence, la société de transport express TNT avait rompu la relation qui la liait à un transporteur marocain, la société MATIM. Pour fixer la durée du préavis suffisant et évaluer le préjudice subi par MATIM du fait de la rupture brutale des relations, la Cour d’appel avait notamment retenu que la société MATIM avait « su se réorganiser, trouver d’autres débouchés, adapter son activité (…), retrouvé (…) 75 % de ses anciens clients, et développé une activité prometteuse avec le groupe TOTAL ».

La Cour d’appel avait ainsi pris en compte des circonstances postérieures à la rupture, ce que lui reproche la Cour de cassation en ces termes : « En statuant ainsi, la cour d’appel, qui s’est fondée sur des éléments postérieurs à la notification de la rupture pour apprécier la durée de préavis à laquelle la société MATIM pouvait prétendre, a violé le texte susvisé » (il s’agit de l’article L. 442-6 I 5° ancien du code de commerce, mais la solution serait la même sous le régime du nouvel article L. 442-1 du Code de commerce).

C’est une même logique qui a prévalu dans la seconde affaire, où la Cour de cassation avait rendu en 2022 [4] un arrêt censurant la Cour d’appel de Paris [5], qui, pour fixer le préavis suffisant, avait pris en compte la reconversion réussie par la partie victime de la rupture (un concessionnaire de matériel agricole) et le fait que cette dernière avait interrompu le préavis accordé par le constructeur (d‘une durée de 18 mois en l’occurrence) afin de pouvoir signer un contrat de concession exclusif avec un concurrent du constructeur.

Quand bien même il parait incohérent de se prévaloir d’un préavis insuffisant alors qu’on y a soi-même mis fin pour redéployer son activité (ce qui est l’objet même d’un préavis), la Cour de cassation avait cassé l’arrêt de la Cour d’appel pour s’être fondée « sur une circonstance postérieure à la rupture ».

Sur renvoi de cassation, et par un arrêt du même 17 mai 2023, la Cour d’appel de Paris autrement formée se range à la règle posée par la Cour de cassation, et juge la rupture brutale. La même chambre 4 du pôle 5 de la Cour rend ainsi en 2023 un arrêt dont la teneur est l’inverse de celle de l’arrêt rendu 3 ans plus tôt.

Dans une logique qui semble être celle d’une sanction « mécanique » de l’auteur de la rupture, indépendante de toute reconversion en cours de préavis, la haute juridiction met ainsi fin aux tentatives – méritoires, selon nous – de la Cour d’appel de Paris pour revenir à une appréciation de bon sens du préavis suffisant, à l’aune de son objet même qui est de permettre à la partie évincée de se reconvertir ou de trouver un nouveau partenaire.

Reste à savoir si la Cour d’appel de Paris va poursuivre sa démarche jusqu’à obtenir, qui sait, un revirement de cette jurisprudence quelque peu dogmatique.

En attendant, confrontés à la joute que semblent se livrer sur cette question les deux juridictions spécialisées, le justiciable et l’avocat sont un peu perdus …

Notes

[1] Cass com 17 mai 2023, n°21-24809, TNT FAA c. MATIM

[2] CA Paris, 5/4, 17 mai 2023, n° 22/13861, CLAAS France c. Ets H. Baudet & Fils

[3] CA Paris chbre internationale, 6 juillet 2021

[4] Cass com 1er juin 2022, n°20-18960

[5] CA Paris, 5/4, 17 juin 2020, n° 17/19307

Les enjeux du véhicule connecté pour l’industrie automobile

Avec l’émergence du véhicule connecté, l’industrie automobile est confrontée à de nouveaux enjeux : collecter la masse de données générées par le véhicule connecté, les exploiter et les contrôler, les valoriser.

L’émergence du véhicule connecté fait ainsi naître de nouvelles problématiques juridiques, économiques et stratégiques pour les constructeurs automobiles autour de l’accès, du transfert et du partage des données générées par le véhicule connecté, qui sont une véritable source de valeur.

La proposition de Règlement portant sur le « Data Act » (ci-après le « Data Act ») en cours d’adoption par le Parlement européen, qui établit des règles harmonisées en matière d’accès et d’utilisation équitable des données en vue de créer un marché unique des données, devrait permettre de répondre à certaines de ces problématiques.

Ce Règlement va toutefois en générer de nouvelles pour les acteurs du secteur automobile, qui vont être confrontés à de nouveaux risques.

La libre circulation des données industrielles voulue par le Data Act

1.1 Le projet de Data Act, appelé par certains « le RGPD des données industrielles », vise à supprimer les obstacles à la circulation des données industrielles pour stimuler le développement d’un marché de données concurrentiel, favoriser l’innovation fondée sur les données et rendre les données plus accessibles à tous.

Afin d’atteindre son objectif, le Data Act a pour ambition de règlementer au niveau européen la manière dont les données peuvent être transférées et partagées, essentiellement entre entreprises.

L’axe principal choisi est d’accorder aux clients utilisateurs de nouveaux droits :

  • Un droit d’accès aux données générées par l’utilisation de l’objet connecté ;
  • Un droit de portabilité renforcé en exigeant une portabilité des données générées par l’utilisation de l’objet connecté vers un tiers destinataire ;
  • Une liberté de recourir à des tiers pour la maintenance du produit acheté ou loué en partageant ses données.

1.2 Le principe de la libre circulation des données industrielles s’accompagne bien entendu de règles destinées à protéger les données et leur divulgation et, par ce biais, la compétitivité des entreprises générant ces données par leur produit.

On peut relever à ce titre le principe posé par le projet de Règlement selon lequel la divulgation des données doit se faire dans des conditions équitables, raisonnables, transparentes et non-discriminatoires.

Le projet de Règlement impose également au détenteur de données la mise en place de mesures techniques appropriées de protection des données et prévoit plusieurs interdictions et obligations incombant aux tiers destinataires des données afin de protéger les données et les droits des utilisateurs.

Il rappelle en outre la nécessaire protection du secret de fabrique et bien sûr du secret des affaires, qui fait l’objet de règles spécifiques. Il sera ainsi possible de mettre en place des mesures contractuelles afin que la communication des données ne se fasse pas au détriment du secret des affaires, ce qui va toutefois nécessiter un travail d’analyse et de négociation potentiellement coûteux en temps et en ressources pour les détenteurs des données.

Pour une plus amble présentation du Data Act, nous vous renvoyons à l’article « Le projet de Data Act : innovations et questions posées par le « RGPD des données industrielles« .

La perspective de ces nouvelles règles fait craindre pour les acteurs du secteur automobile l’émergence de nouvelles problématiques en lien avec les données générées par le véhicule connecté.

Les nouvelles problématiques sous-jacentes pour l’industrie automobile

2.1 La modification des modèles économiques entre partenaires

L’instauration d’un accès global et pour tous aux données générées par l’objet connecté, et plus précisément en l’occurrence par le véhicule connecté, va nécessairement constituer un obstacle aux partenariats de type exclusif, dans lesquels un constructeur et un fournisseur de services complémentaires entrent dans une coopération spécifique pour développer un service innovant.

Le risque est que les constructeurs automobiles ne soient plus incités à investir, alors même que les données générées par les véhicules dépendent exclusivement des investissements des constructeurs.

Cet accès global et pour tous risque également d’avoir pour effet de déséquilibrer la chaîne de valeur au profit d’acteurs n’effectuant aucun investissement pour générer les données. En effet, le principe instauré par le projet de Règlement européen est un accès aux données pour tous sans discrimination, ce qui va induire un niveau de prix accessible aussi aux acteurs du secteur valorisant le moins les données, au détriment des constructeurs.

2.2 Le risque industriel et la sauvegarde de la compétitivité

Comment répondre à l’obligation de mise à disposition des données utiles et exploitables générées par les véhicules connectés sans pour autant fragiliser sa compétitivité ?

Ceci va certainement constituer la problématique majeure à laquelle vont être confrontés les constructeurs automobiles français et européens, dès lors qu’ils vont être soumis à une obligation de divulgation de leur patrimoine informationnel, de leur propriété intellectuelle et/ou de leur savoir-faire, au reste du monde, sans qu’une obligation réciproque existe hors Union Européenne.

  • D’un côté, les constructeurs vont être contraints de faire des investissements pour permettre l’accès aux données générées par leurs véhicules et faciliter leur partage.

Des investissements financiers et humains vont en effet être nécessaires pour que les constructeurs soient en mesure de donner accès directement ou d’extraire les données et vérifier la qualité des utilisateurs qui réclament l’accès.

Ce qui n’est pas sans soulever des questions très concrètes : s’agira-t-il de vérifier la carte d’identité de la personne qui demande l’accès aux données ? Le certificat d’immatriculation du véhicule ayant généré les données ? Quid si l’utilisateur n’est pas l’acheteur ?

Des investissements importants seront également nécessaires pour mettre les données à disposition de tiers, puisque le Règlement prévoit l’obligation de conclure des accords équitables, raisonnables et non-discriminatoires qu’il va falloir négocier, sans qu’il soit certain de pouvoir solliciter une compensation. En tout état de cause, la mise à disposition de données ne pourra pas être facturée, que ce soit de façon directe ou indirecte, lorsque le destinataire des données sera un consommateur.

  • D’un autre côté, les constructeurs vont perdre le contrôle sur la divulgation de leurs données.

Le principal risque identifié est le phénomène d’ingénierie inversée (rétro-engineering), qui consiste à copier un produit sans avoir obtenu les plans, ni les méthodes de fabrication.

Ce risque est forcément accentué par la libre mise à disposition des données stratégiques générées par le véhicule connecté qui résultera de l’entrée en vigueur du Data Act, données auxquelles, jusqu’ici, le public comme les concurrents ne peuvent pas accéder.

Tout l’enjeu va donc être de trouver un équilibre entre le respect des investissements des opérateurs économiques établis et l’innovation des concurrents émergents.

2.3 Le risque en matière de sécurité pour les particuliers

A partir du moment où les données vont circuler, les risques de piratage vont se multiplier :

  • Risque d’intrusion électronique dans le système du véhicule notamment via les connexions Bluetooth, wifi ou les unités télématiques ;
  • Risque de prise de contrôle à distance du véhicule connecté, que ce soit au niveau du système de freinage, de la direction, de l’accélération, des ceintures de sécurité, des airbags ou encore de la jauge à essence ;
  • Risque de récupération illégale des données de l’utilisateur du véhicule, et dans un second temps, d’usurpation d’identité pour réclamer l’accès aux données générées par l’utilisation du véhicule.
    Les constructeurs automobiles vont donc devoir faire face à de nouveaux enjeux tant en termes de sécurité des véhicules et des passagers, qu’en termes de protection de la vie privée de leurs clients.

A ce stade, les négociations du projet de Règlement entre le Parlement européen, la Commission et le Conseil (les « trilogues ») sont encore en cours, pour aboutir à une version finale au cours de l’année 2023.

Il n’est en outre pas exclu qu’un règlement spécifique pour les acteurs de la mobilité soit adopté, ce qui aiderait peut-être à régler certaines problématiques spécifique au secteur automobile.

En parallèle, la CNIL a lancé le 1er mars dernier un « Club conformité » dédié aux acteurs du véhicule connecté et de la mobilité avec pour objectif d’aboutir à de pouvoir mettre à dispositions des acteurs du secteur des outils pratiques et opérationnels favorisant une utilisation responsable des données.

Sécurité générale des produits : le Conseil de l’UE adopte définitivement le règlement

La directive de 2001/95 relative à la sécurité générale des produits a permis que tous les produits de consommation mis sur le marché ou mis à disposition sur le marché de l’UE soient soumis à des exigences générales de sécurité.

Toutefois, l’augmentation du nombre de biens et de produits vendus en ligne a rendu une actualisation nécessaire afin que les règles restent adaptées aux évolutions numériques et technologiques actuelles.

Le Conseil de l’UE a adopté le 25 avril 2023 le règlement sur la sécurité générale des produits, qui renforce les règles de sécurité applicables aux produits vendus à la fois hors ligne et en ligne. Le règlement renforcera la surveillance du marché en ce qui concerne les produits dangereux ainsi que les droits des consommateurs dont bénéficie toute personne à qui l’on a vendu un produit dangereux.

Le règlement relatif à la sécurité générale des produits adopté le 25 avril 2023 renforce la sécurité des produits et la protection des consommateurs, et facilite la réparation, le retour ou le remplacement des produits dangereux. En particulier:

  • les places de marché en ligne devront coopérer avec les autorités de surveillance du marché si elles détectent un produit dangereux sur leurs plateformes, et seront tenues d’établir un point de contact unique chargé de la sécurité des produits;
  • les autorités de surveillance du marché pourront ordonner aux places de marché en ligne de retirer des produits dangereux de leurs plateformes ou de rendre impossible l’accès à de tels produits;
  • un régime unique de surveillance du marché sera applicable à tous les produits;
  • si un produit se révèle dangereux, les opérateurs économiques doivent immédiatement adopter des mesures correctives et en informer les autorités de surveillance du marché et les consommateurs;
  • si un produit doit faire l’objet d’un rappel, les consommateurs auront droit à une réparation, à un remplacement ou à un remboursement (et peuvent choisir entre au moins deux de ces options);
  • les opérateurs économiques devraient disposer d’une personne responsable des produits vendus en ligne et hors ligne (quelle que soit la provenance du produit), qui veillera à la disponibilité de la documentation technique, des instructions et des informations de sécurité.

Ce règlement sur la sécurité générale des produits transforme la directive sur la sécurité générale des produits (qui devait être transposée dans les règles nationales) en un règlement (qui empêche les États membres d’adopter des mesures de transposition divergentes).

Il modernise les règles applicables à tous les opérateurs économiques (fabricants, importateurs et distributeurs) ainsi qu’aux entreprises en ligne et aux places de marché en ligne.

À la suite de l’approbation du 25 avril par le Conseil de l’UE, l’acte législatif a été adopté.

Après signature par les présidents du Parlement européen et du Conseil, le règlement sera publié au Journal officiel de l’Union européenne et entrera en vigueur le vingtième jour suivant sa publication.

À la suite de l’adoption formelle du règlement et de son entrée en vigueur, les États membres disposeront de 18 mois pour appliquer les nouvelles règles relatives à la sécurité générale des produits.

Véhicule autonome : 4 actions annoncées par le gouvernement pour soutenir le déploiement des services de mobilité routière automatisée et connectée

Sur la base de propositions remises en septembre 2022 par Anne-Marie Idrac (Haute responsable pour la stratégie nationale de développement des véhicules autonomes), le gouvernement a annoncé le 10 février 2023 les quatre actions prioritaires pour soutenir le déploiement des services de mobilité routière automatisée et connectée dans les territoires.

Comme cela est précisé au sein de la « stratégie nationale » (accessible en ligne sur le site www.ecologie.gouv.fr), les actions proposées portent sur une période relativement courte (2023-2025), afin de pouvoir agir rapidement et réévaluer les besoins en fonction de l’évolution du contexte.

Ainsi, les quatre actions prioritaires du gouvernement pour la période 2023-2025 dans le secteur de la mobilité routière automatisée et connectée sont :

  1. Prioriser et coordonner les déploiements en matière de systèmes de connectivité et d’échanges de données ;
  2. Financer les projets d’investissements dans l’offre de véhicules et de services et accompagner les premiers déploiements commerciaux ;
  3. Accompagner les collectivités locales qui le souhaitent et les opérateurs pour le déploiement de services aux voyageurs ;
  4. Finaliser le cadre juridique relatif au fret et à la logistique automatisés.

Action collective conjointe contre le groupe Renault

Des propriétaires de véhicules de marques Renault, Nissan, Dacia et Mercedes ont lancé un recours collectif contre le groupe Renault, invoquant des défaillances de fiabilité du moteur 1.2 T.

La première phase de la procédure, qui correspondait à un référé probatoire, a été gagnée par les plaignants puisque par Ordonnance en date du 14 mars 2023, le juge des référés du Tribunal judiciaire de Versailles a ordonné la communication des pièces sollicitées par les demandeurs.

Les deux constructeurs se retrouvent ainsi contraints de divulguer de nombreux documents jusqu’ici classés confidentiels, tels que les bulletins techniques, les analyses moteur, les revues de direction, les audits internes…

Des occultations ont tout de même été effectuées sur certaines pièces aux fins de protection du secret des affaires.

L’action collective devrait désormais passer à une deuxième phase indemnitaire, qui pourrait  entrainer la mise en cause du groupe Renault au pénal.

Enquête DGCCRF : 2/3 des concessionnaires automobiles contrôlés par la DGCCRF sont en anomalie avec la règlementation sur l’information des consommateurs

Le 13 février 2023, la DGCCRF a publié un communiqué sur l’enquête nationale réalisée entre 2021 et 2022 auprès de 2 200 concessionnaires automobiles et 2 & 3 roues motorisées neufs et d’occasion.

Il ressort de cette enquête que deux tiers des établissements contrôlés présentaient des anomalies portant sur la bonne information du consommateur ou la loyauté des pratiques commerciales dans le secteur.  

Les principaux manquements relevés par la DGCCRF dans le secteur sont :

  • La facturation de frais facultatifs (gravage du numéro de série et assurance associée, fourniture du tapis de sol, d’ampoules de rechange ou plein de carburant) au consommateur sans information préalable ou en indiquant que ces frais facultatifs sont obligatoires ;
  • La présentation trompeuse de certaines caractéristiques des véhicules : véhicules présentés comme neufs alors qu’ils ne le sont pas, omission d’informations essentielles sur l’étiquetage, minoration du compteur kilométrique ;
  • L’absence d’information des consommateurs sur leurs obligations relatives au financement de leurs véhicules neufs à l’aide d’un crédit.

Au total, c’est plus de 1 600 avertissements, 1 500 injonctions, 320 procès-verbaux pénaux et 170 procès-verbaux d’amendes administratives qui ont été adressés par les services de la DGCCRF aux concessionnaires sur la période.

Emissions CO2 : proposition de révision des normes d’émission CO2 pour les poids lourds

La Commission européenne a publié le 14 février 2023 sa proposition de révision du Règlement (UE) 2019/1242 du 20 juin 2019 établissant les normes de performance en matière d’émissions de CO2 pour les véhicules utilitaires lourds neufs.

S’agissant des bus urbains neufs mis sur le marché dans l’UE, l’objectif de la Commission est d’atteindre 100% de véhicules à zéro émission de CO2.

S’agissant des autocars et des camions, des objectifs échelonnés sont proposés : 45 % de réduction des émissions à partir de 2030 (par rapport aux niveaux de 2019), 65 % de réduction en 2035, puis 90 % de réduction des émissions à partir de 2040.

Pour le Vice-Président de la Commission Frans Timmermans, la mise en place de ces objectifs ambitieux aidera les constructeurs européens à conserver leur place de leader sur le marché de la production de camions et d’autobus.

Vers la création d’un permis de conduire numérique ?

Le 1er mars 2023, la Commission européenne a présenté ses propositions pour moderniser le cadre législatif et règlementaire du permis de conduire.

Celles-ci prévoient notamment la création d’un permis de conduire numérique valable dans toute l’Union Européenne.

Cela traduit premièrement la volonté d’une simplification de la reconnaissance des permis de conduire entre Etats membres de l’UE.

Ainsi, les démarches administratives relatives au permis (remplacement, renouvellement ou échange) seraient facilitées, et ce par le biais de procédures en ligne.

De plus, le souhait est émis d’actualiser les règles d’examen du permis de conduire pour mieux les adapter à l’arrivée massive des véhicules électriques et des systèmes électroniques d’assistance à la conduite.

Un autre objectif est celui d’améliorer la sécurité routière, par le biais de différentes mesures (période probatoire d’au moins deux ans, sensibilisation à la présence d’usagers vulnérables sur la route, évaluation plus ciblée de l’aptitude médicale…).

La lutte contre les infractions transfrontalières est également un des moteurs de ces propositions.

La Commission précise en effet qu’« en 2019, environ 40 % des infractions transfrontières ont été commises en toute impunité, soit parce que l’auteur de l’infraction n’avait pas été identifié, soit parce que le paiement n’avait pas été exécuté. »

Pour remédier à ce problème, la Commission propose de permettre aux autorités répressives d’avoir accès aux registres nationaux des permis de conduire.

