Par un arrêt rendu le 28 mai 2025, la troisième chambre civile de la Cour de cassation rappelle les conditions de forme qui s’imposent aux procédures d’expropriation, notamment lorsqu’elles portent sur une emprise partielle.
Elle casse, sans renvoi, une ordonnance d’expropriation du juge de l’expropriation du tribunal judiciaire de La Rochelle du 11 janvier 2023, au motif qu’elle a ordonné une expropriation partielle sans qu’ait été préalablement établi un procès-verbal d’arpentage.
En l’espèce, un propriétaire exproprié contestait la légalité de l’ordonnance prononçant l’expropriation partielle de sa parcelle au bénéfice de l’Établissement public foncier de Nouvelle-Aquitaine. Il faisait valoir que la décision était entachée d’un vice de forme, en ce qu’elle ne respectait pas les exigences légales applicables à la désignation des biens en cas d’emprise partielle, telles que prévues aux articles R. 221-4, R. 132-2 et R. 132-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, ainsi qu’à l’article 7 du décret du 4 janvier 1955 relatif à la publicité foncière.
La Haute juridiction lui donne raison. Elle juge que, lorsque l’expropriation porte seulement sur une fraction de parcelle, et qu’elle implique une modification des limites de propriété, un procès-verbal d’arpentage doit obligatoirement être dressé au préalable. Ce document permet une désignation précise de l’immeuble exproprié selon les règles cadastrales, et garantit la validité des actes subséquents, notamment en matière de publicité foncière.
En l’absence d’un tel document d’arpentage, l’ordonnance d’expropriation ne peut répondre aux exigences légales de désignation de l’emprise. La Cour relève ici une violation manifeste des textes susvisés et constate que cette irrégularité constitue un vice de forme affectant la validité de l’acte. Elle casse donc l’ordonnance attaquée.
Cet arrêt s’inscrit dans la lignée de la décision du 9 juillet 2018 (CE, 6e et 5e chambres réunies, n° 406696), rendue à l’occasion d’un recours dirigé contre un arrêté de cessibilité. Le Conseil d’État y a jugé, de manière similaire à la Cour de cassation, qu’en cas d’emprise partielle affectant les limites cadastrales, la régularité de la procédure d’expropriation suppose l’établissement préalable d’un document d’arpentage. Son omission entache l’arrêté de cessibilité d’illégalité.
L’absence de document d’arpentage en cas d’expropriation partielle affecte à la fois la légalité de l’arrêté de cessibilité, susceptible d’être annulé par le juge administratif, et la régularité de l’ordonnance d’expropriation, qui peut ainsi être cassée par la Cour de cassation.
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Michaël Moussault est un spécialiste du droit foncier. Il intervient notamment sur les questions relatives aux acquisitions foncières (forcées ou amiables), ainsi que sur des questions relatives à la gestion des biens et aux problèmes d’éviction des commerçants et de relogement des occupants des immeubles acquis dans le cadre d’opérations d’aménagement.