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Contrefaçon d’une œuvre de collaboration : revirement de jurisprudence

03 décembre 2015

La recevabilité de l’action en contrefaçon dirigée à l’encontre d’une œuvre de collaboration est subordonnée à la mise en cause de l’ensemble des coauteurs de l’œuvre, dès lors que leur contribution ne peut être séparée. C’est le sens de l’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 30 septembre 2015.

Dans cette affaire, un auteur soutenait que deux chansons contrefaisaient une composition musicale dont il est l’auteur, et a assigné deux coauteurs, à l’exception du parolier, en vue d’obtenir réparation de l’atteinte portée à ses droits moraux.

En défense, les deux coauteurs opposaient une fin de non-recevoir tirée de l’absence de mise en cause du parolier, auteur lui aussi de la chanson (mais spécifiquement des paroles). La Cour d’appel a rejeté cet argument en décidant que cette irrecevabilité ne pouvait pas être soulevée lorsque la demande est fondée sur une atteinte au droit moral. La Cour d’appel faisait ici application de décisions antérieures affirmant que l’action fondée sur la violation du seul droit moral ne nécessite pas la mise en cause de tous les coauteurs en raison de la nature extrapatrimoniale du droit moral.

Mais, dans cette nouvelle espèce, la Cour de cassation modifie sa jurisprudence antérieure et casse l’arrêt d’appel pour décider que « la recevabilité de l’action en contrefaçon dirigée à l’encontre d’une œuvre de collaboration, laquelle est la propriété commune des coauteurs, est subordonnée à la mise en cause de l’ensemble de ceux-ci, dès lors que leur contribution ne peut être séparée, quelle que soit la nature des droits d’auteur invoqués par le demandeur à l’action ».

Cette décision permet d’unifier la jurisprudence de la Cour de cassation. La mise en cause de l’ensemble des coauteurs est ainsi la condition de recevabilité des actions en contrefaçon à l’encontre d’une œuvre de collaboration, et ce quelle que soit la nature du droit invoqué (patrimonial ou moral). Les coauteurs sont réputés assumer ensemble l’ensemble de la titularité des droits, patrimoniaux et extrapatrimoniaux, sur l’œuvre qu’ils ont créée par leur collaboration.

Cet arrêt est également intéressant du fait du contrôle exercé par la haute juridiction sur la caractérisation de l’originalité d’une œuvre, qui relève normalement de l’appréciation souveraine des juges du fond. La cour d’appel avait justement refusé de reconnaître l’originalité de l’œuvre contrefaite au motif que le morceau de musique était composé d’un « enchainement d’accords identiques sur quatre notes » qui est « couramment utilisé dans les compositions musicales actuelles ».

Ainsi, l’originalité d’une œuvre peut être retenue même si elle comporte en son sein un élément non-protégeable. Les juges du fond ne doivent donc pas s’intéresser à telle ou telle partie d’une œuvre, mais à l’œuvre dans son ensemble pour en caractériser l’originalité – ou l’absence d’originalité. Cette décision consolide donc clairement le régime de l’œuvre de collaboration et pose qu’une telle œuvre doit être appréhendée dans son ensemble, les droits des coauteurs étant indistincts et les éléments partiels la composant pouvant manquer d’originalité.

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