L’amélioration de la coopération entre Etats membres permettra ainsi de remédier aux lacunes actuelles lors des enquêtes sur les infractions.

Le résultat espéré est de permettre une meilleure sanction des contrevenants originaux d’autres Etats membres et d’assurer ainsi une égalité de traitement entre les contrevenants résidents et non-résidents. 

A présent, ces propositions doivent être examinées par le Parlement européen et le Conseil.

Arrêt de la vente des véhicules thermiques en 2035 : l’Allemagne met des bâtons dans les roues (des véhicules électriques)

Alors que le texte avait fait l’objet en octobre 2022 d’un accord entre les Etats membres et les négociateurs du Parlement européen, puis qu’il avait été formellement approuvé mi-février par les eurodéputés réunis en plénière, l’Allemagne a, contre toute attente, annoncé qu’elle s’abstiendrait finalement de voter l’interdiction de la vente de véhicules thermiques neufs à compter de 2035.

La Bulgarie a également annoncé qu’elle s’abstiendrait.

L’Union Européenne a en conséquence prononcé, le 7 mars 2023, le report sine die du vote de cette mesure essentielle du Plan Climat.

L’Allemagne justifie sa position par la volonté de préserver l’usage de carburants de synthèse « alternatifs », dont elle dit qu’il s’agissait pour elle d’une condition à l’accord initial de fin 2022.

Elle a, depuis son annonce surprise, été rejointe par l’Italie et la Pologne (opposantes de longue date au texte), ainsi que par la République tchèque.

A l’initiative de cette dernière, les 4 pays frondeurs se sont réunis le 13 mars 2023 avec la Commission européenne.

Il semble qu’ils aient été entendus, puisqu’on a appris le 21 mars que la Commission européenne aurait proposé un projet de complément au texte, revenant à autoriser la vente de véhicules thermiques après 2035, à condition qu’ils roulent uniquement avec des carburants de synthèse, neutres en carbone.

La procédure envisagée par Bruxelles (projet de Règlement délégué) permettrait de se dispenser d’un vote au Parlement.

Il est à noter que le 22 mars, 47 entreprises, dont Ford et Volvo, ont adressé une lettre à la Commission européenne et à la présidence du Conseil européen.

Elles y réaffirment leur soutien à la fin de la vente des voitures thermiques dans l’Union européenne en 2035.

Elles y rappellent qu’elles se sont engagées à passer au tout électrique, avec des investissements considérables, au nom d’une dé-carbonation totale, excluant les carburants de synthèse.

« Nous vous écrivons pour exprimer notre inquiétude quant au fait que les États membres reconsidèrent leur soutien à la date d’élimination progressive de 2035 pour les voitures et les petites camionnettes à essence et diesel. Les entreprises de l’UE ont besoin de clarté et d’une grande ambition dans la législation pour soutenir leurs projets à plus long terme de passer aux véhicules électriques« , est-il indiqué en introduction.

On attend donc, très prochainement, les suites et l’issue finale de ce processus, dont on peut penser qu’il s’agira d’un compromis passant par le principe maintenu de l’interdiction de la vente de véhicules thermiques neufs en 2035, accompagné toutefois d’une forme de dérogation pour les véhicules thermiques utilisant un carburant de synthèse.

[Droit de la consommation] – Le logo TRIMAN remis en cause par la Commission européenne

En application de la Loi AGEC et du Décret du 29 juin 2021, tous les emballages ménagers, les imprimés et les papiers graphiques mis sur le marché en France doivent, depuis le 9 mars 2023, être porteurs d’une part, d’une signalétique informant le consommateur que ce produit fait l’objet d’une règle de tri (le logo Triman), et d’autre part, d’une information précisant les modalités de tri (l’Info-tri ou Info-réemploi).

Il s’agit d’une réglementation franco-française, qui n’est pas sans poser quelques difficultés lorsque les produits sont fabriqués de façon standardisée et centralisée pour plusieurs marchés.

Le 15 février 2023, la Commission européenne a cependant ouvert une procédure d’infraction juridique contre la France, considérant que ces exigences nationales en matière de marquage peuvent :

  • porter atteinte au principe de la libre circulation des marchandises ;  
  • avoir des effets contre-productifs sur l’environnement ;  
  • entraîner une augmentation des besoins en matériaux pour un marquage supplémentaire, et une plus grande production de déchets (en raison de la taille des emballages qui peut être plus importante que celle nécessaire).

Dans le cadre de cette procédure précontentieuse, la France a ainsi été mise en demeure de répondre aux griefs qui lui sont adressés, dans un délai de 2 mois, soit d’ici le 15 avril 2023.

Il appartient désormais au gouvernement français d’apporter des informations justifiant la mise en place de cette réglementation au niveau local ou de proposer de nouvelles dispositions.

A défaut de réponse, ou si les observations sont jugées non-convaincantes par la Commission européennes, celle-ci peut émettre un avis motivé notifiant son manquement à la France en lui accordant un délai de mise en conformité.

Dans l’attente, la procédure européenne n’ayant pas d’effet suspensif, les metteurs de produits sur le marché doivent continuer à se conformer aux obligations françaises de marquage.

Véhicules hors d’usage : Mobilians forme recours en Conseil d’Etat contre le Décret

Le 8 février 2023, l’organisation professionnelle des services de l’automobile Mobilians a déposé une requête au Conseil d’Etat contre le Décret relatif à la gestion des véhicules hors d’usage (VHU) paru le 1er décembre 2022, précédemment décrypté.

Mobilians explique dans son Communiqué de presse, publié le même jour, que si 1,3 millions de véhicules en fin de vie sont pris en charge chaque année par la filière de Centres VHU, et plus de 12 millions de pièces de réemploi sont produites, 400 000 de ces véhicules ne font l’objet d’aucune valorisation de pièces de réemploi, étant directement redirigés vers le broyeur après avoir été dépollués.

Mobilians reproche dès lors au texte de ne pas instaurer une obligation de production de pièces de réemploi par les Centres VHU en dépit du vote majoritaire en ce sens par les acteurs du secteur dans le cadre du processus de consultation relatif au projet de décret.

Mobilians reproche par ailleurs au texte d’avoir retenu le terme de « désassemblage » dans la définition du Centre VHU, qui, selon l’organisation professionnelle, est une notion trop floue pouvant le cas échéant intégrer l’activité des récupérateurs de métaux et centres qui détruisent les véhicules sans valorisation de pièces, ce qui irait à l’encontre de l’esprit de la loi.

Mobilians considère ainsi que, dans un contexte de pénurie de pièces de réemploi, le Décret tel que publié « ne permet pas de répondre à l’enjeu majeur de développement du réemploi, et ne respecte pas la hiérarchie des modes de traitement des déchets qui consiste en priorité à favoriser la réparation et le réemploi aux autres méthodes de valorisation »

Mobilians a en conséquence pris la décision de déposer un recours contre ce texte devant le Conseil d’Etat, en espérant ainsi qu’il soit modifié.

Véhicules hybrides et électriques – Auto-saisine de l’Autorité de la concurrence aux fins d’analyse du fonctionnement concurrentiel du secteur des infrastructures de recharge

Avec la hausse constante de l’immatriculation des véhicules électriques et hybrides rechargeables ces dernières années en France, et l’objectif européen d’atteinte de la neutralité carbone en 2050, le secteur des infrastructures de recharge a le vent en poupe.

Face à ce constat, l’Autorité de la concurrence a décidé de s’autosaisir pour avis sur le fonctionnement concurrentiel du secteur, qui fait intervenir de nombreux acteurs de la chaîne de valeur : fabricants, installateurs, mainteneurs, acteurs de la supervision et bien entendu utilisateurs.

Dans son communiqué paru le 17 février 2023, l’Autorité précise que cet avis sera « l’occasion d’identifier les délimitations possibles des marchés relatifs au secteur et d’examiner la dynamique concurrentielle qui s’exerce sur les différents segments de la chaine de valeur ainsi que la position des acteurs présents et leurs relations contractuelles ».

Une attention particulière sera portée aux infrastructures de recharge pour véhicules électriques (dites « IRVE ») privées, dans les habitations collectives, et aux IRVE publiques, sur les autoroutes.

S’agissant de ces dernières, une enveloppe de 100 millions d’euros avait été octroyée par le Gouvernement dans le cadre du plan France Relance pour équiper l’ensemble des aires de service du réseau autoroutier d’ici le 1er janvier 2023 en bornes de recharge rapides. 

La publication de cet avis devrait avoir lieu dans le courant du premier semestre 2024 et permettra à l’Autorité de formuler ses premières recommandations sur le secteur. 

Garantie des vices cachés : la guerre continue

Une guerre juridique fait des ravages entre d’un côté la première chambre civile et la chambre commerciale de la Cour de cassation, et de l’autre, la troisième chambre de la Cour de cassation sur un sujet bien précis : la garantie des vices cachés.

Par un arrêt du 8 février 2023 [1], publié au Bulletin, la 3e chambre de la Cour de cassation a une fois de plus réitéré sa position. 

Selon les faits, une entreprise de travaux s’était chargée du lot « électricité-ventilation » lors de la construction d’une maison d’habitation.

Cette entreprise avait installé un système de ventilation qu’elle avait préalablement acquis auprès d’une société spécialisée, elle-même s’étant procuré le matériel auprès d’une société fabricante.

Après la réception de la maison, un incendie survient dans les combles.

Les propriétaires assignent alors les assureurs et les sociétés venderesses en responsabilité sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Dans un attendu désormais classique, la 3e chambre de la Cour de cassation considère que « le constructeur dont la responsabilité est ainsi retenue en raison des vices affectant les matériaux qu’il a mis en œuvre pour la réalisation de l’ouvrage, doit pouvoir exercer une action récursoire contre son vendeur sur le fondement de la garantie des vices cachés sans voir son action enfermée dans un délai de prescription courant à compter de la vente initiale ».

Elle juge ainsi que « le point de départ qui lui (le constructeur) est imparti par l’article 1648, alinéa 1er, du code civil est constitué par la date de sa propre assignation et que le délai de l’article L. 110-4, I, du code de commerce, courant à compter de la vente, est suspendu jusqu’à ce que sa responsabilité ait été recherchée par le maître de l’ouvrage ».

En d’autres termes, la 3e chambre de la Cour de cassation confirme que, pour elle, le vendeur intermédiaire est en mesure de rechercher la responsabilité de son propre vendeur pendant un délai de deux ans à compter de son assignation, indépendamment de la date de la vente initiale. A noter que la 3e chambre civile avait réaffirmé sa position par un arrêt du 16 février 2022 [2].

Cette position est directement opposée à celle de la 1ère chambre civile et de la chambre commerciale de la Cour de cassation.

En effet, celles-ci considèrent que ces délais (2 ans de l’article 1648 du code civil et 5 ans de l’article L 110-4, I du Code de commerce) sont enfermés, à l’égard du vendeur initial, dans le cadre de la vente initiale.

Il nous a été indiqué que la Chambre mixte de la Cour de cassation doit se réunir le 16 juin 2023 à ce sujet.

Il faut espérer qu’à cette occasion il soit mis un terme à cette situation juridique extrêmement préjudiciable.

Notes

[1] Cass. 3e Civ., 8 février 2023, n° 21-20.271, Publié au Bulletin

[2] Cass. 3e Civ., 16 février 2023, n° 20-19.047, Publié au Bulletin 

[Concurrence] – « Private enforcement » : l’affaire du ‘cartel des camions’ n’a pas encore épuisé ses effets

La CJUE a rendu le 16 février 2023 un arrêt qui constitue une énième suite judiciaire de l’affaire tentaculaire dite du ‘cartel des camions [1].

A l’occasion d’une action engagée – contre le seul constructeur Daimler – par un transporteur espagnol ayant acheté des camions de marques relevant du cartel incriminé, la CJUE apporte quelques confirmations mais aussi quelques éclairages nouveaux sur la portée du droit à réparation intégrale et le recours à l’estimation judiciaire du préjudice.

Au plan des principes, la CJUE rappelle à l’occasion de cette affaire que l’action indemnitaire engagée par une personne relevant de la sphère privée (private enforcement) assure la bonne application des règles de concurrence et protège le bon fonctionnement des marchés, ce au même titre que l’action de public enforcement.

S’agissant ensuite des apports de cette décision, ceux-ci relèvent de l’application de la Directive du 26 novembre 2014 dite ‘Directive Dommages’.

Ainsi, la Cour rappelle que le droit à réparation intégrale du préjudice se caractérise par l’indemnisation du dommage effectif et du manque à gagner, ainsi que par le paiement des intérêts.

En revanche, l’octroi des dépens n’en fait pas partie.

Ensuite, s’il est rappelé la règle de principe selon laquelle il appartient au requérant d’établir et de chiffrer son préjudice, la Cour, répondant à des questions préjudicielles posées par le Tribunal de commerce de Valencia, détaille les conditions dans lesquelles, conformément à l’article 17 de la Directive Dommages, il est possible de demander à la juridiction nationale de chiffrer le préjudice lorsqu’il est pratiquement impossible ou excessivement difficile au requérant de le faire.

Note

[1] CJUE 15 fév. 2023, C-312/21, Traficos Manuel Ferrer

Le dépôt de plusieurs propositions de loi annonce-t-il un bouleversement de la relation entre les constructeurs automobiles et leurs distributeurs ?

L’instauration d’un statut spécifique du distributeur automobile est un serpent de mer, qui, depuis des années, revient régulièrement au-devant de la scène, sans toutefois s’être jamais concrétisée jusqu’à présent.

Il est cependant possible que l’on soit désormais à l’orée d’une étape importante sur ce sujet.

4 propositions de loi ont en effet été déposées récemment à l’Assemblée Nationale, propositions qui, au-delà de la mise en place d’un statut spécifique du concessionnaire automobile, visent plus généralement à encadrer les relations entre les constructeurs automobiles et leurs distributeurs, et à les modifier en profondeur sur certains aspects.

La 1ère proposition a été déposée le 29 novembre 2002 par un député Les Républicains ; la 2nde a été déposée le 17 janvier 2023 par un député ‘Horizons’ ; enfin, le 14 février 2023, deux nouvelles propositions de loi ont été déposées, l’une par un autre député Les Républicains, l’autre par une députée ‘Renaissance’.

C’est cette dernière, visant à la « réforme des relations contractuelles entre les constructeurs et les distributeurs automobiles », qui retient le plus l’attention, puisque, émanant du parti ‘Renaissance’, elle parait la plus à même d’emporter le soutien du Gouvernement.

Ces propositions proposent la formulation de 3 articles qui, au sein du Livre III du Code de commerce, viendraient constituer un nouveau Titre V afférent spécifiquement à la distribution automobile.

Leur adoption ouvrirait la voie à 3 évolutions majeures de la relation entre le constructeur automobile et son distributeur :

1/ Le contrat de distribution devrait prévoir le droit pour le distributeur ou le réparateur agréé « de céder la totalité de ses droits et obligations à toute personne de son choix formulant une offre de bonne foi, répondant à des critères objectifs et raisonnables requis par le fournisseur ».

Certes, la proposition de loi prévoit aussi un « droit de préférence, assorti le cas échéant d’une faculté de substitution » au bénéfice du constructeur.

Mais il n’en demeure pas moins que, les « droits et obligations » dont il s’agit étant manifestement ceux tirés du contrat de distribution, cette disposition reviendrait à anéantir le principe de non-cessibilité du contrat de distribution, et à lui ôter tout caractère intuitu personae.

A vrai dire, elle constituerait une petite révolution dans la distribution automobile, et générerait assurément à elle seule une forte activité contentieuse, ne serait-ce que pour définir ce que serait « l’offre de bonne foi » formulée par le candidat acquéreur, ou bien encore le critère « raisonnable » que le constructeur appliquerait dans l’examen de l’offre.

2/ Le Code de commerce instaurerait ensuite, en cas de « résiliation à l’initiative du fournisseur » ou en cas de « cessation du contrat », et « en l’absence de faute grave du distributeur ou du réparateur » agréé, l’obligation pour le constructeur de régler « une indemnité compensatrice du préjudice subi par le distributeur ou le réparateur du fait de la cessation de la relation contractuelle ». La proposition de loi va jusqu’à citer les éléments composant cette indemnité :

« 1° la valeur des éléments incorporels liés à la clientèle attachée localement à la marque par le distributeur ; 2° la valeur non-amortie des investissements engagés par le distributeur ou le réparateur, à la demande ou avec l’accord du fournisseur notamment pour satisfaire à ses conditions d’agrément ; 3° la reprise des stocks ».

Après la cession quasi-libre du contrat de distribution, une telle disposition serait une deuxième atteinte majeure au pouvoir de composition, par le constructeur, de son réseau de distribution.

Par le versement obligatoire d’une indemnité hors faute grave du distributeur, le statut du concessionnaire automobile rejoindrait ainsi celui de l’agent commercial, mais aussi, dans un autre registre, celui du salarié, qui tous deux reçoivent une indemnité forfaitaire et bénéficient ainsi d’une forme de présomption de préjudice à l’occasion de la rupture de leur contrat.

En première analyse, cette indemnité garantie viendrait heurter le principe de liberté contractuelle et entraverait la prohibition des contrats perpétuels.

La règle de la réparation intégrale mais juste – « ni plus ni moins » – du préjudice, serait mise à mal.

Et d’innombrables questions se poseraient dans la mise en œuvre de ce droit à indemnité automatique : si l’on comprend que l’indemnité serait due en cas de dénonciation du contrat ou en cas de résiliation pour un motif hors faute grave, serait-elle due également à la cessation d’un contrat de distribution à durée déterminée ? comment serait définie la faute grave privative d’indemnité ? suffirait-il de se référer aux fautes caractérisées comme graves aux termes du contrat, ou le juge aurait-il une faculté d’appréciation indépendamment des stipulations contractuelles ? comment déterminer et « isoler » la « valeur des éléments incorporels liés à la clientèle attachée localement à la marque par le distributeur » ? etc.

3/ Enfin, le transfert des données clients et prospects, qui, selon le projet de texte, « constituent un élément essentiel du fonds de commerce des distributeurs », ne pourrait être imposé par le constructeur « sans cadre juridique préalable », et « sans prévoir une contrepartie économique pour les distributeurs ».

Selon certains commentaires de la presse professionnelle automobile, ces propositions de loi s’expliqueraient par le contexte d’une mise en place de contrats d’Agent, annoncée dans certains réseaux. Si l’idée est d’octroyer au concessionnaire automobile des prérogatives comparables à celle de l’agent commercial, on ne peut que s’étonner d’une démarche qui revient à assimiler des statuts juridiques fondamentalement différents.

Et comment justifier la mise en place d’un statut de distributeur spécifique à un secteur économique – l’automobile en l’occurrence -, sans que soient démontrés les bénéfices que le consommateur tirerait des dispositions nouvelles ?

Il est à noter que pour des raisons sans doute communes, d’autres pays ont engagé une démarche identique, tels que la Belgique, le Luxembourg, l’Autriche, et l’Italie où une loi a été promulguée en août 2022, instaurant notamment l’obligation pour le constructeur d’indemniser les investissements non-amortis du concessionnaire venant d’être résilié.

Il faudra bien entendu être attentif aux étapes à venir dans la possible adoption de ces propositions de loi.

[Véhicule à délégation de conduite] – Publication de l’arrêté fixant le contenu des informations à transmettre au consommateur

La commercialisation en France d’un véhicule à délégation de conduite (communément désigné par « véhicule autonome ») implique aux termes de l‘article L.224-68-1 du Code de la consommation de transmettre aux consommateurs, préalablement à la conclusion du contrat de vente ou de location, « une information relative aux conditions d’utilisation du système de conduite automatisé dont le véhicule est équipé ».

Ce même article renvoie à l’arrêté du 8 décembre 2022, publié le 29 décembre, qui vient fixer le contenu et les modalités de fourniture de l’information obligatoire relative aux conditions d’utilisation du système de conduite automatisé équipant un véhicule.

Cet arrêté vient en complément de l’article 3 du Décret du 29 juin 2021 qui détaille les conditions d’utilisation du système de conduite automatisé.

L’arrêté se concentre sur les informations qui doivent être a minima communiquées aux consommateurs (article 2 de l’arrêté).

On peut notamment relever, parmi ces informations, l’obligation de rappeler au conducteur qu’il doit se tenir constamment en état et en position de répondre à une demande de reprise en main du système de conduite automatisé et de répondre aux sommations, injonctions ou indications données par les forces de l’ordre ou les règles de priorité de passage des véhicules d’intérêt général prioritaires.

L’arrêté précise également la forme de transmission de ces informations.

Aux termes de l’article 5 de l’arrêté, les professionnels devront en effet insérer, au sein des supports mis à disposition des consommateurs, un autotest leur permettant d’évaluer leur compréhension desdites informations.

Le contrat de vente ou de location du véhicule à délégation de conduite devra en outre « attester que le consommateur a pris connaissance de l’information et réalisé l’auto-test ».

[Publicité] – En Corée du Sud, Tesla jugé fautif de ne pas avoir averti ses clients d’une autonomie et d’une vitesse de charge réduites par temps froid

L’autorité sud-coréenne de la concurrence (KTFC) a annoncé le 3 janvier 2023 que le constructeur automobile américain Tesla doit régler une amende de 2,2 millions de $ (2,85 milliards de wons) pour publicité mensongère.

L’autorité se réfère aux informations diffusées par Tesla sur un site internet (en coréen) et lui reproche d’avoir omis de préciser que « la vitesse de charge varie de façon significative selon le type de chargeur, la température extérieure et le niveau de charge de la batterie« , alors que, selon elle, l’autonomie d’un véhicule électrique Tesla peut, par temps froid, chuter de 50,5% par rapport aux données officielles du constructeur.

Il est également reproché à Tesla une absence d’informations sur le fait que le coût du chargement du véhicule électrique dépend de plusieurs facteurs, comme la vitesse de chargement et la politique d’aides du gouvernement.

Pour ce qui est de l’autonomie par temps froid, il faut rappeler que la norme WLTP, en vigueur en Corée du Sud comme dans la plupart des pays du monde, repose sur un protocole d’essais du véhicule intégrant divers paramètres tels que, notamment, la vitesse moyenne du véhicule, la nature du parcours (urbain ou extra-urbain), et la température extérieure.

A cet égard, la détermination de la norme WLTP pour un véhicule électrique repose sur une température extérieure allant de 14° à 23°.

En se référant à l’autonomie par grand froid, il semble donc que l’autorité sud-coréenne ne reproche pas à Tesla un manquement en regard du protocole WLTP, mais bien une faute dans sa communication (en l’occurrence, une violation du ‘Fair Advertising and Labelling Act’ du pays), qui ne fournirait pas au consommateur l’ensemble des informations qui lui sont dues.

L’autorité sud-coréenne de la concurrence a également condamné Tesla à une amende supplémentaire pour absence d’information et pour refus de rembourser l’acompte (de 73 €) versé par des clients s’étant ultérieurement rétractés.

[Concurrence] – Entente verticale : la Cour de cassation juge qu’aucune présomption de préjudice ne découle d’une pratique anticoncurrentielle constitutive d’une entente verticale sur les prix

Le concédant d’une marque et d’un concept dans le secteur de la menuiserie industrielle sur mesure avait imposé à ses concessionnaires, via la présence d’une clause au sein de ses contrats de concession exclusive, l’obligation de respecter ses prix conseillés.

Sur le fondement de l’article L.420-1 du Code de commerce, qui pour rappel prohibe les ententes faisant obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché, les concessionnaires exclusifs avaient obtenu, en appel, l’annulation de la clause litigieuse ainsi que l’indemnisation de leur préjudice.

Le concédant ayant formé un pourvoi en cassation, la chambre commerciale de la Cour de cassation a pu se prononcer le 28 septembre 2022 sur cette affaire, dans un arrêt publié au Bulletin.

Pour condamner le concédant au paiement de dommages-intérêts, la Cour d’appel avait considéré qu’une entente entre concurrents causait nécessairement un trouble commercial lorsqu’elle est reconnue.

La Cour de Cassation censure l’arrêt d’appel en relevant au préalable que la pratique en cause n’était pas une entente entre concurrents, puisqu’il s’agissait en effet d’une entente verticale entre un concédant et un concessionnaire.

Elle considère ensuite qu’aucune présomption de préjudice ne découle de la pratique de prix imposé et qu’il appartenait par conséquent à la Cour d’appel d’établir le dommage causé par celle-ci.

[Union Européenne] – Un accord provisoire pour des batteries plus écologiques

Le 9 décembre 2022, le Conseil et le Parlement européen sont parvenus à un accord politique provisoire sur une proposition visant à renforcer les règles de durabilité applicables aux batteries et aux déchets de batteries commercialisées au sein de l’Union Européenne.

Le texte ainsi adopté couvre l’ensemble du cycle des batteries, de leur conception à leur fin de vie, et vise tout type de batteries (batteries de véhicules électriques, batteries portables, batteries destinées aux moyens de transport légers…).

L’accord fixe notamment des objectifs pour les producteurs en ce qui concerne la collecte des déchets de batteries, la valorisation du lithium issu desdits déchets, le niveau de contenu recyclé ou encore le rendement de recyclage.

L’accord vise en outre à garantir une concurrence plus équitable grâce à des exigences en matière de sécurité, de durabilité et d’étiquetage.

Ainsi, à titre d’exemple, dès 2024, les fabricants devront renseigner l’empreinte carbone totale attendue de chaque batterie, de l’extraction minière au recyclage, et à compter de 2027, seules les batteries des voitures électriques ne dépassant pas un seuil maximal pourront être commercialisées au sein de l’UE, l’objectif affiché étant de restreindre progressivement l’accès au marché européen aux batteries les plus durables.

Les vendeurs de batteries devront également s’assurer que les composants (lithium, nickel, cobalt) ont été extraits en respectant des normes environnementales et sociales élevées.

L’accord provisoire doit maintenant être approuvé et formellement adopté par le Conseil et le Parlement Européen pour devenir un règlement qui remplacera l’actuelle directive batteries de 2006.

[Véhicules hors d’usage] – Création de la filière de responsabilité élargie du producteur (REP)

Le 1er décembre 2022 a été publié le Décret de création de la filière de responsabilité élargie du producteur (REP) pour les véhicules hors d’usage (VHU).

Ce texte fixe le périmètre de la filière censée fonctionner depuis le 1er janvier 2022 en application de la loi Agec, en encadrant notamment la reprise gratuite des véhicules en fin de vie et leur traitement pour lutter contre les filières parallèles de traitement et d’exportation.

La filière ainsi créée concerne les véhicules motorisés à quatre roues dont le poids maximal est inférieur ou égal à 3,5 tonnes, en ce compris les véhicules électriques, ainsi que les véhicules à deux ou trois roues et les quadricycles à moteur.

En application du Décret, chaque producteur (constructeur ou importateur) est tenu de mettre en place, via un éco-organisme agréé ou par un système individuel agréé pour sa marque, un réseau de Centres VHU agréés, afin de permettre à tout détenteur d’un VHU de le remettre gratuitement à l’un de ces centres, lesquels devront, à compter du 1er janvier 2024, avoir nécessairement signé un contrat avec un éco-organisme ou un système individuel mis en place par un constructeur pour pouvoir continuer leur activité.

Au titre de la responsabilité élargie des producteurs qui leur est ainsi transférée, les Centres VHU sont tenus, une fois un véhicule repris, de le traiter afin de le dépolluer et de le désassembler avant son transfert à un broyeur.
Les déchets issus des véhicules relevant d’une autre filière REP, tels que les batteries, les fluides frigorigènes ou encore les pneus, doivent en outre être remis par le Centre VHU aux éco-organismes agréés pour ces filières.

Il en résulte pour les constructeurs ou importateurs de véhicules et les fabricants de pièces utilisées dans les véhicules une obligation de fournir aux Centres VHU les informations et consignes en langue française pour permettre la dépollution, le démontage, le désassemblage et les autres opérations et traitement appropriés des VHU.

Le Décret contient par ailleurs des dispositions afin d’augmenter la part de réemploi des pièces récupérées sur les véhicules (pièces issues de l’économie circulaire), qui ne sont plus considérées comme des déchets et que seuls les Centres VHU pourront désormais distribuer.

Est également prévue une obligation pour tout producteur de mettre à disposition du public une série d’informations dont les mesures entreprises dans la construction des véhicules pour limiter l’utilisation de certaines substances, le pourcentage de chaque type de matériaux recyclés intégré aux véhicules ou le taux de réutilisation, recyclage et valorisation des VHU.

Enfin, il est intéressant de relever que le Décret précise que les VHU sont bien considérés comme des déchets et que le fait que certains « [conservent] une valeur commerciale est sans incidence sur [leur] statut de déchet ».

[Garantie des vices cachés] – Selon la 3e Chambre civile de la Cour de cassation, l’action est encadrée dans un délai butoir de 20 ans

Focus sur un important conflit au sein même de la Cour de cassation en matière de garantie des vices cachés, plus précisément concernant les règles afférentes à l’encadrement du délai biennal de l’article 1648 du Code civil.

Dans un arrêt du 25 mai 2022, la 3e chambre civile de la Cour de cassation confirme sa rébellion jurisprudentielle en ce qui concerne l’encadrement dans le temps de l’action en garantie des vices cachés.

Dans les faits, une société de construction (maître d’ouvrage) avait acquis en 2008 des plaques qu’elle avait par la suite installées chez un client, et qui se révélèrent défectueuses.

Assigné en référé expertise en octobre 2018, le maitre d’ouvrage assigne à son tour, en février 2020, son fournisseur et le constructeur des matériaux défectueux en ordonnance commune, 12 ans après l’acquisition des matériaux.

Le juge des référés, puis la Cour d’appel rejettent la demande de mise hors de cause du fournisseur et du constructeur au motif que la prescription n’est pas manifestement acquise puisque le constructeur a bien été assigné dans les 2 ans de la découverte du vice par le maître d’ouvrage.

Un pourvoi en cassation est alors interjeté.

Afin de répondre à la question qui lui était posée, la 3e chambre civile de la Cour de cassation opère une distinction selon que la conclusion de la vente est antérieure ou postérieure à la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 (il y avait plusieurs ventes successives dans cette affaire, certaines antérieures à juin 2008, d’autres postérieures).
Nous limiterons ici nos observations aux ventes conclues après cette date.

Pour mémoire, la loi du 17 juin 2008, codifiée sous l’article L 110-4 du Code de commerce, ramène la prescription de droit commun de 10 à 5 ans.
Toutefois, ce texte ne précise pas le point de départ de ce délai ; il revient donc au juge de le fixer.

Selon la jurisprudence de la 1ère chambre civile et de la chambre commerciale de la Cour de cassation, le point de départ du délai quinquennal de l’article L 110-4 du Code de commerce doit être fixé au jour de la conclusion du contrat de vente.

Selon cette solution, le délai pour engager la responsabilité du vendeur initial au titre de la garantie des vices cachés court donc, pour le fabricant, à compter de la vente initiale.
A l’intérieur de ce délai de 5 ans est enfermé le délai de 2 ans de l’article 1648 du Code civil.

Prolongeant une solution déjà esquissée par un arrêt par elle rendu le 16 février 2022, la 3e chambre civile de la Cour de cassation prend le contre-pied de ce raisonnement pour adopter une position beaucoup plus protectrice du vendeur intermédiaire : le délai biennal de l’action en garantie des vices cachés n’est pas encadré par le délai de 5 ans de l’article L 110-4 du Code de commerce, mais par le délai « butoir » de l’article 2232 du Code civil, qui est de 20 ans à compter de la vente initiale.

Cette solution est critiquée en doctrine, notamment parce que l’article 2232 du Code civil ne vise qu’un délai de prescription, alors que le délai biennal de l’article 1648 du Code civil, selon cette même 3e chambre civile, est un délai de forclusion [1].

Mais quelle qu’en soit l’appréciation au plan juridique, cette position est évidemment très problématique pour les constructeurs et fabricants, sur qui pèse ainsi pendant 20 ans après la vente un aléa d’action en vice caché.

Mesurons toutefois l’apport de cet arrêt en ce qui concerne l’action récursoire, dont le délai de prescription ne pouvait auparavant commencer à courir qu’à compter de l’assignation sans autre encadrement temporel. L’action récursoire est désormais « limitée » à 20 ans à compter de la vente initiale.

Il faut noter que par un arrêt du 27 juin 2022, la Cour d’appel de Versailles a confirmé cette solution.
Il n’en demeure pas moins qu’un point majeur de désaccord demeure au sein même de la Cour de cassation.

Il est souhaitable que la Chambre mixte se saisisse de ce sujet pour mettre un terme à une situation qui plonge les praticiens, les avocats, et surtout les justiciables, dans une insécurité juridique très importante.

Note

[1] Pour : M. Bouland (Lexbase) ou le Professeur Leveneur (Contrats, Concurrence, Consommation) ; contre : le Professeur Thibierge (Revue des contrats)

[Clauses abusives] – La DGCCRF inaugure à l’encontre d’Amazon son pouvoir d’injonction sous astreinte

Le 7 décembre 2022, la DGCCRF a imposé à Amazon le versement d’une astreinte de 3,33 millions d’euros au titre de son nouveau pouvoir d’injonction sous astreinte, que lui a donné la loi DDADUE (pour « diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne ») de décembre 2020.

Pour rappel, ce nouveau pouvoir conféré à la DGCCRF, et codifié aux articles L 470-1 et suivants du Code de commerce, permet à ses agents, après une procédure contradictoire, « d’enjoindre à tout professionnel, en lui impartissant un délai raisonnable, de se conformer à ses obligations, de cesser tout agissement illicite ou de supprimer toute clause illicite », sans passer par une procédure en justice préalable.

Lorsque l’injonction est notifiée à raison d’un manquement passible d’une amende civile, elle peut en outre être assortie d’une astreinte journalière pouvant aller jusqu’à 0,1% du chiffre d’affaire mondial H.T réalisé au cours du dernier exercice clos selon la gravité de l’atteinte constatée à l’ordre public.

En cas d’inexécution, totale ou partielle ou d’exécution tardive, la DGCCRF est ensuite autorisée à liquider elle-même l’astreinte dans la limite de 1% du chiffre d’affaires H.T réalisé au cours du dernier exercice clos, après avoir informé par écrit le professionnel mis en cause de la sanction envisagée à son encontre, lequel peut présenter ses observations dans le délai de soixante jours.

Passé ce délai, l’autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l’amende. La décision prononçant la mesure d’injonction et celle prononçant la liquidation de l’astreinte journalière doivent être motivées et peuvent le cas échéant faire l’objet d’une publicité, aux frais du professionnel qui fait l’objet de l’injonction.

Les deux décisions sont susceptibles d’un recours de pleine juridiction devant le juge administratif, et le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner leur suspension.

En l’occurrence, Amazon avait été condamnée à une amende de 4 millions d’euros par le Tribunal de commerce de Paris le 2 septembre 2019, à la suite d’une assignation du Ministre chargé de l’économie, pour différentes clauses déséquilibrées dans le contrat qu’Amazon imposait aux entreprises utilisant sa place de marché.

Toutefois, dans le cadre d’une nouvelle enquête lancée en 2020, la DGCCRF a constaté de nouvelles clauses déséquilibrées et/ou non conformes au Règlement européen « Platform to Business » , notamment la possibilité pour Amazon de modifier ou résilier un contrat sans préavis et l’interdiction pour les marchands tiers de prospecter auprès des clients qu’ils ont conquis via Amazon.fr.

La DGCCRF a en conséquence demandé à Amazon, le 20 décembre 2021, de modifier ses conditions contractuelles rapidement et au plus tard le 22 mars 2022, sous astreinte de 90 000 € par jour de retard passé cette date.

Amazon ayant tardé à mettre ses contrats en conformité et n’ayant mis en place de nouvelles conditions contractuelles qu’à compter du 28 avril 2022, la DGCCRF a prononcé à son encontre une amende à hauteur de 3,33 millions d’euros, au titre de la liquidation d’astreinte.

[Distribution] – Indemnité de préavis de l’agent commercial en cas de faute grave : revirement de jurisprudence

Par un récent arrêt du 16 novembre 2022, la chambre commerciale financière et économique de la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence notoire (publié au Bulletin) relatif à l’indemnité due aux agents commerciaux en cas de résiliation de leur contrat.

La question se posait de savoir si un manquement grave, constaté postérieurement à la résiliation, et donc non mentionné dans la lettre de résiliation, est susceptible de priver l’agent commercial des indemnités de rupture auxquelles il peut prétendre.

Selon les faits, une société ayant notamment conclu un contrat d’agence commerciale, voyait son mandant résilier son contrat d’agent. Postérieurement à cette résiliation, le mandant constatait certains agissements de l’agent commercial constituant un manquement à l’obligation de loyauté.

Il est nécessaire de rappeler que la Cour de cassation considérait jusqu’alors que la découverte d’un manquement grave de l’agent commercial, même postérieure à la notification de la résiliation de son contrat, était de nature à le priver de son droit à indemnité de rupture [1].

Telle avait été la position adoptée par la Cour d’appel de Versailles saisie de cette affaire.

Toutefois, la Cour de cassation s’est vue forcée de tenir compte de l’interprétation que la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) fait de la règlementation applicable aux agents commerciaux [2].

La haute juridiction rappelle en effet les termes d’un important arrêt de 2010 de la CJUE [3], selon lequel « l’agent commercial ne peut pas être privé de son droit à indemnité en vertu de cette disposition (article 18 a) de la Directive susmentionnée) lorsque le commettant établit, après lui avoir notifié la résiliation du contrat moyennant préavis, l’existence d’un manquement de cet agent qui était de nature à justifier une résiliation sans délai de ce contrat ».

De fait, la Cour de cassation s’aligne et demande donc aux juges du fond de « retenir désormais que l’agent commercial qui a commis un manquement grave, antérieurement à la rupture du contrat, dont il n’a pas été fait état dans la lettre de résiliation et a été découvert postérieurement à celle-ci par le mandant, de sorte qu’il n’a pas provoqué la rupture, ne peut être privé de son droit à indemnité. »

Notes

[1] Cass. Com., 1er juin 2010, pourvoi n°09-14.115 ; Com., 24 nov 2015, pourvoi n° 14-17.747 ; Com., 19 juin 2019, pourvoi, n° 18-11.727

[2] Directive 86/653/CEE du Conseil du 18 décembre 1986 relative à la coordination des droits des Etats membres concernant les agents commerciaux indépendants, plus précisément ses articles 17 § 3 et 18, transposée sous les articles L134-12 et L134-13 du Code de commerce

[3] CJUE, 28 oct 2010 – Volvo Car Germany GmbH aff.C-203/09, points 38, 42 et 43

Les principales dispositions issues des lois Agec et Climat et Résilience impactant le secteur automobile à compter du 1er janvier 2023

Dans le cadre des lois «Anti-gaspillage pour une économie circulaire» (Agec) et «Climat et Résilience», respectivement promulguées les 10 février 2020 et 22 août 2021, plusieurs nouvelles dispositions légales sont entrées en vigueur au 1er janvier 2023.

Au sein du secteur automobile, certaines de ces dispositions ont un impact direct sur les distributeurs en leur imposant de nouvelles obligations, tandis que d’autres ont un impact plus indirect en ce qu’elles pourraient modifier le comportement des acheteurs.

Des dispositions imposant de nouvelles obligations aux distributeurs du secteur automobile

Impression des prospectus publicitaires et catalogues sur du papier recyclé et tickets de caisse dématérialisés

Depuis le 1er janvier 2023, il est désormais obligatoire d’imprimer les prospectus publicitaires et les catalogues visant à faire de la promotion commerciale à l’attention des consommateurs sur du papier recyclé, ou issu de forêts gérées durablement.
Toute infraction à cette obligation sera passible d’une contravention de 5e classe.

Il est en outre interdit d’utiliser certaines huiles minérales perturbant le recyclage des déchets pour l’impression desdits prospectus et catalogues.

L’impression automatique des tickets de caisse devait également être interdite au 1er janvier 2023, mais l’interdiction a finalement été décalée au 1er avril 2023.
Seront concernés par cette interdiction (sauf exception) :

  • les tickets de caisse produits dans les surfaces de vente et dans les établissements recevant du public ;
  • les tickets émis par des automates ;
  • les tickets de carte bancaire ;
  • les bons d’achat et tickets promotionnels ou de réduction.

    Ces tickets ne pourront alors être imprimés qu’en cas de demande expresse du client.

Encadrement des allégations de neutralité carbone dans le cadre de la publicité : la fin du « greenwashing »

Depuis le 1er janvier 2023, il est interdit d’affirmer dans une publicité qu’un produit ou service est «neutre en carbone» sans présenter un bilan des émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble du cycle de vie du produit ou service dont il est fait la promotion la trajectoire de réduction prévue des émissions, ainsi que les modalités de compensation des émissions résiduelles.

Ces informations devront être facilement accessibles pour le public et mises à jour tous les ans.

Extension aux émissions indirectes du périmètre des bilans des émissions de gaz à effet de serre

En France, le dispositif des bilans d’émissions de gaz à effet de serre (BEGES) prévoit que les organisations (entreprises, administrations publiques, collectivités, etc.) réalisent régulièrement un bilan, qui doit être rendu public.

Avant le 1er janvier 2023, seules les émissions directes et les émissions indirectes associées à l’énergie consommée devaient obligatoirement être prises en compte dans les BEGES, ce qui n’était pas toujours représentatif de l’impact réel sur le climat.

Depuis le 1er janvier 2023, il est également obligatoire de réaliser une déclaration de l’ensemble des émissions indirectes significatives.
Cela inclut par exemple les émissions associées à l’utilisation des produits vendus par une entreprise, ou aux déplacements domicile-travail des salariés.

Intégration des pneumatiques dans la filière Responsabilité Elargie des Producteurs (« REP »)

L’article L 541-10-1 (16°) du Code de l’environnement prévoit que les pneumatiques, associés ou non à d’autres produits, sont intégrés à la REP à compter du 1er janvier 2023.

La loi AGEC intègre ainsi la gestion de ces produits dans le dispositif actuel de la REP et formalise l’agrément des éco-organismes et des systèmes individuels.

Le décret définissant les règles relatives à la gestion des déchets de pneumatiques en matière de collecte et de traitement n’a cependant pas encore été publié à ce jour.

Des dispositions pouvant impacter le comportement des acheteurs du secteur automobile

Les nouvelles conditions du bonus écologique et de la prime à la conversion

S’agissant du bonus écologique, ne sont désormais visés que les véhicules neufs ou d’occasion fonctionnant à l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux à l’exclusion des hybrides rechargeables.

Les véhicules dont le coût d’acquisition est de plus 47 000 euros ne sont en outre plus éligibles et une condition de poids est ajoutée : la masse des véhicules (hors camionnettes) doit être inférieure à 2,4 tonnes.

Le plafond d’aide a également été réduit de 1 000 euros, passant ainsi à 5 000 euros pour l’acquisition d’une voiture particulière et à 6 000 euros pour les camionnettes.

Ces montants d’aide peuvent cependant être augmentés de 2 000 euros pour les ménages dont le revenu de référence par part est inférieur à 14 089 euros (soit 50 % des ménages).

S’agissant de la prime à la conversion, elle est désormais uniquement réservée aux ménages dont le revenu de référence par part est inférieur à 22 983 euros (soit 80 % des ménages).

Son montant est renforcé pour les ménages des deux premiers déciles de revenus (RFR/part inférieur à 6 358 €) et pour les ménages des cinq premiers déciles de revenus et gros rouleurs (RFR/part inférieur à 14 089 €) pour lesquels la prime pourra atteindre jusqu’à 6 000 euros pour l’acquisition d’une voiture et 10 000 euros pour l’acquisition d’une camionnette.

De plus, le montant de la prime est majoré de 1 000 euros dans les Zones à Faibles Emissions Mobilité (« ZFE-m ») et jusqu’à 3 000 euros si une collectivité locale octroie une aide de même nature en ZFE-m.

Renforcement du malus lié aux émissions de CO2 des véhicules de tourisme

Un nouveau barème du malus sur les émissions de CO2 des véhicules de tourisme neufs a été mis en place au 1er janvier 2023.

Cette évolution était prévue dès fin 2020 par l’article 55 de la Loi de finances pour 2021 et s’appliquera à partir de 123 gCO2/km, contre un seuil de déclenchement de 128 gCO2/km en 2022.

Pour ce niveau de pollution, la taxe appliquée est de 50 euros.

Le seuil de 1 000 euros sera atteint dès 146 gCO2/km (1074 euros), au lieu de 151 gCO2/km en 2022.

La dernière tranche du barème s’élèvera à 50 000 euros pour les véhicules ayant un taux de CO2 supérieur à 225 g CO2/km (au lieu de 40 000 euros en 2022 pour les plus de 223 gCO2/km).

Incitation au covoiturage

Depuis le 1er janvier 2023, une prime de 100 euros peut être reversée aux conducteurs par les plateformes de covoiturage (blablacar, ecov, lane, covoit’ici etc.).

Le versement se fera de manière progressive : une première partie au 1er covoiturage (25 euros) et le reste au 10e covoiturage, dans un délai de 3 mois à compter de la date du 1er covoiturage.

Pour bénéficier de la prime, les conducteurs devront remplir les conditions suivantes :

  • Avoir le permis de conduire ;
  • Effectuer un premier trajet en covoiturage en tant que conducteur en 2023, puis effectuer 9 autres trajets dans les 3 mois suivants ;
  • La distance du trajet réalisé en France doit être inférieure ou égale à 80 km ;
  • Les trajets sont effectués en utilisant une plateforme de covoiturage éligible dont la liste est consultable sur le site : https://covoiturage.beta.gouv.fr/operateurs/

Un prêt à taux zéro pour financer l’acquisition de véhicules propres expérimenté de 2023 à 2025 dans certaines Zones à Faibles Emissions Mobilité (« ZFE-m »)

Le Décret n° 2022-615 du 22 avril 2022 (pris en application de l’article 107 de la loi « Climat et Résilience ») est venu définir les modalités de l’expérimentation, débutée au 1er janvier 2023, d’un prêt à taux zéro pour l’acquisition de véhicules neufs ou d’occasion, électriques ou hybrides rechargeables, dans, ou à proximité, des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) en dépassement régulier des normes de qualité de l’air.
Les particuliers ainsi que les micro-entreprises seront éligibles à ce prêt sous conditions de ressources.

Le montant du prêt ne pourra pas excéder le coût d’acquisition du véhicule, aides publiques déduites, et sera plafonné à 30 000 € dans le cas d’un achat et 10 000 € dans le cas d’une location.

Il sera cumulable avec les aides à l’acquisition de véhicules peu polluants (bonus écologique et prime à la conversion).

Dans l’attente des données locales sur la qualité de l’air en 2022, sont éligibles au dispositif les ZFE-m de Paris et des Métropoles du Grand Paris, de Lyon, d’Aix-Marseille et de Rouen.


Des informations complémentaires sont données sur le site du Ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et notamment sur les pages suivantes :
https://www.ecologie.gouv.fr/changements-en-vigueur-au-1er-janvier-2023
https://www.ecologie.gouv.fr/mise-en-oeuvre-des-lois-anti-gaspillage-economie-circulaire-et-climat-et-resilience-plusieurs-textes

[Distribution] – Négociation annuelle des conditions commerciales et exécution d’un préavis

Par un arrêt du 7 décembre 2022 , la Cour de cassation rappelle que « Lorsque les conditions de la relation commerciale établie entre les parties font l’objet d’une négociation annuelle, ne constitue pas une rupture brutale de cette relation les modifications apportées durant l’exécution du préavis qui ne sont pas substantielles au point de porter atteinte à l’effectivité de ce dernier ».

Le litige portait en l’occurrence sur les conditions commerciales applicables en cours de préavis de rupture entre la société Samsung Electronics France et un distributeur indépendant de produits électroniques grand public, la société Concurrence.

Ce dernier reprochait à Samsung une rupture brutale de leur relation commerciale établie, sans préavis, dès lors que les conditions commerciales avaient été modifiées par Samsung en cours de préavis, Samsung ayant notamment imposé, pour la première fois en cours de préavis, de passer les commandes par des grossistes au lieu d’acheter en direct au fabriquant.

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 5 juin 2019 en ce qu’il a rappelé qu’à partir du moment où les conditions commerciales font l’objet d’une négociation annuelle entre les parties, il est normal que celles-ci puissent évoluer, y compris pendant l’exécution d’un préavis, un accord annuel n’étant, par principe, pas immuable.

La Cour de cassation confirme en outre que le changement de mode d’approvisionnement aux mêmes conditions tarifaires ne caractérisait pas une modification substantielle de la relation commerciale interdite durant le préavis.

Rupture brutale de la relation commerciale établie

En cas de rupture à effet immédiat, l’existence d’une clause résolutoire de plein droit ne dispense pas le juge d’apprécier la gravité du manquement

Le maroquinier Longchamp résilie à effet immédiat plusieurs contrats de son distributeur agréé SMAG en raison de manquements reprochés à ce dernier.

SMAG assigne Longchamp en rupture brutale de la relation commerciale établie et fait valoir que « la circonstance que le manquement contractuel reproché ait été contractuellement érigé en une faculté de résiliation du contrat à effet immédiat est impropre à justifier une rupture de la relation établie sans préavis », ajoutant que « la réitération d’un manquement contractuel n’est pas une mesure de sa gravité ».

Alors que la Cour d’appel de Paris [1], après avoir constaté que les manquements étaient avérés, avait jugé que la référence à la clause résolutoire et le caractère réitéré des manquements étaient suffisants à justifier la rupture à effet immédiat, la Cour de cassation confirme l’absence de brutalité au titre d’un des manquements (le fait pour le distributeur d’avoir diffusé une publicité utilisant la marque Longchamp sans l’accord préalable écrit de ce fournisseur) mais, en revanche, casse l’arrêt d’appel au titre d’un autre manquement (le non-respect d’une obligation d’approvisionnement minimum durant deux semestres consécutifs) [2].

La contradiction n’est qu’apparente, car dans son appréciation des deux manquements distincts, la Cour de cassation consacre au demeurant la même règle selon laquelle la seule constatation d’une situation relevant de l’application d’une clause résolutoire ne suffit pas à justifier la rupture à effet immédiat : le juge doit « caractériser les circonstances conférant au manquement contractuel reproché un degré de gravité suffisant au sens de l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce » (applicable aux faits de la cause), et ne peut pas se limiter à entériner une application « mécanique » d’une clause résolutoire.

Cette décision est cohérente avec le principe selon lequel, lorsque la relation est formalisée par un contrat, les dispositions contractuelles afférentes à la rupture sont sans incidence sur l’appréciation de la brutalité de la rupture.

Elle est aussi en ligne avec la règle, commune aux contentieux de rupture abusive (et aussi aux contentieux de licenciement de cadres commerciaux !), selon laquelle la constatation de la non-atteinte d’objectifs n’est jamais, en tant que telle, suffisante à caractériser un manquement contractuel.

En revanche, on relèvera que la même chambre commerciale de la Cour de cassation tient une position divergente lorsqu’il s’agit non pas de rupture brutale, mais de rupture abusive.

Ainsi, dans une affaire tout aussi récente, la Cour, au fondement de l’article 1134 du Code civil (applicable aux faits de la cause), a cassé un arrêt de la Cour d’appel de Nîmes en posant en principe qu’il « n’appartient pas au juge d’apprécier la gravité du manquement justifiant la mise en œuvre d’une clause prévoyant la résolution de plein droit du contrat en cas d’inexécution par l’une des parties de l’une quelconque de ses obligations » [3].

Cette divergence s’explique sans doute par la différence des responsabilités engagées, délictuelle en cas de rupture brutale, contractuelle dans cette affaire de rupture abusive.

Notes

1. 28 octobre 2020 (pôle 5, chambre 4)

2. Cass com, 7 septembre 2022, n°21-17914

3. Cass com, 28 septembre 2022, n°21-17269

Arrêté du 17 novembre 2022 : précisions et actualisation des conditions d’établissement, de délivrance, et de validité du permis de conduire

L’arrêté du 20 avril 2012 fixait les conditions d’établissement, de délivrance et de validité du permis de conduire.

Par un arrêté du 17 novembre 2022, les conditions de validité des titres de conduite et de leur renouvellement et les conditions de délivrance des différentes catégories de permis de conduire se trouvent modifiées, et actualisées pour certaines. 

Ce texte a pour principale ligne de conduite la lutte contre la fraude

Ainsi, à titre d’exemple, l’arrêté instaure la possibilité d’annuler une épreuve en raison de l’absence d’utilisation du téléservice par le candidat pour son inscription préalable. 

Par ailleurs, la possibilité d’annuler les épreuves obtenues avec l’aide frauduleuse d’un tiers ou par tricherie, prévue à l’article 5 de l’arrêté du 20 avril 2012, est spécifiquement précisée. 

De nouveaux comportements spécifiquement prohibés font leur apparition. Par exemple, l’article 2 du décret voit le 13e alinéa de sa partie D complété de la façon suivante : 

« En cas de comportement répété de nature à perturber le déroulement de l’épreuve ou selon la gravité des faits, le service en charge localement de l’organisation des examens du permis de conduire peut refuser l’accompagnement durant les examens à la personne désignée après l’avoir avertie par courrier recommandé avec accusé de réception. »

L’arrêté prend en compte la mise en place de procédures dématérialisées et l’actualisation des pièces justificatives acceptées pouvant être présentées par l’usager.

Les modalités de reconnaissance et d’échange des permis de conduire par les collectivités d’outre-mer sont également actualisées.

Enfin, il convient de noter que la validité des épreuves théoriques (« le code »), qui est de 5 ans, n’est plus assujettie à 5 présentations aux épreuves pratiques (« la conduite »).

En d’autres termes, les épreuves théoriques restent valables 5 ans, quel que soit le nombre de présentations.

[Consommation] – L’indice de réparabilité s’élargit à quatre nouvelles catégories de produits

La loi n°2020-105 du 10 février 2020 de lutte contre le gaspillage et pour l’économie circulaire, pour les produits électriques et électroniques a créé l’obligation pour « les producteurs, importateurs, distributeurs ou autres metteurs sur le marché » de certains produits d’afficher un indice dit de « réparabilité ».

En affichant une note sur 10, cet indice informe les consommateurs sur le caractère plus ou moins réparable des produits.

Cette obligation d’affichage de l’indice de réparabilité concernait depuis le 1er janvier 2021, les cinq produits suivants :

  • Lave-linge à hublot ;
  • Smartphone ;
  • Ordinateur portable ;
  • Téléviseur ;
  • Tondeuse à gazon électrique.

Depuis le 4 novembre 2022, l’indice de réparabilité est devenu obligatoire pour les quatre nouvelles catégories de produits suivants :

  • Lave-linge à chargement par le dessus ;
  • Lave-vaisselle ;
  • Nettoyeur à haute pression ;
  • Aspirateur filaire, sans fil et robot.

[Technologie] – Circulation des véhicules autonomes autorisée depuis le 1er septembre 2022 en France

La France est le premier pays européen à s’être doté d’un cadre législatif et règlementaire organisant la circulation des véhicules autonomes par l’adoption de l’ordonnance n°2021-443 du 14 avril 2021 et du décret n°2021-873 du 29 juin 2021. Ces deux textes sont en effet venus préciser les conditions de circulation des véhicules autonomes en France (désignés par le terme « véhicule à délégation de conduite ») et le régime de responsabilité associé.

Si le décret du 29 juin 2021 prévoyait une entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions au 1er septembre 2022, celle-ci ne pouvait être effective qu’après une modification de la Convention de Vienne sur la circulation routière du 8 novembre 1968, à laquelle la France est partie.

C’est chose faite avec l’adoption du décret du 21 juillet 2022 n°2022-1034 portant publication de l’amendement à la Convention Vienne qui a eu pour objet d’assouplir l’exigence selon laquelle « tout véhicule ou tout ensemble de véhicules en mouvement doit avoir un conducteur ».

Grâce à cet amendement, cette condition est désormais réputée satisfaite en France dès lors que le véhicule autonome est conforme au cadre législatif et réglementaire français mis en place par l’ordonnance et le décret de 2021.

En France, il existe ainsi 3 niveaux de véhicules à délégation de conduite autorisés sur les routes depuis le 1er septembre 2022 et dont les définitions extensives figurent sous l’article R.311-1 du Code de la route. Des définitions simplifiées ont en outre été données par le Ministère chargé des transports :

  • Le « véhicule partiellement automatisé » est celui qui « doit effectuer une demande de reprise en main [du conducteur] pour répondre à certains aléas de circulation ou certaines défaillances pendant une manœuvre » ;
  • Le « véhicule hautement automatisé » est celui qui « peut répondre à tout aléa de circulation ou défaillance (dans son domaine de conception fonctionnelle), sans demande de reprise en main [du conducteur] pendant une manœuvre » ;
  • Le « véhicule totalement automatisé » est celui qui « peut répondre à tout aléa de circulation ou défaillance, sans demande de reprise en main [du conducteur] pendant une manœuvre » et qui doit être « utilisé dans le cadre des systèmes de transport routier automatisé avec possibilité d’intervention à distance ».

Nous pensons désormais préférable de faire référence à la classification française des véhicules à délégation de conduite, plutôt que de continuer à se rapporter aux 6 niveaux d’autonomie établis au plan international par la SAE (Society of Automotive Engineers).

[Concurrence] – l’ADLC sanctionne, pour abus de position dominante, le leader français des verres correcteurs et lunettes d’optique

À la suite d’opérations de visite et de saisie, d’auditions et d’échanges avec les principaux acteurs du secteur des verres optiques, l’Autorité de la concurrence a sanctionné la société Essilor International SAS, pour avoir, durant 11 ans et 7 mois, mis en œuvre des pratiques commerciales discriminatoires visant à entraver le développement en France, de la vente en ligne de verres correcteurs [1].

La société EssilorLuxottica SA, société mère d’Essilor International SAS, est également solidairement sanctionnée.

L’ADLC relève que la distribution des verres correcteurs et des lunettes d’optique s’effectue en France via plusieurs canaux : boutiques physiques ; sites internet « pure players » ; revendeurs dits « cross-canal », c’est-à-dire via des opérateurs ayant à la fois des points de vente physiques et des sites internet.

Face à l’essor de la vente en ligne, sur laquelle elle n’était pas positionnée en France, Essilor a, d’avril 2009 à décembre 2020, mis en œuvre des pratiques discriminatoires visant à entraver le développement de ce canal de distribution, ceci par l’imposition aux opérateurs de vente en ligne de restrictions en matière de livraisons, de communication et de garanties.

Afin d’empêcher les sites de vente en ligne de proposer des verres de marques Essilor ou Varilux aux consommateurs, Essilor refusait notamment de leur livrer des verres de marque, et leur interdisait également d’utiliser les marques et logos d’Essilor et de communiquer sur l’origine des verres.

De plus, Essilor a mis en œuvre des limitations de garantie vis-à-vis des opérateurs de vente en ligne en indiquant dans ses CGV que la prise en charge par Essilor de la garantie adaptation est conditionnée au respect, par le détaillant, d’un protocole de prise de mesures exclusivement conçu pour la vente en magasin.

Essilor, leader sur le marché français de la distribution en gros de verres correcteurs, a ainsi abusé de sa position dominante.

S’agissant de pratiques intervenues dans un secteur de la santé publique caractérisé par des prix élevés, et présentant, selon l’Autorité, un certain degré de gravité, l’ADLC a sanctionné Essilor International SAS à hauteur de 81 067 400 €, et sa maison-mère, EssilorLuxottica SA, solidairement à hauteur de 15 400 000 €.

Cette décision est susceptible de faire l’objet d’un recours (celui-ci a d’ailleurs été annoncé par EssilorLuxottica dès la publication de la décision, le 8 novembre 2022).

Note

1. Décision 22-D-16 du 6 octobre 2022

Contrôle technique des deux roues : la guerre continue

Nous pensions le sujet clos, le Conseil d’État a démontré ne pas être de cet avis.

Pour mémoire, par un décret n°2022-1044 du 25 juillet 2022, le gouvernement avait abrogé le décret n°2021-1062 du 9 août 2021, lequel devait mettre en place le contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles moteurs.

Trois associations écologiques (Respire, Ras-le-Scoot et Paris sans voiture) avaient alors saisi le Conseil d’État afin de faire annuler cette décision.

Le 31 octobre 2022, le Conseil d’État a annulé pour excès de pouvoir le décret du 25 juillet 2022, décision justifiée par deux motifs d’illégalité.

En premier lieu, la Haute juridiction administrative considère que compte tenu de l’incidence directe et significative sur l’environnement, la suppression de ce contrôle technique aurait dû être soumise à la consultation du public. Cet argument se base notamment sur la Charte de l’environnement qui est intégrée à la Constitution.

Ensuite, le Conseil d’État estime que les mesures alternatives au contrôle technique que le gouvernement proposait n’étaient pas assez efficaces pour garantir, selon les exigences du droit européen , la sécurité routière des motards.

De ce fait, le décret du 9 août 2021 mettant en place le contrôle technique est de nouveau en vigueur. Le Conseil d’État précise que sa mise en œuvre et les conditions y afférentes pourront être accompagnées de mesures d’applications (échelonnement dans le temps de la mise en œuvre du dispositif, différenciation selon l’ancienneté du véhicule, …).

[Droit de la Distribution] – Rupture brutale et continuité de la relation

Dans un arrêt du 5 octobre 2022 [1] obtenu pour le compte de 4 plateformes de vente de pièces détachées automobiles, la Cour d’Appel de Paris rappelle que « la relation commerciale ne prend pas nécessairement fin en cas de changement d’un partenaire et une relation entamée avec l’un peut se poursuivre avec l’autre dès lors qu’a été manifestée la volonté de s’inscrire dans la continuité de la relation initiale. Cependant, faute de pouvoir identifier une telle volonté, la relation initiale cesse au profit de la création d’une relation nouvelle qui, seule, sera prise en compte pour apprécier le caractère fautif de la rupture ».

En l’espèce, pour écarter la continuité de la relation entre 2 distributeurs de pièces de rechange automobiles successifs, la Cour retient que :

  • le 1er distributeur ne faisait pas partie du groupe auquel appartient le 2nd distributeur,
  • la relation commerciale avec le 1er distributeur portait sur des pièces de rechange automobiles d’une seule marque et sur un secteur géographique bien moins large que la relation commerciale avec le 2nd distributeur qui portait en outre sur des pièces de rechange de plusieurs marques automobiles,
  • de surcroît, la relation avec le 1er distributeur a été résiliée par le constructeur automobile, qui a lancé un appel d’offres dans le cadre d’une nouvelle stratégie de distribution de ses pièces de rechange, et c’est à l’issue de cet appel d’offres que le 2nd distributeur a été agréé en qualité de distributeur officiel de pièces de rechange.

Il est par ailleurs intéressant de relever dans cet arrêt, que la Cour d’Appel de Paris confirme que des bénéficiaires de remises de fin d’année (RFA) ont la faculté d’émettre des factures à hauteur des remises qui leur sont dues, en l’absence d’avoir émis par la partie redevable de ces RFA.

La Cour rappelle en outre qu’un mail recensant les conditions commerciales définies pour une année, complété par des grilles de ristournes, constitue une Convention unique au sens de l’article L 441-3 du Code de commerce.

Cet arrêt a donné lieu à un pourvoi en cassation s’agissant de la question de la continuité de la relation commerciale entre les deux partenaires successifs.

Note

1. CA Paris, Pôle 5 Ch 4, 5 oct.2022 – n°20/16460

[Droit de la consommation] – Les conditions du démarchage téléphonique précisées

Un nouveau Décret du 13 octobre 2022 , pris en application de la Loi du 24 juillet 2020 relative au démarchage téléphonique, encadre les jours, horaires et fréquence autorisés pour le démarchage téléphonique à des fins de prospection commerciale.

Par application de ce Décret, à partir du 1er mars 2023, le démarchage téléphonique des consommateurs sera autorisé uniquement du lundi au vendredi, de 10 heures à 13 heures et de 14 heures à 20 heures (heures correspondant au fuseau horaire du consommateur) et sera interdit le samedi, le dimanche et les jours fériés.

Cet encadrement concerne aussi bien les personnes non inscrites sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique « Bloctel » que celles inscrites mais sollicitées dans le cadre d’un contrat en cours, excepté si le consommateur a donné son consentement exprès et préalable pour être appelé, ce qu’il appartiendra au professionnel de démontrer en cas de litige.

Par ailleurs, le Décret prévoit qu’un consommateur ne peut pas être sollicité par voie téléphonique à des fins de prospection commerciale plus de quatre fois par mois (période de trente jours calendaires) par le même professionnel ou par une personne agissant pour son compte.

Le Décret précise également que, lorsque le consommateur refuse ce démarchage lors de la conversation, le professionnel s’abstient de le contacter ou de tenter de le contacter avant l’expiration d’une période de soixante jours calendaires révolus à compter de ce refus.

Ces dispositions font l’objet d’un nouvel article D 223-9 du Code de la consommation.

La violation de ces règles est sanctionnée par une amende administrative de 75 000 € pour une personne physique et de 375 000 € pour une personne morale (article L 242-16 du Code de la consommation).

[Droit de la consommation] – Qu’est-ce qu’un « système organisé de vente » conditionnant la qualification de vente à distance ?

L’arrêt de la Cour de cassation du 31 août 2022, commenté dans le précédent Radar DS, qui a conditionné la qualification d’une vente à distance à l’existence d’un « système organisé de vente » amène à s’interroger sur les contours de cette notion, qui n’est pas définie précisément par un texte, ni, à ce jour, par la jurisprudence.

Afin de mieux cerner cette notion, les éléments suivants peuvent être relevés :

➤ Aux termes du Considérant 20 de la Directive 2011/13/CE : « La notion de système organisé de vente ou de prestation de service à distance devrait inclure les systèmes proposés par un tiers autre que le professionnel mais utilisés par ce dernier, par exemple une plateforme en ligne. Elle ne devrait pas couvrir, cependant, les cas où des sites internet offrent uniquement des informations sur le professionnel, ses biens et/ou ses services ainsi que ses coordonnées. »

➤ Aux termes des « Orientations concernant l’interprétation et l’application de la Directive 2011/83/UE relative aux droits des consommateurs » (DCC) publiées par la Commission le 29 décembre 2021 : « La directive ne s’applique qu’aux contrats à distance conclus dans le cadre d’un système organisé de vente ou de prestation de service à distance. Par exemple, si un professionnel ne conclut un contrat avec un consommateur par courrier électronique ou par téléphone que de manière exceptionnelle, après avoir été contacté par le consommateur, ce contrat ne devrait pas être considéré comme un contrat à distance au sens de la directive. Toutefois, il n’est pas nécessaire que le professionnel mette en place une organisation complexe, telle qu’une interface en ligne, pour les ventes à distance. Des dispositions plus simples, telles que la promotion de l’utilisation du courrier électronique ou du téléphone pour la conclusion de contrats avec les consommateurs, déclencheraient également l’application des obligations de la DDC. (…)
L’application de la DDC ne dépend pas de la technologie utilisée par un professionnel. Peu importe qu’un consommateur conclue un contrat à distance «normal» sur l’internet ou utilise la technologie d’exécution des chaînes de blocs.
»

Il s’en déduit que l’existence d’un « système organisé de vente » dépendra de la fréquences des contrats conclus via ce système, de l’existence le cas échéant d’un site internet présentant les prestations proposées ou les produits vendus, ou encore de la présentation spécifique qui est faite du contrat signé.

Il nous semble ainsi pouvoir être considéré qu’une vente faite par un professionnel entièrement en ligne, de la signature du bon de commande au paiement, caractérise l’existence d’un système de vente organisé et sera dès lors nécessairement qualifiée de vente à distance.

Dans d’autres schémas de vente, il y aura lieu à procéder à une analyse au cas par cas, notre recommandation étant toutefois de faire bénéficier l’acheteur des dispositions du Code de la consommation relatives aux ventes à distance en cas de doute, a fortiori si le vendeur est un professionnel.

La réforme de la garantie légale de conformité et les problématiques rencontrées dans sa mise en œuvre au vu du Décret n°2022-946 entré en vigueur le 1er octobre 2022

Au 1er janvier 2022 est entrée en vigueur l’Ordonnance n°2021-1247 relative à la garantie légale de conformité pour les biens, les contenus numériques et les services numériques [1].

Cette Ordonnance a été complétée par un Décret d’application publié le 30 juin 2022 [2] , qui est entré en vigueur le 1er octobre 2022 et qui apporte des précisions sur les nouvelles obligations mises à la charge du professionnel au titre de la garantie légale de conformité.

La réforme ainsi opérée soulève toutefois quelques problématiques notamment du fait de l’imprécision des textes.

L’adaptation de l’obligation d’information précontractuelle

Ainsi qu’il l’est indiqué dans son préambule, l’objet du Décret est l’« information des consommateurs relative à la garantie légale de conformité des biens et des contenus et services numériques, et les modalités de sa mise en œuvre », en vue d’adapter l’obligation générale d’information précontractuelle à la modernisation de la garantie légale de conformité des biens et à la création d’une garantie légale de conformité pour la fourniture de contenus numériques et de services numériques.

Le Décret précise ainsi le contenu et les modalités de l’information due au consommateur par tout professionnel vendeur d’une part, et par tout producteur de biens comportant des éléments numériques d’autre part.

Les obligations d’information à la charge du professionnel vendeur

Au titre des obligations d’information à la charge du professionnel vendeur, le Décret apporte notamment les précisions suivantes :

➢ L’obligation pour tout professionnel d’utiliser désormais les termes « garantie légale » et « garantie commerciale » (article R 111-1) ainsi que l’intitulé « Contrat de garantie commerciale » pour toute garantie contractuelle (artice D 217-2-I).

➢ L’obligation pour le professionnel d’insérer dans ses conditions générales de vente, d’une part, et dans les conditions de sa garantie commerciale d’autre part, un encadré spécifique sur les modalités de mise en œuvre des garanties légales, dont le modèle est fourni en Annexe du Décret (articles D 211-2 et D 217-2-I).

➢ L’obligation pour le professionnel d’indiquer dans ses conditions générales de vente le nom du professionnel répondant des garanties légales et commerciales, ses coordonnées postales et téléphoniques ainsi que son adresse électronique ou tout moyen de contact numérique pertinent permettant au consommateur de solliciter la mise en œuvre des garanties (article D 211-1).

➢ L’obligation pour le professionnel vendeur d’indiquer au consommateur les modalités pratiques du renvoi du bien si sa mise en conformité ne peut intervenir sur le lieu où le bien se trouve.

Le nouvel article D 217-1 du Code de la consommation précise à ce titre que le consommateur « ne peut être tenu d’assurer, ni prendre en charge le transport du bien hors envoi postal ».

Cette nouvelle obligation est introduite en application de l’article L 217-10 du Code de la consommation, aux termes duquel « La réparation ou le remplacement du bien non conforme inclut, s’il y a lieu, l’enlèvement et la reprise de ce bien et l’installation du bien réparé ou du bien de remplacement par le vendeur. »

  • A la différence des articles précités, le nouvel article D 217-1 ne précise pas à quel moment et sur quel support cette information doit être transmise au consommateur. Au sein de la partie réglementaire du Code de la consommation, cet article figure d’ailleurs dans la Section 1 portant sur la « Mise en œuvre de la garantie légale de conformité » du Chapitre VII sur l’« Obligation de conformité dans les Contrats de vente de biens » et non dans le Chapitre Ier relatif à la « Présentation des contrats », dans lequel on retrouve les autres nouveaux articles introduits par le Décret.
  • A cette incertitude s’ajoutent des questions liées à la mise en œuvre pratique de cette obligation : est-ce que cela signifie que le professionnel doit rembourser au client tous frais, quel qu’en soit le montant, occasionnés par le renvoi du bien (ex : les frais de carburant du client qui rapporte son véhicule en atelier dans le cadre d’une campagne de rappel) ? Le professionnel peut-il plafonner ce montant ou imposer certaines modalités ? Qu’en est-il si le client refuse les modalités pratiques proposées par le professionnel ?

➢ L’obligation pour le professionnel de préciser dans sa garantie commerciale en quoi elle s’applique « en sus des droits dont bénéficie le consommateur au titre de la garantie légale de conformité pendant toute la durée de celle-ci » (article D 217-2-I).

➢ L’obligation pour le vendeur de mettre à disposition du consommateur, « sans frais, de manière lisible et compréhensible sur un support durable accompagnant la vente », les informations qui lui sont transmises par le producteur de biens comportant des éléments numériques, ci-dessous développées.

Les obligations d’information à la charge du producteur de biens comportant des éléments numériques

➢ Aux termes de l’article L 111-6 du Code de la consommation, le producteur de biens comportant des éléments numériques doit un certain nombre d’informations au vendeur, charge à ce dernier de les répercuter au consommateur préalablement à la vente (cf. ci-dessus).

En application de cet article, le Décret apporte les précisions suivantes (article D 111-5-1) :

❯ L’obligation d’information du producteur à l’égard du vendeur porte sur les informations suivantes :

  • Les logiciels du bien faisant l’objet des mises à jour, y compris les mises à jour de sécurité ;
  • La durée de fourniture de ces mises à jour ou la date à laquelle cette fourniture prend fin ;
  • Les conséquences possibles, en l’état de ses connaissances, des mises à jour fournies au-delà de la durée ou de la date mentionnée au 2° sur les performances du bien et notamment sur l’espace de stockage disponible, la disponibilité de la mémoire vive ou la durée de vie de la batterie.

❯ Cette information doit être transmise au vendeur « sans frais ».

❯ Il appartient au producteur d’informer le vendeur « sans retard injustifié et sur support durable » de toute évolution de ces informations.

  • L’information de la durée de fourniture des mises à jour n’est pas sans impact puisque conformément à l’article L 217-3 du Code de la consommation, la garantie légale de conformité est applicable au contenu ou au service numérique tout au long de la période de fourniture et durant ce délai, quel qu’il soit, le consommateur n’est tenu d’établir que l’existence du défaut de conformité et non la date d’apparition.
  • Les producteurs pourraient être dès lors tentés, par précaution, de s’engager sur des périodes de fourniture relativement courtes au détriment de l’intérêt commercial du produit.

Aux termes de l’article L 211-6 précité, le producteur a également une obligation d’information directement à l’égard du consommateur, avant l’installation de toute mise à jour (article D 111-5-3).
Le Décret liste à ce titre les informations précises que le producteur doit communiquer « sans frais » au consommateur et précise la possibilité pour le producteur d’indiquer un site internet ou une application mobile où les informations restent disponibles après l’installation de la mise à jour.

➢ Au vu de ce qui précède, on est en droit de s’interroger : ces nouvelles obligations d’information ne soulèvent-elles pas par ailleurs une problématique d’efficience de l’information précontractuelle ainsi due au consommateur ? Les nouvelles obligations d’information à la charge du professionnel vont en effet nécessairement alourdir les documents accompagnant la vente d’un bien, ce qui ne va pas encourager le consommateur à en prendre connaissance préalablement à son achat.

La réforme soulève en outre une problématique dans la mise en œuvre de l’extension de garantie légale imposée au professionnel par la réforme.

Les incertitudes dans la mise en œuvre de l’extension de la garantie de conformité

Aux termes du nouvel article L 217-13 du Code de la consommation issu de l’Ordonnance du 29 septembre 2021 : « tout bien réparé dans le cadre de la garantie légale de conformité bénéficie d’une extension de cette garantie de six mois ».

Ce nouveau droit pour le consommateur est expressément reproduit dans l’encadré spécifique qui doit désormais être inséré dans les conditions générales de vente et les conditions de garantie des professionnels (cf. ci-dessus).

Ni l’ordonnance, ni le Décret ne précisent cependant si un consommateur peut bénéficier à plusieurs reprises d’une extension de 6 mois, dans l’hypothèse où il ferait réparer son bien plusieurs fois pendant la période de garantie de conformité, ce qui n’est pas sans impact lorsqu’il s’agit pour le professionnel de déterminer la durée globale de sa garantie.

Cette extension automatique de la garantie légale suppose en outre de déterminer si une réparation sur le bien est effectuée au titre de la garantie légale de conformité ou au titre de la garantie commerciale, ce qui n’est pas évident en pratique.

Il est en tout état de cause recommandé pour un professionnel de ne pas considérer une intervention comme relevant automatiquement de la garantie commerciale, au risque de priver le consommateur du bénéfice de l’extension de garantie désormais prévue par la loi.

Enfin, une problématique non négligeable est que les nouveaux textes ne précisent pas si en cas d’extension de la garantie de conformité, la présomption d’antériorité du défaut de conformité dont bénéficie le consommateur est également étendue le temps de l’extension de la garantie.

Aux termes de l’article L 217-7 du Code de la consommation : « Les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la délivrance du bien, y compris du bien comportant des éléments numériques, sont, sauf preuve contraire, présumés exister au moment de la délivrance, à moins que cette présomption ne soit incompatible avec la nature du bien ou du défaut invoqué. »

Qu’en est-il de cette présomption en cas d’extension de la garantie légale de conformité ?

Si l’on considère que l’extension de la garantie est un prolongement de la garantie initiale, on peut penser qu’elle sera soumise aux mêmes conditions de preuve favorables au consommateur.

Toutefois, aucun texte ne le précise, alors que l’article L 217-7 indique au contraire expressément pour les contenus numériques que la présomption d’antériorité est calquée sur la période de fourniture annoncée du contenu numérique, si cette période est supérieure à 2 ans.

Par ailleurs, la durée de la présomption d’antériorité pour les biens d’occasion (6 mois) est décorrélée de la durée de la garantie de conformité (2 ans), ce qui pourrait donc également être le cas dans le cadre de l’extension de la garantie de conformité.

Ainsi, à défaut d’un arrêté qui apporterait des précisions complémentaires, il appartiendra à la jurisprudence de répondre aux problématiques soulevées par la mise en œuvre concrète de la réforme de la garantie légale de conformité.

Notes

1. Ordonnance n° 2021-1247 du 29 septembre 2021

2. Décret 2022-946 du 29 juin 2022 relatif à la garantie légale de conformité pour les biens, les contenus numériques et les services numériques

La Commission Européenne présente la nouvelle norme
Euro 7

La Commission Européenne a présenté le 10 novembre 2022 une proposition visant à réduire la pollution atmosphérique causée par les nouveaux véhicules à moteur vendus dans l’UE afin de répondre à l’ambition « zéro pollution » du pacte vert pour l’Europe, tout en maintenant les véhicules à un prix abordable pour les consommateurs et en promouvant la compétitivité de l’Europe.

De nouvelles normes s’imposaient, car le transport routier est la principale source de pollution atmosphérique dans les villes, et il reste une décennie de vente de véhicules thermiques avant l’échéance de 2035 (ces véhicules thermiques étant en outre appelés à circuler bien après 2035).

L’objectif de ces nouvelles normes d’émission, dites Euro 7, est que voitures, camionnettes, véhicules industriels (camions) et autobus soient beaucoup plus propres, dans des conditions de conduite réelles qui reflètent mieux la situation dans les villes où les problèmes de pollution atmosphérique sont les plus importants, et ce pendant une période beaucoup plus longue que dans le cadre des règles actuelles.

Il est important de relever (c’est une première mondiale) que la proposition porte sur les émissions de toutes natures, soit sur celles issues des tuyaux d’échappement, mais aussi sur les particules émises par les freins (baisse attendue de 27%) et les émissions de microplastiques provenant des pneumatiques. Les véhicules électriques sont ainsi concernés.


Plus précisément, les normes Euro 7 visent :

  • à mieux contrôler les émissions de polluants atmosphériques provenant de tous les nouveaux véhicules, en reflétant davantage l’éventail des conditions de conduite couvertes par les essais d’émissions sur route dans l’ensemble de l’Europe (par exemple sous des températures allant jusqu’à -10° ou +45 °C, à des altitudes allant jusqu’à 1 500 m, lors de trajets de courte durée ou déplacements quotidiens, ou bien encore lors de fortes accélérations) ;
  • à mettre à jour (pour les voitures, quel que soit le carburant utilisé) et durcir (pour les camions et camionnettes) les limites d’émissions polluantes ;
  • à réglementer les émissions issues des freins et des pneumatiques ;
  • à veiller à ce que les voitures neuves restent propres plus longtemps (jusqu’à 200 000 km et 10 ans d’âge) ; les exigences de durabilité de la norme Euro 6 sont ainsi doublées ;
  • à soutenir le déploiement de véhicules électriques : les nouvelles règles régiront la durabilité des batteries installées dans les voitures et les camionnettes afin d’éviter de devoir remplacer les batteries à un stade précoce de la vie d’un véhicule, limitant ainsi le recours aux matières premières « fossiles » nécessaires à la production de batteries ;
  • à exploiter pleinement les possibilités numériques avec notamment le recours à des capteurs à l’intérieur des véhicules.

Ces normes ont cependant aussi été conçues pour un impact raisonnable sur le prix des véhicules. Le Commissaire européen au marché intérieur, Thierry Breton, évoque ainsi un surcout de l’ordre de 100 à 150 € par véhicule.


La proposition de la Commission sera soumise au Parlement européen et au Conseil en vue de son adoption par les colégislateurs, pour une mise en place au 1er juillet 2025

La fin des ventes de véhicules thermiques en Europe est définitivement fixée à 2035

Pour rappel, la Commission avait présenté le 14 juillet 2021 une proposition législative pour une révision des normes de performance en matière d’émissions de CO2 pour les voitures particulières neuves et les véhicules utilitaires légers.

Puis, à l’issue d’une réunion des ministres de l’Environnement de l’UE, le Conseil de l’Union Européenne avait, le 28 juin 2022, entériné l’objectif de baisse de 100 % des émissions de CO2 en 2035, en prévoyant cependant une « clause de revoyure » en 2026.

Le Parlement Européen a publié le 27 octobre 2022 un Communiqué confirmant qu’un accord a été trouvé avec les Etats membres pour atteindre une mobilité routière à émission nulle d’ici à 2035, autrement dit un objectif de zéro émission de CO2 pour les véhicules particuliers (voitures) et utilitaires légers (camionnettes), ce qui constituerait une réduction de 100% des émissions pour l’ensemble de la flotte de l’UE par rapport à 2021.

Deux étapes intermédiaires ont été votées :

  • une baisse de 15 % des émissions pour 2025, et
  • de 55 % d’ici 2030 pour les voitures neuves (50 % pour les camionnettes neuves) par rapport aux niveaux de 2021.

Afin d’atteindre l’objectif zéro émission, le Parlement travaille à élaborer une méthodologie pour évaluer et collecter des données relatives aux émissions de CO2 sur l’ensemble du cycle de vie des voitures et des camionnettes vendues sur le marché de l’UE, méthodologie qui sera présentée d’ici à 2025, accompagnée le cas échéant de propositions législatives.

Chaque année, la Commission vérifiera l’écart entre les valeurs limites d’émission et les données relatives à la consommation réelle de carburant et d’énergie, afin d’ajuster les émissions spécifiques moyennes de Co2 des constructeurs à partir de 2030.

Une série de mesures d’accompagnement ont également été décidées :

  • mise en place de financements destinés à soutenir la transition vers des véhicules à émission nulle et les technologies connexes, orientés prioritairement vers les PME de la chaîne d’approvisionnement automobile ainsi que vers les régions et communautés « défavorisées » ;
  • révision du mécanisme d’incitation pour les véhicules à émission nulle et à faibles émissions (« ZLEV ») afin de l’aligner sur les tendances actuelles des ventes et d’introduire des voitures zéro émission abordables sur le marché de l’UE ;
  • révision (d’ici 2024) des règles existantes en matière d’étiquetage de la consommation de carburant et des émissions de CO2.

Les constructeurs de véhicules « de niche » et les marques de luxe (volumes de production au cours d’une année civile se situant entre 1 000 et 10 000 voitures neuves, ou entre 1 000 et 22 000 camionnettes neuves) conserveront un statut particulier (clause dite parfois « amendement Ferrari »), puisqu’ils pourront bénéficier d’une dérogation jusqu’à la fin de l’année 2035, tandis que les constructeurs d’automobiles à très faible diffusion (moins de 1 000 immatriculations de véhicules neufs par an) continueront d’être exemptés.

Au cours des discussions, le principal point de divergence a porté sur un « considérant » (développements non-contraignants du texte) que le gouvernement allemand proposait, visant à autoriser les véhicules « fonctionnant exclusivement avec des carburants neutres en CO2 » même au-delà de 2035.

Ce considérant a été intégré à l’accord final, en dépit des critiques qui lui étaient opposées au vu de la porte ainsi ouverte aux véhicules fonctionnant avec des carburants de synthèse obtenus à partir d’électricité « verte », appelés e-carburants ou carburants de synthèse.

Les discussions ont aussi porté sur le sort du bonus octroyé aux constructeurs lorsqu’ils atteignent un certain pourcentage de véhicules zéro émission ou à faibles émissions dans leur flotte.

Alors que le Parlement voulait supprimer tout de suite ce mécanisme de bonus, il a finalement été décidé que la proportion de véhicules zéro / faibles émissions à vendre pour qu’un constructeur touche le bonus sera de 25 % de la flotte pour les voitures, et 17 % pour les camionnettes.

Ces mesures constituent le premier accord du paquet législatif dit “Fit for 55” et envoient un signal fort avant que s’ouvre la Conférence des Nations unies sur le changement climatique COP27.

Les États-Unis favorisent les véhicules électriques assemblés sur leur sol

Le législateur américain donne un coup de pouce au mouvement de relocalisation aux USA des activités de la filière automobile.

La loi sur la réduction de l’inflation, votée fin août 2022, a remis en vigueur, et même étendu, des crédits d’impôt à l’achat d’un véhicule électrique qui avaient expiré fin 2021.

Le dispositif est désormais en vigueur pour une durée de 10 ans, à raison d’un montant maximal de 7 500 $ par voiture, et le plafond de 200 000 immatriculations subventionnées par fabricant a disparu, alors qu’il figurait dans le dispositif antérieur.

De plus, des crédits d’impôt spécifiques aux flottes et aux véhicules d’occasion ont été mis en place, outre diverses mesures favorisant l’installation de chargeurs résidentiels.

Ces mesures n’ont pas manqué de susciter la réaction des constructeurs et des autorités européennes et asiatiques, qui crient au protectionnisme.

Le bénéfice des aides est en effet limité aux véhicules dont les composants de batterie n’ont pas été assemblés par « des entités étrangères problématiques ».

En d’autres termes, ils devront donc être produits aux USA ou dans un pays sous accord commercial avec les USA.

l’Italie légifère sur les relations constructeur / concessionnaire automobile

Le Sénat italien a adopté, le 5 septembre 2022, une loi réglementant les relations contractuelles entre les constructeurs automobiles et leurs distributeurs, dans le but de protéger ces derniers.

Cette loi définit notamment la durée des contrats de distribution, qui seront désormais conclus pour une durée minimale de 5 ans.

Elle prévoit en outre qu’avant la conclusion du contrat, ou en cas de modification du contrat, le constructeur doit fournir au concessionnaire les informations nécessaires pour apprécier l’étendue des engagements à prendre et leur fiabilité économique et financière (ce qui se rapproche de l’obligation d’information précontractuelle de l’article L330-3 du Code de commerce français).

Enfin, cette loi prévoit qu’en cas de résiliation, le constructeur doit verser une indemnité tenant notamment compte des investissements réalisés.

L’Italie rejoint ainsi d’autres pays européens ayant mis en place une règlementation propre à la relation entre le constructeur automobile et son distributeur (Belgique, puis Luxembourg et Autriche). En France, l’idée d’une telle règlementation spécifique a déjà été soulevée, mais n’a pas abouti.

La Commission européenne autorise la création d’une joint-venture entre Sony et Honda.

Le 26 juillet 2022, la Commission européenne a autorisé l’opération de concentration notifiée le 1er juillet 2022 par les entreprises Sony, active dans le secteur des produits électroniques, des jeux, des services de divertissement et des services financiers, et Honda, active dans le secteur de l’automobile, des motocyclettes et des services financiers et produits énergétiques1 .

L’opération a pour objet la création d’une entreprise contrôlée en commun par Sony et Honda et dont l’activité sera de concevoir, produire et commercialiser des véhicules électriques à batterie (BEV) à haute valeur ajoutée.

La Commission a estimé que cette opération ne soulevait pas de difficultés de concurrence, compte-tenu des recoupements très limités entre les activités de ces sociétés au sein de l’EEE. À ce jour, le nom de l’entreprise commune n’a pas encore été communiqué.

Note

1Décision M.10787 – SONY / HONDA / JV

La route s’ouvre pour les véhicules réellement autonomes

La saga du véhicule autonome a connu cet été une avancée majeure, pour la France tout au moins.

Un décret1 est en effet venu transposer l’amendement porté en janvier dernier à la Convention de Vienne sur la circulation routière, ouvrant ainsi la voie aux véhicules pleinement autonomes (de catégorie 5, voire même de catégorie 4).

Ce décret propose notamment une définition de la conduite autonome dite « système de conduite automatisé » (système permettant « d’assurer le contrôle dynamique d’un véhicule de façon prolongée »), le « contrôle dynamique » étant lui-même défini comme « l’exécution de toutes les fonctions opérationnelles et tactiques en temps réel nécessaires au déplacement du véhicule. Il s’agit notamment du contrôle du déplacement latéral et longitudinal du véhicule, de la surveillance de la route, des réactions aux événements survenant dans la circulation routière, ainsi que de la préparation et du signalement des manœuvres. »

Sont ainsi levés les obstacles issus de la présence d’un « conducteur », telle qu’exigée par la Convention de Vienne dans sa rédaction d’origine (1968) puis reprise en France via l’article R. 412-6 du Code de la route (« tout véhicule en mouvement ou tout ensemble de véhicules en mouvement doit avoir un conducteur »).

Note

1 Décret n° 2022-1034 du 21 juillet 2022 portant publication de l’amendement à la convention internationale sur la circulation routière de Vienne du 8 novembre 1968, adopté à Genève le 14 janvier 2022

Décret de suspension du contrôle technique des deux roues

Par un décret n°2022-1044 du 25 juillet 2022, le décret du 9 août 20211 relatif à la mise en place au 1er janvier 2023 du contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles moteurs a été abrogé.

Il faut rappeler que cette abrogation semble être le dénouement d’une longue série de rebondissements.

Le décret de mise en place du contrôle technique était fortement critiqué depuis sa parution. Le Président de la République avait suspendu son application, considérant que ce n’était pas le moment « d’embêter les Français ». A l’inverse, plusieurs associations avaient attaqué ce décret, demandant l’entrée en vigueur du contrôle technique plus rapidement que ce qui était prévu. Le Conseil d’État avançait même la date de mise en œuvre du contrôle technique au 1er octobre 2022.

Pourtant, en dépit de cette victoire, le « lobby des motards » n’a peut-être pas définitivement eu gain de cause. De nouvelles mesures alternatives sur la sécurité routière, la pollution et le bruit des deux roues sont en effet attendues, s’agissant d’une possibilité prévue par le droit européen et qui permettrait d’éviter la mise en place d’un contrôle technique. Affaire à suivre.

Note

1n°2021-1062

Durcissement des règles de mesure des émissions de C02 dégagées par les voitures hybrides rechargeables

Au vu d’études montrant « des écarts significatifs entre les émissions des hybrides rechargeables en conduite réelle, et celles calculées avec la méthodologie actuelle » (selon une porte-parole de la Commission européenne), l’UE a révisé début juillet la réglementation encadrant la certification de ces mesures, afin de mieux représenter l’usage réel de ces véhicules.

Au constat, sans doute, de ce que les constructeurs, pour calculer les émissions de C02 d’un véhicule, annonçaient une part d’usage électrique supérieure à la réalité objective, la part de l’électrique sera réduite à partir de 2025, et le calcul s’alignera sur l’usage réel, sur la base des données collectées à partir des compteurs de consommation de carburant embarqués, après 2027.

Cette mesure était souhaitée notamment par nombre d’ONG qui considèrent que les véhicules hybrides rechargeables cumulent les inconvénients des moteurs thermiques (pollution de l’air, consommation élevée si le véhicule n’est pas régulièrement rechargé) et ceux des moteurs électriques (poids et prix élevés à cause de la double motorisation).

Obligation de délivrance conforme : le statut de véhicule de démonstration érigé en qualité de caractéristique essentielle

Par un arrêt rendu le 1er juin 2022 par la première chambre civile1, la Cour de cassation a eu l’opportunité d’apporter d’importantes précisions relatives à l’obligation de délivrance conforme dans le cadre de la vente d’un véhicule automobile.

Selon les faits, le 8 septembre 2014, un couple avait fait l’acquisition d’un véhicule automobile qui, selon le bon de commande, était de première main et avait parcouru 78.000 km depuis sa mise en circulation en juin 2012. Pourtant, Il apparaissait à la livraison que le carnet d’entretien du véhicule faisait état d’une intervention datant du 31 mai 2012, donc antérieure à la date de mise en circulation annoncée, et qu’à cette date, le véhicule avait déjà parcouru 23.283 km.

Sur pourvoi formé contre un arrêt rendu par la Cour d’appel de Poitiers, la Cour de cassation a confirmé la résolution de la vente pour manquement à l’obligation de délivrance conforme.

Elle confirme d’abord que toute contradiction entre le véhicule et le bon de commande est susceptible de caractériser un manquement à l’obligation de délivrance conforme, et juge que 1) la date de première mise en circulation, 2) le statut de véhicule de démonstration et 3) le kilométrage parcouru par le véhicule à sa date de mise en circulation constituent logiquement des caractéristiques essentielles et, à ce titre, doivent être transmises aux acquéreurs de façon précise et compréhensible.

La nouveauté d’un tel arrêt réside à notre avis dans le fait que la Cour de cassation indique que le fait qu’un véhicule était utilisé comme véhicule de démonstration constitue une caractéristique essentielle devant figurer au bon de commande.

En tout état de cause, il convient donc pour le vendeur de faire attention à ce qu’une telle mention figure sur le bon de commande sous peine de se voir reprocher un manquement à l’obligation de délivrance conforme.

Elle confirme d’abord que toute contradiction entre le véhicule et le bon de commande est susceptible de caractériser un manquement à l’obligation de délivrance conforme, et juge que 1) la date de première mise en circulation, 2) le statut de véhicule de démonstration et 3) le kilométrage parcouru par le véhicule à sa date de mise en circulation constituent logiquement des caractéristiques essentielles et, à ce titre, doivent être transmises aux acquéreurs de façon précise et compréhensible.

La nouveauté d’un tel arrêt réside à notre avis dans le fait que la Cour de cassation indique que le fait qu’un véhicule était utilisé comme véhicule de démonstration constitue une caractéristique essentielle devant figurer au bon de commande.

En tout état de cause, il convient donc pour le vendeur de faire attention à ce qu’une telle mention figure sur le bon de commande sous peine de se voir reprocher un manquement à l’obligation de délivrance conforme.

Note

1Cour de cassation, Chambre civile 1, 1er juin 2022, 20-19.623

Le futur « mini-règlement automobile »

La Commission européenne a publié le 6 juillet 2022 les éléments de la consultation lancée sur le règlement d’exemption par catégorie applicable au secteur automobile (dit « mini ABE »)1 , soit les dispositions spécifiques à l’après-vente, qui viennent à échéance le 31 mai 2023.

La Commission propose une prorogation à l’identique du règlement actuel pour 5 ans. L’automobile continuera donc à bénéficier d’un régime d’exception puisque l’exemption sera acquise lorsque la part de marché du fournisseur ne dépasse pas 40% (alors que ce seuil est de 30% dans le régime général).

En revanche, les lignes directrices élargiront les comportements restrictifs de concurrence à l’entrave à la transmission des données captées par les véhicules, qualifiées « d’intrant essentiel pour les services de réparation et d’entretien » par Margarethe Vestager, vice-présidente chargée de la politique de concurrence.

Le délai de réponse à la consultation expire le 30 septembre 2022.

Note

1Règlement UE n°461/2010 du 27 mai 2010 concernant l’application de l’article 101, §3 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à des catégories d’accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile

Garantie des vices cachés : un rappel utile sur le point de départ du délai de prescription de l’appel en garantie de l’entrepreneur contre le fabricant

Bien que la solution soit établie, la chambre commerciale de la Cour de cassation a rappelé, le 29 juin 20221, les règles de l’application des délais pour les recours en garantie sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Selon les faits, la société ENGIE avait commandé la construction d’une centrale de production d’électricité à la société SMAC (entrepreneur). Pour ce faire, cette dernière avait acheté des panneaux photovoltaïques à la société TENESOL, panneaux comprenant des connecteurs fournis par la société TEC (fabricant). Les connecteurs se révélaient défaillants et la société ENGIE agissait en réparation contre la société SMAC, laquelle appelait ensuite en garantie la société TEC.

La Cour d’appel de Versailles, remarquant qu’il n’y avait eu aucune diligence entre la date de découverte du vice et l’assignation, avait jugé l’action en garantie prescrite. Un pourvoi est formé et, sans surprise, ni ambiguïté, la Cour de cassation casse l’arrêt. Elle rappelle en effet : « En application de ce texte, le délai dont dispose l’entrepreneur pour former un recours en garantie contre le fabricant en application de l’article 1648 du Code civil court à compter de la date de l’assignation délivrée contre lui ».

Par conséquent, indépendamment de la date de la découverte du vice par un acquéreur final, l’action récursoire, soit l’appel en garantie effectué par le vendeur à l’encontre du fabricant, ne voit son délai de prescription courir qu’à partir du jour où l’assignation lui est délivrée.

La chambre commerciale de la Cour de cassation se range ainsi à la position de la 3ème chambre civile. Si cette solution est désormais classique, elle reste intéressante en ce qu’elle établit que l’action récursoire sur le fondement de la garantie des vices cachés est indépendante du fondement de l’action exercée par le client final. En effet, la Cour de cassation a également censuré l’arrêt de la Cour d’appel, jugeant que l’action en garantie des vices cachés n’est pas ouverte au maître de l’ouvrage à l’encontre de l’entrepreneur.

Note

1Cour de cassation, Chambre commerciale, 29 juin 2022, n°19-20.647

Consommation – Adoption de la Loi n°2022-1158 du 16 août 2022 portant des mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat

La loi « pouvoir d’achat » a pour objectif d’aider les ménages à faire face à la hausse actuelle des prix. Les mesures adoptées sont nombreuses et visent notamment à mieux protéger les consommateurs. En particulier, l’article 15 de la loi vient insérer un nouvel article au sein du Code de la consommation afin de simplifier les modalités de résiliation des contrats de consommation conclus par voie électronique.

Le nouvel article L215-1-1 impose par conséquent aux professionnels de rendre possible la résiliation par voie électronique d’un contrat lorsque (1) le consommateur a conclu le contrat par voie électronique ou (2) le consommateur n’a pas conclu le contrat par voie électronique mais qu’au jour de la résiliation, le professionnel offre au consommateur cette possibilité.

La date d’entrée en vigueur de cette nouvelle obligation sera fixée par un décret et ne pourra être postérieure au 1er juin 2023.

Décryptage du nouveau règlement vertical et des lignes directrices associées

La présente note de synthèse reprend « telles quelles » plusieurs formulations issues du Communiqué publié par la Commission européenne le 10 mai 2022

Contexte

La Commission européenne a adopté le 10 mai 2022 le nouveau règlement d’exemption par catégorie verticale (« VBER » pour « Vertical Block Exemption Régulation ») accompagné de nouvelles « Lignes directrices » (ci-après : « LD ») verticales1.

Rappel : le contexte de l’adoption du nouveau VBER

Que sont des « accords verticaux » ?

Les accords verticaux sont des accords (au sens de contrats ou de pratiques) entre deux ou plusieurs entreprises opérant à des niveaux différents de la chaîne de production ou de distribution et portant sur les conditions dans lesquelles les parties peuvent acheter, vendre ou revendre certains biens ou services.

Le Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE) interdit les accords entre entreprises qui restreignent la concurrence (article 101, paragraphe 1), autrement dit les ententes.

Toutefois, en vertu du paragraphe 3 de l’article 101, de tels accords sont compatibles avec le marché unique, et donc autorisés, pour autant qu’ils contribuent à améliorer la production ou la distribution de biens ou à promouvoir le progrès technique ou économique, tout en réservant aux consommateurs une part équitable des avantages qui en résultent et sans éliminer la concurrence.

Qu’est-ce qu’une exemption ?

Un accord est exempté s’il échappe à une interdiction de pratique anticoncurrentielle. Autrement dit, un accord exempté est un accord autorisé, par dérogation à l’interdiction de principe.

Le VBER exempte les accords verticaux s’ils remplissent certaines conditions de l’interdiction de l’article 101, paragraphe 1, du TFUE, créant ainsi une sphère de sécurité (« safe harbor ») pour ces accords.

Notamment, les accords verticaux sont exemptés si le fournisseur détient une part de marché qui ne dépasse pas 30% du marché de la vente des biens contractuels (le marché étant ici considéré comme le marché en amont de ses achats, et non le marché « local »).

Le VBER est accompagné de Lignes directrices qui fournissent des conseils sur la manière d’interpréter et d’appliquer le VBER et sur la manière d’évaluer les accords verticaux qui ne relèvent pas de la sphère de sécurité du VBER.

Contexte du processus d’examen

Dans la perspective de l’expiration du VBER de 2010, la CE avait entrepris un processus d’évaluation des règles en vigueur.

En septembre 2020, la Commission a publié un document de travail présentant les résultats de l’évaluation du VBER 2010 et des lignes directrices verticales et faisant apparaître que les règles devaient être adaptées aux évolutions du marché survenues depuis leur adoption en 2010.

À la suite de cette évaluation, en octobre 2020, la Commission a lancé l’analyse d’impact, au cours de laquelle elle a recueilli de nouvelles preuves sur les domaines à améliorer, notamment par le biais d’une consultation publique ouverte, de discussions avec les parties intéressées et les autorités nationales de concurrence, ainsi que par le biais de rapports d’experts ciblés.

En juillet 2021, la Commission a lancé une consultation publique invitant les parties prenantes à commenter un projet révisé de VBER et de lignes directrices verticales. En novembre 2021, la Commission a publié les résultats de la consultation publique, y compris un résumé des contributions reçues.

Une consultation ciblée supplémentaire sur le projet d’orientations relatives à l’échange d’informations dans le contexte de la double distribution a été menée en février 2022.

Le nouveau VBER et ses LD sont le résultat de ce processus, et notamment de la consultation ciblée.

Contenu

Les règles révisées fournissent aux entreprises des règles et des orientations plus simples, plus claires et à jour, afin de les aider à évaluer la compatibilité de leurs accords d’approvisionnement et de distribution avec les règles de concurrence de l’UE dans un environnement commercial remodelé par la croissance du commerce électronique et des ventes en ligne (« une décennie encore plus numérisée » selon les termes de la vice-présidente exécutive Margrethe Vestager , chargée de la politique de concurrence).

Principaux changements dans les règles révisées : généralités

Les principaux changements par rapport aux règles précédentes se concentrent sur l’ajustement de la sphère de sécurité pour s’assurer qu’elle n’est ni trop extensive ni trop réduite.

Changements aboutissant à réduire la sphère de sécurité quand elle était trop extensive

Ils concernent :

  • (i) la double distribution (« distribution duale »), et
  • (ii) les obligations de parité (c’est-à-dire les obligations qui exigent un vendeur à offrir des conditions identiques ou meilleures à sa contrepartie que celles proposées sur les canaux de vente tiers, tels que d’autres plateformes, et/ou sur les canaux de vente directe du vendeur, comme son site web).

Cela signifie que certains aspects de la double distribution et certains types d’obligations de parité ne seront plus exemptés en vertu du nouveau VBER, mais devront plutôt être évalués individuellement en vertu de l’article 101 du TFUE.

Changements aboutissant à élargir la sphère de sécurité quand elle était trop réduite

Ils concernent :

  • certaines restrictions de la capacité d’un acheteur à approcher activement des clients individuels, c’est-à-dire les ventes actives, et
  • certaines pratiques relatives à la vente en ligne, à savoir la possibilité de facturer au même distributeur différents prix de gros selon que les produits sont à vendre en ligne ou hors ligne, et la possibilité d’imposer des critères différents pour les ventes en ligne et hors ligne dans les systèmes de distribution sélective. Ces restrictions sont désormais exemptées en vertu du nouveau VBER, à condition que toutes les autres conditions d’exemption soient remplies.

Volonté de clarification et de simplification

Les règles VBER révisées ont également été clarifiées et simplifiées, afin de les rendre plus accessibles à ceux qui les utilisent dans leurs activités quotidiennes.

En particulier, les règles du VBER ont été mises à jour en ce qui concerne l’évaluation des restrictions en ligne, les accords verticaux dans l’économie des plateformes et les accords qui poursuivent des objectifs de durabilité, entre autres domaines.

En outre, les lignes directrices fournissent des orientations détaillées sur un certain nombre de sujets, tels que la distribution sélective et exclusive et les accords d’agence.

Changements intéressant particulièrement le secteur automobile

La distribution duale

Définition : lorsqu’un fournisseur vend ses biens ou services par l’intermédiaire de distributeurs indépendants mais aussi directement aux clients finaux (soit la « vente directe »).

Le sujet des échanges d’information

La double distribution est exemptée sauf si le fournisseur et le distributeur échangent des informations qui, soit ne sont pas directement liés à la mise en œuvre de l’accord vertical, soit ne sont pas nécessaires pour améliorer la production ou la distribution des biens ou services contractuels, soit ne remplissent aucune de ces deux conditions.

A ce titre, le règlement fournit une liste non-exhaustive des échanges pouvant et ne pouvant pas être exemptés. Selon cette liste :

  • sont généralement exemptés les échanges d’informations relatives à l’enregistrement, l’entretien, la mise à niveau ou l’utilisation des biens ou services, ainsi que celles portant sur les prix auxquels les biens ou services sont vendus par le fournisseur au distributeur.
  • A l’inverse, sont exclus les échanges d’informations portant sur les prix de revente futurs (sauf cas de promotion spéciale).

En synthèse, le fournisseur peut donc procéder, en parallèle à la vente à son réseau de distributeurs, à la vente directe au client final, à condition qu’il n’y ait pas entre le fournisseur et le distributeur d’échange d’informations sur des points autres que ceux permettant l’amélioration de la production ou de la distribution des produits. C’est un changement positif pour les constructeurs.

Les plateformes « hybrides »

Par ailleurs, la double distribution ne sera pas exemptée si le fournisseur dispose d’un service d’intermédiation en ligne (autrement dit une plateforme) « hybride », c’est-à-dire une plateforme qui vend également des biens ou des services en concurrence avec les entreprises auxquelles le fournisseur fournit des services d’intermédiation.

C’est une disposition problématique pour les constructeurs qui mettent à disposition du réseau une plateforme hybride, c’est-à-dire faisant à la fois de la mise en relation et de la vente (ce qui est, ou était, le cas de Peugeot).

Les ventes actives

Distribution exclusive

  • Le nouveau règlement introduit la possibilité d’une exclusivité partagée, qui permet à un fournisseur de désigner un maximum de 5 distributeurs par territoire exclusif ou groupe de clients. Ce changement était notamment souhaité par certains constructeurs de matériel agricole / tracteurs.
  • Il est désormais possible au fournisseur d’exiger de son distributeur exclusif qu’il « transmette » à ses clients directs les restrictions relatives aux ventes actives dans des territoires ou des groupes de clients exclusivement attribués à d’autres distributeurs (clause dite de « pass on »). Cette faculté permettra d’éviter certains contournements de l’interdiction des ventes actives hors zone d’exclusivité.
  • Les distributeurs exclusifs sont mieux protégés contre les ventes actives des autres territoires. Ainsi, la définition des ventes actives a été élargie et admet, par exemple, le fait de proposer sur un site internet des langues différentes de celles communément utilisées sur le territoire sur lequel l’acheteur est établi.
  • Le règlement reconnaît la faculté de recourir à des systèmes de distribution différents entre les différents Etats membres, sélectifs, exclusifs ou libres et dans ce cas d’éviter que l’exclusivité accordée dans les Etats sous distribution exclusive ne soit mise à mal par les ventes actives en provenance des Etats dans lesquels a été mise en place une distribution sélective ou libre.

Distribution sélective

Le nouveau règlement accorde aux systèmes de distribution sélective une protection renforcée : les fournisseurs peuvent désormais interdire aux distributeurs et à leurs clients de vendre à des distributeurs non-agréés situés sur un territoire où le fournisseur exploite un système de distribution sélective, que ces distributeurs et clients soient eux-mêmes situés à l’intérieur ou à l’extérieur de ce territoire.

Le constructeur peut désormais imposer au distributeur qu’il « transmette » l’interdiction de revente hors-réseau à ses clients directs, ce qui permettra d’endiguer les ventes hors réseau « en cascade », notamment lorsque l’acheteur est un loueur qui en réalité achète en vue de revendre, parfois hors EEE.

Les ventes en ligne

Certaines règles relatives aux pratiques indirectes restreignant les ventes en ligne sont assouplies. Ainsi sont désormais exemptés :

  • le double affichage des prix permettant de pratiquer des prix de gros différents envers un même distributeur selon qu’il revend par Internet ou en magasin physique, sous réserve que la différence de prix soit liée à des différences de coûts ou d’investissement entre ventes physiques et par Internet, et
  • le principe d’équivalence, c’est-à-dire le fait d’imposer des critères pour les ventes en ligne qui ne sont pas globalement équivalents aux critères imposés pour les ventes dans les magasins physiques, sous réserve de ne pas avoir pour objet d’empêcher les ventes par Internet.

C’est une avancée positive de la Commission qui, après avoir favorisé les ventes digitales, effectue un réajustement en faveur des sites physiques de commercialisation. Les constructeurs pourront donc « ajuster la marge du réseau en fonction du canal de vente » (autoactu.com).

Clarifications sur la distribution sélective et les contrats d’agents

Clarifications concernant la distribution sélective

Le nouveau VBER intègre les principes d’évaluation des restrictions en ligne tirés de la jurisprudence de la Cour de justice de l’UE, notamment dans les affaires Pierre Fabre et Coty.

Les LD2 expliquent quand certains comportements en ligne constituent des ventes actives ou passives, aux fins de l’évaluation des restrictions de vente sur des territoires ou des groupes de clients exclusifs. Par exemple, si l’exploitation d’un site web est considérée comme une forme de vente passive, la traduction de ce site dans une langue qui n’est pas couramment utilisée sur le territoire du distributeur est une forme de vente active.

Sur les plateformes : le nouveau VBER3 précise que les fournisseurs de services d’intermédiation en ligne sont considérés comme des fournisseurs et définit les services d’intermédiation en ligne.

Enfin, les restrictions territoriales et de clientèle caractérisées énumérées dans l’ancien VBER4, que les parties prenantes considéraient comme particulièrement complexes, ont été restructurées en trois groupes distincts, un pour chacun des principaux types de système de distribution, à savoir :

(i) la distribution exclusive ;

(ii) la distribution sélective ; et

(iii) la distribution qui ne relève ni de l’exclusivité ni de la sélectivité, soit la distribution « libre » (qui peut bénéficier de l’exemption).

Clarifications concernant les contrats d’agent

Dans la définition classique en droit français, l’agent ne relève pas du droit de la concurrence puisqu’il agit au nom et pour le compte de son mandant. Celui-ci (le fournisseur) prend en charge les investissements de l’agent et le rémunère par une commission.

Toutefois, le droit européen pose une définition différente, dont il résulte que les agents peuvent désormais relever du droit de la concurrence et donc du VBER. Les LD5 soumettent cette reconnaissance du statut d’agent au sens du droit européen de la concurrence à l’absence de prise en charge par l’agent (ou prise en charge demeurant absolument non-significative) de la totalité des coûts spécifiques aux contrats conclus et/ou négociés par l’agent, des coûts relatifs aux investissements spécifiques au marché ainsi qu’aux risques relatifs à d’autres activités exercées sur le même marché de produits lorsque cette activité indépendante est requise par le fournisseur.

La reconnaissance du statut d’agent en droit européen et dès lors sa soumission éventuelle au VBER est donc liée aux couts pris en charge et aux risques assumés, et est indépendante du mode de rémunération, ce qui était souhaité par les distributeurs.

Ces précisions sont très importantes pour le secteur automobile, où l’option du contrat d’agent est envisagée par un nombre croissant de constructeurs. En définitive, le choix par le constructeur de son schéma de distribution à venir dépend de la priorité mise sur la possibilité de fixer le prix client final ou sur la prise en charge par le distributeur des couts spécifiques au contrat :

Schéma A : les constructeurs privilégient la faculté de déterminer le prix client final.

Dans ce cas, (1) le distributeur ne supporte pas les couts spécifiques aux contrats conclus (ces couts lui seront donc remboursés par le constructeur) ainsi que les risques qui vont avec, et (2) le contrat (d’agent) ne relève pas du VBER.

C’est le schéma dit de l’agent « genuine ».

Schéma B : les constructeurs privilégient la prise en charge par le distributeur des couts spécifiques aux contrats conclus.

Dans ce cas, (1) le distributeur supporte les couts spécifiques aux contrats conclus, et les risques qui vont avec, et (2) le contrat (d’agent) relève du VBER, ce qui interdit la fixation du prix client final par le constructeur.

C’est le schéma dit de l’agent « non-genuine ».

Enfin, le règlement tient compte des situations mixtes où l’activité reste sous le régime de distribution sélective quantitative, pour une partie, et avec un contrat d’agence (soumis aux obligations évoquées ci-dessus), pour une autre.

Le VBER révisé et les lignes directrices verticales sont entrés en vigueur le 1er juin 2022, pour une durée de 12 ans.

Notes :

1 Publication au JO le 11 mai 2022 ; adoption des versions linguistiques (dont Française) le 28 juin 2022.

2 section 6.1.2

3 article 1(1)(d

4 article 4(b)

5 points 23 à 45

Le « contrat climat »

La loi Climat et Résilience du 22 août 20211 prévoit en son article 7 une obligation de déclaration sur la plateforme en ligne suivante : https://www.demarches-simplifiees.fr/commencer/contrat-climat.

La procédure de déclaration a été détaillée par le Décret du 22 avril 2022 (n°2022-616), suivi d’une lettre que le Ministère de la Transition Écologique a adressée le 18 mai 2022 aux entreprises potentiellement soumises à l’obligation de déclaration.

L’obligation de déclaration concerne les importateurs, distributeurs ou autres metteurs sur le marché de certains biens et services et dont les investissements publicitaires sont supérieurs ou égaux à 100 000 € par an.

Sont notamment concernés par cette obligation les importateurs, distributeurs ou autres metteurs sur le marché des biens et services suivants :

  • Voitures particulières.
  • Éclairage (sources lumineuses telles que les ampoules et les LED, appareillages de commandes) ;
  • Appareils de chauffage (dispositifs de chauffage décentralisés, dispositifs de chauffage des locaux et chauffe-eau, chaudières à combustible solide) ;
  • Réfrigération (réfrigérateurs, congélateurs, armoires frigorifiques professionnelles alimentées sur secteur, réfrigérateurs disposant d’une fonction de vente directe, armoires frigorifiques de supermarché, vitrines de vente de glace, distributeurs automatiques réfrigérés, appareils de réfrigération de boissons et congélateurs pour crèmes glacées) ;
  • Lave-linge, sèche-linge, sèche-linge à tambour, lavante-séchante ;
  • Climatiseurs et unités de ventilation résidentielles ;
  • Dispositifs d’affichage électroniques (téléviseurs, dispositifs d’affichage dynamiques, écrans d’ordinateurs) ;
  • Appareils de cuisson (fours, hottes dont cuisinières) ;
  • Lave-vaisselle.

À l’occasion de la déclaration, les entreprises soumises à cette obligation doivent exprimer si elles adhèrent ou non à un « contrat climat ».

Que sont les « contrats climats » ?

Les « contrats climats », que l’Arcom (ex-CSA) est chargée de promouvoir, sont des codes de bonne conduite auxquels les entreprises peuvent décider d’adhérer.

Ces contrats ont pour « objet de réduire de manière significative les communications commerciales (…) relatives à des biens et services ayant un impact négatif sur l’environnement, en particulier en termes d’émissions de gaz à effet de serre, d’atteintes à la biodiversité et de consommation de ressources naturelles sur l’ensemble de leur cycle de vie » (article 14 de la Loi Climat et Résilience).

Quels sont les engagements pris par les entreprises qui souscrivent au « contrat climat » ?

Deux séries d’engagements sont pris par les entreprises :

  • Des engagements généraux qui sont pris par l’ensemble des signataires d’un contrat climat : il s’agit de la partie « socle » du « contrat climat » ;
  • Des engagements propres aux différents secteurs d’activités des signataires : il s’agit de la partie « sectorielle » du « contrat climat ».

La partie « sectorielle » du « contrat climat » indique les 5 axes sur lesquels les entreprises s’engagent :

  1. Encourager dans les communications commerciales la promotion de produits ou services ayant un faible impact sur l’environnement et visant à réduire de manière significative les communications commerciales relatives aux biens et services ayant un impact négatif élevé sur l’environnement ;
  2. Encourager dans les communications commerciales l’évolution des modes de vie et des comportements vis-à-vis de l’environnement ;
  3. Proposer et encourager des modes de productions des communications commerciales avec un faible impact sur l’environnement ;
  4. Sensibiliser et former leurs collaborateurs aux enjeux de la transition écologique dans les communications commerciales et aux bonnes pratiques qui y sont associées ;
  5. Les autres engagements en faveur de la transition écologiques que souhaite prendre l’entreprise.

Il résulte de ces dispositions que la formalité de la déclaration nécessite pour l’entreprise déclarante de prendre une position de principe sur son adhésion ou sa non-adhésion à un « contrat climat ».

Il faut ajouter que la liste des adhérents et des non-adhérents est accessible au public, « dans une logique de name and shame2 », sur le site du gouvernement à l’adresse suivante : https://www.publicite-responsable.ecologie.gouv.fr/

Il y a donc un fort impact potentiel de l’adhésion en termes de réputation de l’entreprise déclarante et d’image de la marque.

Une fois la déclaration effectuée et dans l’hypothèse où l’entreprise aura décidé d’adhérer à un « contrat climat », ce dernier sera par la suite à déposer sur la plateforme à partir d’un contrat type téléchargeable sur celle-ci.

Quels délais ?

Les entreprises soumises à l’obligation de déclaration devaient effectuer celle-ci avant le 31 mai 2022.

Si elles adhéraient au principe d’un « contrat climat », elles avaient alors jusqu’au 30 juin 2022 pour déposer une première version du contrat, puis ont ensuite jusqu’au 31 décembre 2022 pour, le cas échéant, en déposer une éventuelle nouvelle version.

Bien que les délais soient passés, il est en principe toujours possible de se déclarer sur la plateforme https://www.demarches-simplifiees.fr/commencer/contrat-climat et d’y déposer un contrat climat.

Quelles sanctions ?

Le défaut de déclaration ne sera sanctionné qu’à compter du 1er janvier 2023, à raison d’une amende administrative d’un montant de 30 000 € maximum.

À notre sens, ceci signifie en pratique qu’au regard du risque de sanction (amende) les entreprises soumises disposent « de facto » d’un délai au 31 décembre 2022 pour effectuer la déclaration – et donc prendre position sur le principe d’une adhésion à un « contrat climat » – et, le cas échéant, déposer le « contrat climat ».

En revanche, il appartient à chaque entreprise concernée d’évaluer les risques en termes de réputation et d’image de marque si elle ne déclare et/ou n’adhère pas dans les délais annoncés.

Notes :

1 la loi Climat et Résilience n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

2 Cf le Guide méthodologique à l’élaboration du contrat climat accessible à l’adresse suivante : https://www.publiciteresponsable.ecologie.gouv.fr/IMG/pdf/guide.pdf

Droit de la consommation – Pas de qualification de « contrat conclu à distance » en l’absence d’un système organisé de vente à distance

L’article L 221-1 du Code de la consommation définit le contrat conclu à distance comme « tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d’un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu’à la conclusion du contrat ».

Par un arrêt du 31 août 20221 , la Cour de cassation rappelle le caractère cumulatif des conditions posées par cet article.


Ainsi, bien que le contrat ait été conclu sans la présence physique simultanée des deux parties et par le recours exclusif à des techniques de communication à distance, la Cour de cassation rejette la qualification de contrat conclu à distance dès lors qu’il n’a pas été conclu dans le cadre d’un système organisé de vente ou de prestation de services à distance.

Il s’agissait en l’occurrence d’un contrat pour travaux d’aménagement, d’ameublement et de décoration d’un appartement conclu avec un professionnel exerçant individuellement, qui n’avait pas mis en place de système organisé de prestation de service à distance. Il en résulte notamment l’absence de droit de rétractation pour la cliente.

La Cour de cassation ne donne en revanche aucune indication sur la définition d’un « système organisé de vente ou de prestation de service à distance ». A ce titre, il peut être relevé le considérant 20 de la Directive 25 octobre 20112 aux termes duquel « La notion de système organisé de vente ou de prestation de service à distance devrait inclure les systèmes proposés par un tiers autre que le professionnel mais utilisés par ce dernier, par exemple une plateforme en ligne. Elle ne devrait pas couvrir, cependant, les cas où des sites internet offrent uniquement des informations sur le professionnel, ses biens et/ou ses services ainsi que ses coordonnées ».

Notes

1Cass. 1ère Civ. n°21-13.080
2Directive 2011/83/UE

Actualité de la rupture brutale de relations commerciales établies

Pour apprécier la durée du préavis qui aurait dû être accordé, le juge ne doit pas tenir compte des circonstances postérieures à la rupture, quand bien même celles-ci établissent que la partie victime de la rupture a pu se reconvertir avant le terme du préavis.

Un fournisseur, en relation commerciale depuis 56 ans avec son distributeur, lui notifie la rupture de la relation contractuelle moyennant un préavis de 18 mois, que le fournisseur portera ensuite à 30 mois, suite à une demande en ce sens du distributeur.

Toutefois ayant obtenu un nouveau panneau qui exigeait une exclusivité, le distributeur refuse la prolongation de préavis qui lui était proposée afin de pouvoir engager le partenariat avec son nouveau concédant.

Bien qu’ayant effectué sa reconversion, et ce avant même la fin du préavis initial, le distributeur assigne le fournisseur en rupture brutale de la relation commerciale établie, faisant valoir que c’est un préavis de 36 mois qui aurait dû lui être accordé.

Par un arrêt rendu en 2020, la Cour d’appel de Paris avait jugé que la prolongation du préavis de 18 à 30 mois était sans effet, mais avait cependant considéré que le préavis de 18 mois était suffisant en regard de l’ancienneté de la relation et des autres circonstances de la rupture. Le distributeur s’était alors pourvu devant la Cour de cassation.

Par un arrêt du 1er juin 20221, la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel de Paris au motif que celle-ci, si elle avait jugé le préavis de 18 mois suffisant, n’avait pas précisé quelle était la durée du préavis qui devait au cas d’espèce être accordé compte tenu de l’ancienneté de la relation et des autres circonstances de la rupture. Autrement dit, il appartient à la juridiction d’indiquer d’abord quel préavis aurait dû être accordé, puis ensuite de statuer sur le caractère suffisant ou insuffisant du préavis effectivement accordé. Dans cette affaire, la Cour d’appel de Paris s’était dispensée de la première étape du raisonnement.

A l’occasion de cet arrêt, la Cour de cassation rappelle (comme la Cour d’appel de Paris l’avait fait dans son arrêt de 2020) que le juge n’a pas à se fonder sur une circonstance postérieure à la rupture pour apprécier si le préavis accordé est ou non suffisant. La Cour de cassation perpétue ainsi une jurisprudence remontant à 2012 et 2013, pourtant assez largement critiquée. Le refus intransigeant de prendre en considération les circonstances postérieures à la rupture apparaît en effet particulièrement choquant dans des circonstances telles que celles de la présente affaire (et il en était de même dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts de 2012 et 2013), où le distributeur anticipe la fin du préavis qui lui a été accordé, ceci en raison d’une solution de redéploiement qu’il est parvenu à trouver, mais poursuit néanmoins le fournisseur au motif d’un préavis insuffisant !

Un peu de pragmatisme serait bienvenu dans l’appréciation par les juges du préavis suffisant, en revenant aux « fondamentaux » de la raison d’être d’un préavis : permettre la reconversion de la partie victime de la rupture.

Note

1Cass com, 1er juin 2022, n° 20-18960, Claas France c. Ets Baudet

Responsabilité Élargie du Producteur – Identifiant unique IDU (immatriculation SYDEREP)

Depuis le 1er janvier 2022, les producteurs des filières à Responsabilité Elargie du Producteur (REP) sont soumis à une obligation d’immatriculation auprès de l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie (ADEME) et se voient délivrer un identifiant unique (IDU).

La notion de producteur couvre, aux termes de l’article L541-10 du Code de l’environnement : « toute personne physique ou morale qui élabore, fabrique, manipule, traite, vend ou importe des produits générateurs de déchets ou des éléments et matériaux entrant dans leur fabrication ».

La mise en place de cet identifiant vise à simplifier le suivi et le contrôle du respect des obligations qui incombent aux producteurs appartenant à une filière de REP. L’IDU permet d’identifier les producteurs lors de la transmission annuelle des documents et informations requis par l’ADEME.

Cet identifiant unique est généré de manière automatique après l’enregistrement du producteur sur le site SYDEREP (Système Déclaratif des Filières REP).



• Lorsque le producteur a fait le choix d’adhérer à un éco-organisme, ce dernier se charge de l’enregistrement et communique au producteur son IDU.

• Lorsque le producteur a opté pour le système individuel, il doit lui-même réaliser les démarches d’enregistrement pour obtenir son IDU de la part du SYDEREP.




Les producteurs opérant au sein de plusieurs filières REP se voient attribuer autant d’IDU que de filières REP auxquelles ils sont inscrits.

L’IDU doit figurer dans les conditions générales de vente des producteurs concernés ou, lorsqu’ils n’en disposent pas, dans tout autre document contractuel communiqué à l’acheteur.

L’IDU doit également être mentionné sur le site internet du Producteur dans les mêmes conditions que les informations mentionnées à l’article 19 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (raison sociale, adresse de courrier électronique, numéro RCS, adresse du siège etc).

Attention, le défaut d’enregistrement, la déclaration erronée, ou le défaut de mention de l’IDU sur les supports obligatoires constituent des manquements pouvant être sanctionnés par le ministre chargé de l’environnement d’une amende administrative au plus égale à 30 000 €.

Vous trouverez ci-dessous un schéma récapitulatif de l’ADEME sur les filières concernées actuelles et à venir :

Tous les avocats du Département se tiennent à votre disposition pour vous aider à vous conformer à ces nouvelles obligations.

Publication du décret relatif à la garantie légale de conformité

Le 29 juin 2022 a été publié le Décret n° 2022-946 relatif à la garantie légale de conformité pour (1) les biens, (2) les contenus numériques et (3) les services numériques. Le décret est venu compléter la réforme entreprise par l’Ordonnance n° 2021-1247 du 29 septembre 2021.


Pour rappel, l’Ordonnance avait modifié plusieurs dispositions du Code de la consommation qui sont entrées en vigueur à compter du 1er janvier 2022. Ces nouvelles dispositions ont notamment eu pour objet d’étendre le régime existant de la garantie légale de conformité des biens, aux biens comportant des éléments numériques.

Le Décret n°2022-946 vient notamment préciser le contenu de l’obligation générale d’information précontractuelle relative à la garantie légale de conformité des biens et des contenus et services numériques. Ainsi à compter du 1er octobre 2022, le producteur (c’est-à-dire le fabricant d’un bien ou l’importateur) devra communiquer à son vendeur et mettre à la disposition des consommateurs les informations suivantes :

  • Les logiciels du bien faisant l’objet des mises à jour, y compris les mises à jour de sécurité ;
  • La durée de fourniture de ces mises à jour ou la date à laquelle cette fourniture prend fin ;
  • Les conséquences possibles, en l’état de ses connaissances, des mises à jour fournies au-delà de la durée ou de la date indiquée sur les performances du bien et notamment sur l’espace de stockage disponible, la disponibilité de la mémoire vive ou la durée de vie de la batterie.

Le Décret impose par ailleurs aux professionnels l’usage des termes « garantie légale » et « garantie commerciale » à l’égard des consommateurs, ainsi que l’obligation pour le professionnel de préciser en quoi la garantie commerciale s’applique en sus des droits dont bénéficie le consommateur au titre de la garantie légale de conformité.

Enfin, le Décret contient en annexe des modèles d’encadrés à obligatoirement insérer au sein des conditions générales de vente ou des conditions de garantie de tous types de biens afin d’informer le consommateur sur les modalités de mise en œuvre des garanties légales et commerciales.

L’importateur doit-il assumer la garantie des vices cachés lorsqu’il n’a pas importé le véhicule ?

Dans une chaîne de contrats translatifs de propriété, les garanties attachées à un bien, objet de ventes successives, le suivent en tant qu’accessoire et permettent au sous-acquéreur d’agir à l’encontre du ou des vendeurs intermédiaires, et donc à l’encontre du vendeur initial, c’est-à-dire le fabricant (ou l’importateur), dans le cadre d’une action directe.

Cette action directe est nécessairement de nature contractuelle.

Ce principe a été posé de longue date, depuis un arrêt rendu dans une affaire automobile1 dans lequel la Cour de cassation avait cassé un arrêt de la Cour d’appel de Paris qui avait jugé que le lien entre le sous-acquéreur et le fabricant (importateur) était de nature quasi-délictuelle, conformément à l’article 1383 (ancien) du Code civil.

Alors que dans l’affaire Lamborghini, la chaine de contrats était homogène (contrats de vente successifs), la Cour de cassation a ensuite jugé une affaire de construction dans laquelle la chaine de contrats était hétérogène (contrats d’entreprise et contrats de vente) et a rendu à cette occasion, en Assemblée Plénière, un arrêt de principe2 confirmant la nature nécessairement contractuelle de l’action directe du sous-acquéreur : « le maître de l’ouvrage comme le sous-acquéreur jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur ».

Cependant, pour que l’action aboutisse, le demandeur – sous-acquéreur ou vendeur intermédiaire – doit prouver un lien contractuel direct avec le vendeur originaire, c’est-à-dire le fabricant ou l’importateur. Si l’importateur n’est pas intervenu dans la chaine des ventes, le sous-acquéreur ne dispose d’aucune action contractuelle directe à son encontre.

La Cour d’appel de Bordeaux vient de rappeler ce principe dans un arrêt rendu le 3 octobre 20193, à l’occasion d’une affaire automobile.

Dans l’espèce ayant donné lieu à la décision précitée, un acquéreur a fait l’acquisition d’un véhicule neuf auprès d’un distributeur de la marque SSANGYONG (le vendeur). Dans la perspective de cette vente, le vendeur avait directement importé le véhicule auprès d’un revendeur suédois. Autrement dit, le véhicule n’avait pas été importé en France par l’importateur français de la marque, mais l’avait été au travers d’un canal parallèle.

Lorsque des dysfonctionnements ont été observés, l’acquéreur en a informé son vendeur (tenu à ce titre à la garantie des vices cachés, conformément à l’article 1641 du Code civil) et a sollicité la réparation de son véhicule. Le vendeur a refusé de procéder à la réparation du véhicule et a renvoyé l’acquéreur vers l’importateur français de la marque.

L’importateur français qui n’avait pas importé le véhicule sur le territoire français a refusé de garantir l’acquéreur et le vendeur, et a eu gain de cause en première instance quand bien même le Tribunal a prononcé la résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Aux termes de l’arrêt précité, qui confirme la jurisprudence désormais constante en la matière4,5,6,7,8, la Cour d’appel confirme la décision rendue par les juges du fond.

En premier lieu, l’arrêt rappelle clairement le principe de l’absence de responsabilité contractuelle de l’importateur lorsqu’il n’est pas intervenu dans la chaine des ventes, la Cour d’appel jugeant en l’espèce que l’importateur officiel des véhicules de marque SSANGYONG pour la France n’avait aucun lien contractuel avec le vendeur du véhicule.

La Cour a en outre relevé que dans cette affaire, l’importateur et le vendeur étaient de fait deux sociétés concurrentes, puisque le vendeur était une société importatrice de véhicules indépendante.

Une fois la question de la responsabilité contractuelle tranchée, la Cour d’appel de Bordeaux s’est prononcée sur celle de la responsabilité délictuelle de l’importateur, qui était également invoquée par le vendeur.

En effet, dans cette affaire, le vendeur soulevait, subsidiairement et sur un fondement délictuel, la responsabilité de l’importateur français de la marque SSANGYONG en raison de ce que celui-ci avait délivré le certificat de conformité permettant l’immatriculation du véhicule.

Sur ce second point, la Cour a jugé que la seule délivrance d’un certificat de conformité aux acquéreurs ne permet nullement de démontrer l’existence d’une faute de l’importateur à l’égard du vendeur, qui tiendrait à un défaut de conseil ou d’information sur des avaries sérielles affectant les véhicules de la marque.

Aux termes de sa motivation, la Cour relève au passage que le vendeur, en sa qualité de professionnel indépendant de vente d’automobiles, avait en application du Règlement européen CE n°715/200, accès à toutes les informations que doit le constructeur aux opérateurs indépendants par l’intermédiaire de sites “web” dédiés », ce dont il résulte que, disposant d’une alternative, il n’était pas contraint de faire appel à cet égard à l’importateur français de la marque.

Si l’on peut désormais considérer comme tranchée au fond la question de la responsabilité de l’importateur en cas d’action au fondement de la garantie des vices cachés lorsque le véhicule n’a pas été importé par l’importateur, il reste encore à convaincre le Juge des référés …

En effet, au stade du référé en désignation d’expert, l’importateur appelé dans la cause alors qu’il n’a pas importé le véhicule ne parvient pas toujours à obtenir du Juge qu’il l’écarte des opérations d’expertise à venir, l’argument n’étant pas systématiquement considéré comme constituant un motif légitime pour être écarté des mesures d’instruction sollicitées.

Cet article a été rédigé par l’équipe Viginti Avocats.

Notes

1Cass 9 octobre 1979, Lamborghini c. Paris Monceau, Bull Civ 1, n°241, D. 1980, IR 222

2Cass Ass. Plén., 7 février 1986

3CA Bordeaux – RG 17/01936

4CA Nîmes 1er chambre B, 22 juin 2010

5TGI d’Albertville 4 septembre 2007

6CA de Toulouse 27 mars 2012.

7CA de Montpelier 15 octobre 2015.

8CA de Versailles – 12ème Ch – RG 2012F00219

L’appréciation jurisprudentielle rigoureuse de l’obligation de désigner l’auteur d’une infraction routière pesant sur le représentant légal d’une société

Depuis le 1er janvier 2017 et en vertu de l’article L121-6 du Code de la route, le représentant légal d’une société a l’obligation de désigner – dans un délai de 45 jours à compter de la réception de l’avis de contravention – l’auteur d’une infraction routière commise au moyen d’un véhicule immatriculé au nom de la société.

Cette obligation de « dénonciation » concerne les infractions constatées par des appareils de contrôle automatique, ce qui inclut par conséquent les vidéo-verbalisations ainsi que les infractions constatées par un radar.

Elle est en outre particulièrement étendue puisque le représentant légal de la société doit communiquer à l’Administration – par lettre recommandée avec avis de réception ou par voie dématérialisée – l’identité, l’adresse ainsi que la référence du permis de conduire de la personne physique qui conduisait le véhicule au moment de l’infraction.

Le représentant de la personne morale peut uniquement s’affranchir de son obligation en cas de vol du véhicule, d’usurpation de la plaque d’immatriculation ou plus généralement de tout autre événement de force majeure, sous réserve bien entendu d’en apporter la preuve.

Le fait de ne pas remplir cette obligation constitue une contravention de quatrième classe sanctionnée par une peine d’amende d’un montant maximum de 750 € par infraction pour les personnes physiques et 3 750 € pour les personnes morales.

Cette obligation de désignation génère depuis plusieurs mois un contentieux important qui a récemment donné lieu à plusieurs arrêts rendus par la Chambre criminelle de la Cour de cassation.

Force est ainsi de constater que la Cour de cassation entend faire une application particulièrement rigoureuse de l’article L121-6 du Code de la route.

Aux termes de plusieurs arrêts rendus le 11 décembre 2018, la Cour de cassation a en effet jugé :

  • Que le fait que l’article L121-6 du Code de la route vise uniquement le représentant légal ne
    fait pas obstacle à l’engagement de la responsabilité pénale de la personne morale pour la contravention (de non désignation) commise pour son compte par son représentant1 ;
  • Qu’il importe peu que l’avis de contravention soit adressé à l’attention de la personne morale ou de son représentant2 ;
  • Que l’infraction est constituée dès lors que l’avis de contravention pour non-désignation du conducteur a été établi après l’entrée en vigueur de la loi (le 1er janvier 2017) même si l’infraction principale au Code de la route a été commise avant cette date3.

En dernier lieu, la Cour de cassation a précisé que l’obligation de désignation incombait au
représentant légal de la société, y compris si le représentant légal était l’auteur de l’infraction. La Cour de cassation censure ainsi le raisonnement du juge qui avait prononcé la relaxe du représentant légal au motif que l’amende pour excès de vitesse avait été réglée par le représentant légal qui s’était donc « auto-désigné » comme auteur de l’infraction et que le fait que la case indiquant la désignation du
conducteur n’était pas cochée résultait d’une simple erreur matérielle.

En conséquence, si le représentant légal commet une infraction au code de la route au volant d’un véhicule de société il devra – à réception de l’avis de contravention adressé au représentant légal de la société – expressément s’auto-désigner en cochant la case prévue à cet effet sur le formulaire et en transmettant l’ensemble des informations prescrites par la loi4.

Il convient enfin de préciser que la Chambre criminelle a refusé de renvoyer au Conseil constitutionnel les (nombreuses) QPC portant sur l’article L121-6 du Code de la route, considérant que ces dispositions ne portaient pas atteinte au principe de la liberté de conscience ou de la liberté d’opinion5.

Cet article a été rédigé par l’équipe Viginti Avocats.


Notes

1 Cass. Crim. 11 décembre 2018, n°18-82.628

2 Cass. Crim. 11 décembre 2018, Jurisdata n°2018-022816 et Jurisdata n°2018-022759

3Cass. Crim. 11 décembre 2018, n°18-82.820

4Cass. Crim.15 janvier 2019, n°18-82.380

5Cass. Crim. 7 février 2018, n°17-90;023; Cass. Crim. 4 avril 2018, 18-90.001
; Cass. Crim. 2 mai 2018, n°18-90.003 ; Cass. Crim. 26 juin 2018, n°18-90.010
et n°18-90.011 ; Cass. Crim. 27 juin 2018, n°18-90;013